
François Gabart et Tom Laperche dans le Podcast Les Voix du Large. Ils prendront le départ de la Transat Jacques à bord du tout nouveau Trimaran SVR-Lazartigue, pour la première fois aligné en compétition.
Le Trimaran SVR-Lazartigue, mis à l’eau seulement le 22 juillet après plusieurs mois de conception et d’assemblage dans les ateliers de MerConcept à Concarneau, prendra son premier départ. À bord, François Gabart et Tom Laperche vivront leur première expérience commune. Avec beaucoup d’enthousiasme, d’excitation, de soulagement et surtout d’impatience.
Ils se sont confiés à Olivia Maincent. Durée 32 mn.
« Nous sommes plutôt excités et impatients, confie François Gabart. Même si on ne serait pas contre l’idée de prendre quelques heures de plus, nous sommes contents de la situation dans laquelle nous sommes à cet instant. Le bateau est prêt. » « On l’attend depuis longtemps, on est là pour ça et on a hâte », insiste Tom Laperche.
De l’excitation mais aussi du soulagement et la satisfaction d’avoir déjà remporté une victoire en étant dimanche au départ. « Ces derniers mois ont été très intenses, beaucoup de choses se sont mises en place, développe le skipper. Si l’on revient six mois en arrière, je n’avais aucune certitude sur le fait d’avoir ce joli bateau au départ. Il y avait beaucoup d’incertitudes. Heureusement, tout s’est super bien enchainé. Il fallait que tout s’imbrique parfaitement. Mais finalement, cela correspond un peu à ma zone de confort puisque depuis que je fais de la course au large, j’ai toujours été un peu à courir après le temps en lançant des projets très ambitieux et très rapidement pour faire quelque chose de beau. »

La Transat Jacques-Vabre pour continuer d’apprendre
Avec cinq bateaux de la class Ultime au départ, la Transat Jacques-Vabre promet du très grand sport. « C’est super sympa d’avoir ce plateau au départ avec cinq équipes extrêmement pointues, commente François Gabart. On a ce qui se fait de mieux en course au large. Quand on est compétiteur, c’est ce qu’on aime. Pour nous, avec notre bateau récent, il n’y a rien de mieux que d’être confrontés aux meilleurs. On va tout de suite savoir où on en est, où on doit progresser. » Les navigations effectuées ces dernières semaines ont donné quelques pistes de réponse. « C’est un bateau remarquable avec un potentiel surprenant à chaque navigation, s’enthousiasme François Gabart. Il y a encore beaucoup beaucoup de travail pour exploiter tout ce potentiel. On n’a pas encore toutes les billes pour aller vite tout le temps. Saura-t-on exploiter tout ce potentiel pendant la course ? Probablement pas. On va apprendre, on va découvrir. Est-ce qu’on va en exploiter suffisamment pour pouvoir jouer la victoire ? C’est la grande question qu’on va essayer d’explorer. Est-ce que le bateau est suffisamment solide et fiabilisé ? On a beaucoup travaillé mais on n’a pas tout fiabilisé dans la durée. Aucun système n’a fait 7500 milles. Il y a encore plein d’incertitudes. On va déjà se concentrer sur terminer et on verra ensuite le chemin pour essayer de faire une bonne performance. » Une certitude néanmoins le plaisir à affoler les radars avec des pointes proches des 50 nœuds.
« C’est génial. Allez à ces vitesses sur ces bateaux-là, c’est juste dingue. Je suis émerveillé, je ne serai jamais blasé de ça. »
Un duo déjà complémentaire
François Gabart a surpris au moment d’annoncer le choix de son co-skipper. À seulement 24 ans, Tom Laperche sera en effet l’heureux élu. « Ça peut paraitre surprenant, mais c’est un choix naturel, insiste François Gabart. Tom a cette capacité à avoir une constance dans la performance assez remarquable et très rare. Sur ces bateaux, il faut être bon tout le temps, ne pas avoir de trou, de ne pas faire d’erreur. Malgré son jeune âge, Tom a ces caractéristiques. D’un point de vue humain, je trouve très intéressant de faire progresser Tom car il apporte quelque chose de nouveaux et de différents par rapport aux marins avec qui j’ai déjà navigué. Le milieu de la course au large m’a beaucoup apporté grâce à la générosité de tous les marins alors si je peux moi aussi transmettre… » Le jeune co-skipper se retrouve donc plongé dans une autre dimension. « C’est l’exception de pouvoir naviguer sur de tels bateaux qui vont quasi deux fois plus vite que les autres, estime-t-il. Quand je regarde les images de nos navigations, je suis toujours émerveillé. C’est ce qui m’a fait rêver jeune. Mais j’ai aussi beaucoup d’interrogations sur ces grands bateaux au large. Il y a beaucoup d’excitation mais beaucoup de questions aussi auxquelles je n’ai pas encore les réponses. Cette découverte, c’est aussi ce qui est génial. »
Avec une quinzaine de navigations et environ 5000 milles au compteur depuis la mise à l’eau du Trimaran SVR-Lazartigue le 22 juillet, les deux hommes ont déjà trouvé leurs repères. « Nous avons beaucoup d’interrogations sur des domaines mécaniques, météo etc. mais je ne suis absolument pas inquiet sur notre capacité à tirer le meilleur de l’autre et à se faire confiance, souligne François Gabart. Je n’ai aucun doute. On s’est un peu réparti les tâches mais on doit savoir tous les deux, tout faire sur le bateau. »
Le départ, un juste équilibre entre attaque et prudence
Dimanche, au moment du départ, Tom Laperche sera à la barre du Trimaran SVR-Lazartigue tandis que François Gabart sera davantage concentré sur le positionnement du bateau et la communication avec la cellule de routage à terre. « Le départ est un moment particulier, explique Tom. Il y a d’abord l’émotion qui accompagne forcément un départ. Il va falloir bien se positionner. Même si on est tous des compétiteurs et qu’on mettra tout en œuvre pour bien partir, la course ne se joue pas au moment du départ ni à la bouée à Etretat. Il faut gérer le risque. La course ne se gagne pas à ce moment-là, mais il ne faut surtout pas qu’elle s’arrête avant d’arriver en Bretagne. » « Ce n’est pas simple, insiste François Gabart. Il ne faut pas non plus rester derrière car sinon on va se retrouver au milieu de tous les bateaux. Il faut trouver le bon réglage de curseur entre attaquer et ne pas prendre trop de risque. »
Les dernières prévisions météorologiques annoncent des conditions relativement clémentes avec des vents très modérés pendant les premières heures de course. « C’est toujours mieux pour nous d’avoir une première nuit dans des conditions faibles, confirme le skipper. Il y aura peut-être pas mal de manœuvres, mais ce sera plus confortable. Ensuite il faudra être bon du départ à l’arrivée. »
Le défi : 7500 milles entre Le Havre et Fort-de-France
Avec un parcours de 7500 milles soit environ 13900 km, les bateaux de la classe Ultime, les plus rapides de la flotte, effectuent le plus long trajet. Après être sortis de la Manche, puis avoir traversé le golfe de Gascogne et ses vents parfois forts en novembre, ils tenteront de profiter au mieux des alizés à proximité des Canaries. Un premier passage de l’équateur en tentant de déjouer les pièges du pot-au-noir, pour aller chercher le waypoint autour de l’archipel Trindade et Martim Vaz au large de Rio de Janeiro, et les trimarans pourront enfin remonter l’Atlantique en longeant les côtes brésiliennes pour de nouveau franchir l’équateur avant de filer vers la Martinique. « C’est une course très variée avec plein de conditions différentes ce qui est plutôt bien dans notre approche de beaucoup apprendre et développer le bateau, analyse le skipper. C’est ambitieux et difficile car c’est une course qui est longue mais c’est très excitant. » Temps estimé de parcours entre 14 et 20 jours.