Après six ans d’abstinence en 60 pieds, ça doit faire plaisir ce nouveau Generali !
Non je ne le vois pas comme ça. Cela fait 40 ans que je dessine des bateaux… Je les dessine pareil, toujours aussi c… D’autres confrères ont dessiné des bateaux similaires même un peu plus pires parfois… Nous on suit quand même une certaine logique. Dessiner un bateau Open, c’est faire un peu plus que l’autre (plus de voilure, plus de stabilité, plus d’études,…). Plus sérieusement, oui ça me fait très plaisir et à Pascal aussi. Nous avons travaillé avec succès par le passé pour Patrick Eliès, le père de Yann. C’est un copain et avec Gilles Ollier on se connaît de longue date aussi.
Quoi de neuf sur le plan de la conception du bateau ?
On a eu plus de moyens que d’habitude pour étudier le bateau, faire de essais en bassin de carène, des simulations informatiques sur des carènes. On regarde aussi ce qu’ont fait les autres (architectes, ndlr) ces dernières années. Ca fait réfléchir.
Les outils d’analyse ont progressé ?
Ah oui, c’est sans commune mesure. En bassin on a découvert des choses, certaines que je connaissais déjà, mais mieux quantifiées. Aux essais en bassins sont associés des codes. Ca donne des éléments !
La jauge IMOCA a changé ?
Sur le plan de la sécurité un peu. Ca a mis des limites à la quantité d’eau embarquée dans les ballasts. Mais à mon avis c’est encore insuffisant.
Au détriment de la puissance des voiliers ?
Non. La tendance semble aller à des bateaux plus raides encore que les précédents.
Le Generali sera globalement un super PRB.
Non. Pas du tout. Pascal Conq a fait des améliorations profitables au voilier pour le dernier Vendée Globe mais il y avait des choses, à commencer par la coque, qu’on ne pouvait pas changer.
On va poser la question différemment. C’est comment un bateau gagnant au Vendée Globe ?
Un bateau qui arrive au bout.
D’accord mais en combien de temps. 80 jours ?
Ah oui c’est faisable sans problème !
Avec une prédilection pour certaines allures ?
Generali ira plus vite que nos précédents IMOCA à toutes les allures.
Combien de 60 pieds avez vous dessiné avant Generali ?
Je ne sais plus exactement. Le 15ème je crois. Peut-être plus…
Le premier s’appelait justement Generali, construit pour Alain Gautier engagé dans le premier Vendée Globe.
Absolument. Il était en aluminium et pesait 13.5 T
Aujourd’hui, c’est deux fois plus léger et ça va deux fois plus vite !
Ah non, vous exagérez. Aujourd’hui, on rêve aux 8 tonnes et le bateau va 20 à 30% plus vite. Ca dépend évidemment des allures ! Je me souviens à l’époque on arrivait à atteindre la vitesse du vent vers 13 nds. Maintenant par 16 nds de vent, on atteint 16 nds et + au speedo. Avec un bateau plus grand on arriverait à 20 nds de vitesse avec un vent de 20 nds.
Les paramètres de performance n’ont pas changé !
Non. Ce sont le rapport poids/puissance, un minimum de traînée et toujours plus d’ergonomie et de facilité d’usage.
La technique a évolué ?
Pas vraiment. Le bateau sera construit avec les mêmes matériaux (sandwich carbone) que ceux utilisés pour PRB. Il y a des variantes au niveau des structures, des modifications de ci de là mais rien de révolutionnaire.
Un mot sur le chantier ?
Multiplast a beaucoup de savoir faire. En plus il a une grosse qualité… Il est à 100 m de nos bureaux (installés depuis l’an passé à Vannes, ndlr). C’est la première fois que je vais construire un voilier aussi près de mon lieu de travail.
Le prochain Vendée Globe s’annonce d’un niveau encore jamais atteint avec une pléiade de candidats à la victoire. Ca vous inquiète ?
Je m’en f… Nous on essaye de faire le meilleur bateau, compte tenu du règlement et des souhaits du coureur. Le reste m’est indifférent. Ce qui m’inquiète plutôt, c’est la volonté délibérée, et aussi bien compréhensible, des coureurs d’allers toujours plus loin, plus vite… Il faut rester modeste devant le Vendée Globe.
Vous aurez d’autres nouveaux 60 pieds au Vendée Globe ?
C’est vraisemblable.
Une dernière question. Comment se répartissent les tâches au sein du cabinet entre Finot et Conq ?
Jean-Marie…, il ne fait pas grand-chose… C’est Pascal qui fait tout. Disons que Pascal est méticuleux et qu’il aime bien aller au bout de ce qu’il a commencé. Et moi j’essaye de voir l’ensemble des problèmes, de classer les choses dans l’ordre, bref d’avoir une vision globale… J’amène mon petit grain de sel dans l’histoire… Je fais un peu plus de recherche, j’observe. En un mot, heureusement que Pascal est là car il n’y aurait pas grand-chose qui se ferait…
Propos recueillis par Patrice Carpentier