Magnifique, le bras de fer que se livrent en ce moment même le Français Marc Guillemot et le Polonais Zbigniew Gutkowski, dit “Gutek”. Deux jours et une dizaine d’heures après leur départ de New York, les deux marins solitaires sont à égalité ou presque au moment de quitter les côtes de Terre Neuve. Toujours calés sur l’orthodromie – la route directe – ils sont à portée de VHF et d’AIS. Il n’est même pas impossible qu’ils soient à vue quand le jour se lèvera de ce côté-là de l’Atlantique… sauf si les célèbres brumes épaisses de Terre Neuve ne lèvent pas le rideau. Et quand on sait qu’Energa s’est élancé de New York 12 minutes après Safran vendredi, l’écart virtuel aux vitesses actuelles n’est même que d’environ 5 milles entre les deux marins. Conclusion : Marc Guillemot est devant… mais de très peu !
La barre des 1000 milles est franchie
Tous deux ont franchi ce matin le cap du millier de milles parcourus depuis le top départ de New York. Au tracking de 9h TU ce dimanche, Marc Guillemot avait parcouru exactement 1018 milles et était à 1860 milles de la ligne d’arrivée au cap Lizard. Gutek était donc 9 milles derrière, quasiment sur le même axe, avec 1009 milles parcourus et 1869 restant à couvrir. Leurs vitesses étaient similaires, oscillant entre 17 et 18 noeuds. Toujours rapides et surtout toujours en avance sur le chrono d’Alex Thomson : 134 milles pour Marc Guillemot… et 125 milles pour Zbigniew Gutkowski.
400 milles au nord de la route d’Alex Thomson
En outre, l’écart latéral est énorme entre le “duo” Safran/Energa et la trajectoire victorieuse à battre d’Alex Thomson (8 jours et 21h). Au même moment de son record, le Britannique évoluait 400 milles plus au sud que la position actuelle de Marc Guillemot et Zbigniew Gutkowski… soit près de 740 kilomètres terriens!
La grosse incertitude, valable pour tous les deux évidemment, est celle de l’évolution météo du milieu de semaine et surtout celle de l’atterrissage sur l’Angleterre, où l’on perd souvent beaucoup de temps à tirer des bords dans du vent devenu faible. Mais pour le moment, tout va bien pour les deux hommes engagés à la poursuite de ce mythique record de l’Atlantique Nord dans un duel remarquable. A midi ce dimanche, tous deux filaient encore à 18 noeuds, cap à l’Est vers le grand large. Finie la terre, la traversée de l’Atlantique proprement dite commence avec pour chacun un aiguillon réciproque très intéressant. Car en général, on va plus vite à deux que tout seul. Ce ne sont pas François Gabart et Armel Le Cléac’h qui diront le contraire : au Vendée Globe, ils en avaient fait l’éclatante démonstration. Dans un autre genre d’exercice contre la montre, Zbigniew Gutkowski et Marc Guillemot sont en train de le prouver une nouvelle fois.
Bruno Ménard