Combien de Class 40 étaient engagés dans la course ?
8 bateaux, tous forcément récents, des Pogo 40 et des Jumbo 40 menés en équipage de 4 personnes et un A40 modifié. Pour la première étape j’avais à mes côtés François Lucas, Pascal Michaillas et Mathis Prochasson. Parmi nos compétiteurs les plus coriaces sur le papier, j’avais noté l’Azawakh 3 de Jean-Pierre Amblard accompagné d’Olivier Rabine et Marc Lepesqueux (tous trois sont engagés dans la Route du Rhum), Destination Calais, et Cinéma Cinéphile qui comptait à bord deux représentants de la voilerie Elvström en plus de l’équipage de base (en tout 6 personnes).
Vous avez mené les 1200 milles de l’étape ?
Oui, sauf au départ de Paimpol où le Jumbo 40 de Jean-Pierre Amblard nous précédait.
Qu’est ce que vous avez eu comme conditions ?
Du près petit temps, medium jusqu’au Fastnet. Ensuite une zone de pétole au SW de l’Irlande avant qu’une belle dépression arrive et stagne sur zone. Elle a fini par s’évacuer au bout de deux jours. On en a profité pour larguer nos concurrents en passant par l’Est. On a eu des vents portants et forts, jusqu’à 40 nds. Ca allait très vite. Le record de vitesse du bateau au GPS en vitesse fond, c’est 23 nds ! En tout il nous a fallu 6 jours et 12 heures pour parcourir l’étape.
Des problèmes avec le bateau ?
Non rien de particulier si ce n’est le ragage de la grand-voile sur les barres de flèche qui sont proéminentes et angulées et aussi la fixation avant du bout-dehors qui sollicite le pont en cet endroit.
Et la régate de ralliement entre Reykjavik et Grundarfjördur (105 milles) ?
C’était magnifique. La ligne d’arrivée est située près d’un village superbe abrité entre de hautes montagnes sauvages. La régate a duré une vingtaine d’heures. On a été constamment bord à bord au louvoyage avec Destination Calais. Mais une erreur de manœuvre peu avant la fin nous a contraint à lui céder la place de leader.
Pour l’étape retour vers Paimpol, nombreux ont été les Class 40 à rentrer en solitaire et ainsi se qualifier pour le Rhum ?
Effectivement il y avait cinq bateaux en solitaire, un en double (celui de Jacques Fournier) et deux en équipage (au moins 4 personnes) le Jumbo 40 belge Merena et le nôtre. J’avais à mes côtés Vincent Aillaud, qui fait une P.O. en 470, Sébastien Toupet, vainqueur du dernier Spi au poste de barreur en First 31.7 et Pascal qui était de la première étape (aussi classé second du Championnat de France universitaire de match racing).
Il semblerait que vous ayez eu beaucoup de vent pendant ce retour en France ?
Oui et non. On est parti le 12 juillet comme prévu. Mais le lendemain matin, alors qu’on possédait environ 5 milles d’avance sur Destination Calais, mené en solitaire, rappelons-le, Merena annonce par VHF avoir reçu des infos météo en provenance du plat pays indiquant des conditions exécrables, avec des vents de force 10 et des creux de 10 m, sur zone pour les 24 heures à venir. Mes infos et celles d’autres skippers étaient loin d’être aussi alarmistes (plutôt du 25/30 nds et une mer de 4 m). Mais en final, on a décidé d’aller s’abriter dans un petit port de la côte sud de l’Islande. On a passé la nuit au port. Seuls quelques IRC sont restés en mer au large et ont d’ailleurs eu… des conditions tout à fait gérables. Nous mêmes sommes repartis dès le lendemain dans l’après-midi, et les autres Class 40 ont attendu plus longtemps avant de tailler la route.
Et alors la météo sur le retour ?
On a eu les conditions anticipées, c’est-à-dire relativement agréables ; du près sur 70% du parcours. On a fait un slalom géant en Atlantique Nord contre des vents oscillant du S au SE. On a évolué en lisière d’une dépression. La mer était croisée, on n’a pas forcé sur le bateau. Ensuite on a été chercher une seconde dépression en approche de la côte SW irlandaise.
Les Solitaires ont trinqué à cet endroit ?
Effectivement, les conditions se sont aggravées par la suite pour eux qui étaient derrière.
Et la fin ?
… Au bon plein depuis le Fastnet. Accompagné d’une forte remontée des températures, ça fait du bien. Il faut savoir que là haut, les températures oscillent entre 10/15° de jour et 5/10° la nuit, certes brève. C’est pas la canicule ! On a été le premier des Class 40 à franchir la ligne d’arrivée. Il nous aura fallu un peu moins de 10 jours de navigation en comptant l’escale imprévue. (Ndlr : Destination Calais, le Jumbo 40 mené par Pierre-Yves Chatelin s’impose en Solitaire)
Quel bilan ?
On a eu beaucoup de plaisir à naviguer sur un bateau très sympa, marin, rapide. La course est super, le parcours est exigeant. C’était un bon test avant la Route du Rhum. Et au niveau météo, routage, acquisition de polaires, nous avons beaucoup appris.
Et votre programme maintenant ?
Un peu de repos car j’ai beaucoup navigué depuis la mise à l’eau du bateau mi-mars. D’ailleurs le loch indique près de 6000 milles au compteur ! Le bateau va faire un petit tour au chantier. Et puis je reprendrais une préparation spécifique pour le Rhum à Lorient avec d’autres Class 40.
Une dernière question. Que signifie Tchuda Popka, le nom du bateau ?
C’est un nom russe que j’ai découvert quand je travaillais en Azerbaïdjan. Je cherchais un nom pour le Pogo 2, mon premier bateau. En décrivant les formes larges et puissantes du bateau à mon entourage, un de mes voisins locaux m’a proposé Tchuda Popka, ce qui signifie « merveilleux petit cul ». Voila vous savez tout !
Propos recueillis par Patrice Carpentier