Les marins de la classe Multi 50 font route vers différents ports de la côte. Pour Erwan le Roux et Didier Le Vourc’h, la structure de leur FenêtréA Cardinal n’est pas en danger immédiat. Autant il aurait été déraisonnable de continuer d’aller affronter du mauvais temps, autant le retour au portant vers la Trinité sur Mer ne devrait pas poser de problème. Pour Franck-Yves Escoffier et Antoine Koch, l’urgence est de pouvoir joindre un port au plus vite, sans doute La Corogne, pour établir un diagnostic médical de la blessure de Franck-Yves. Enfin, l’équipage qui a la situation la plus délicate à gérer est sans conteste celui de Prince de Bretagne. Lionel Lemonchois et Matthieu Souben ne peuvent naviguer que bâbord amure, le flotteur soulagé par des drisses. Actuellement, l’équipage a la situation bien en main et se dirige à près de dix nœuds vers un port de la côte espagnole ou portugaise, à déterminer en fonction des vents à venir.
Pour les deux équipages encore en course en Multi50, Actual et Maître Jacques, le dilemme est bien de savoir où placer son niveau de performance entre volonté de terminer et nécessité de rester dans un rythme de course. A trop vouloir temporiser, les deux tandems risquent de tomber dans une sorte de routine où la hantise de la casse pourrait le disputer à une perte progressive de vigilance : le type même de situation piège où l’on peut être amené à faire des fautes grossières parce qu’on est sorti de cet état d’attention constante que demande la course au large.
En sortant les premiers des griffes de la dorsale, les leaders dans la classe IMOCA ont accéléré franchement quand le gros de la flotte continue de peiner. Fatalement, les écarts se creusent puisque en l’espace de six heures, MACIF et Cheminées Poujoulat, en tête, ont gagné près de vingt milles sur Groupe Bel en cinquième position. Pour les hommes de l’ouest, la punition risque d’être encore plus sévère : la dorsale semble avoir pris ses aises sur leur zone de navigation. Pour reprendre les milles concédés, PRB, Safran ou bien encore Virbac-Paprec 3 vont devoir négocier parfaitement la dépression à venir.
Stéphane Le Diraison et Thomas Ruyant (Bureau Veritas – Dunkerque Plaisance) ont décidé de jeter l’éponge. Après le bris de leur bout-dehors, les deux navigateurs ont tenté sans succès une réparation de fortune. Ils ne sont donc plus que trois dans le groupe de tête. Aquarelle.com contient toujours les attaques des jeunots de Concise 2 qui ne font preuve d’aucun complexe. Derrière eux Initiatives – Alex Olivier reste en embuscade. La grande question est plutôt de savoir ce que va donner l’option prise par ERDF des Pieds et des Mains et Partouche qui ont choisi de plonger au sud pour éviter le plus gros du mauvais temps à venir.
Les marins auront eu tout intérêt à profiter des bonnes conditions de ce samedi pour se refaire une santé, mais aussi pour procéder à un inventaire complet du matériel. Car dès cette nuit, ce sera une autre paire de manches. Le vent devrait monter à nouveau en puissance et la mer se former à l’approche d’une première dépression. Mais c’est surtout, la nuit de dimanche à lundi et la journée de lundi qui devraient être particulièrement pénible. L’approche d’un front froid particulièrement virulent devrait, une fois de plus, secouer méchamment la flotte. Ce coup de tabac pourrait être le dernier qu’auraient à subir les tandems de cette dixième Transat Jacques Vabre.
Ils ont dit :
Lionel Lemonchois (Prince de Bretagne) : « Le bras est complètement désolidarisé du flotteur. Le flotteur tient avec la drisse de gennaker et des bouts qu’on a mis un peu dans tous les sens. On a renvoyé un peu de toile pour que le bateau soit appuyé. La dorsale nous rattrape tout doucement on a 10/12 noeuds de vent, encore de la mer, et serait bien que ça se calme, ça soulagerait bien le bateau. Nous, on doit faire un bon 10 nœuds de moyenne. On ne sait pas encore où on va. Soit à la Corogne, soit pousser jusqu’à Lorient on décidera ça au fur et à mesure. On ne peut naviguer que bâbord amure, quand le bateau est bien appuyé, le flotteur ne touche pas l’eau et c’est là que ça souffre le moins.».
Tommaso Stella (Hip Eco Blue) : « On a explosé un tuyau de gasoil avec plein de gasoil dans le bateau. Ce n’était pas très agréable. On a ensuite essayé d’attaquer pour essayer de récupérer le temps perdu et on a explosé le spi. On est parti en vrac dans un grain un peu trop violent et il a explosé en trois parties ; il n’est absolument pas réparable. »
Eric Galmard, Avis Immobilier : « On a eu une nuit un peu difficile comme tous nos copains : plein de grains de 15 à 30 nœuds, le vent qui tournait énormément, il fallait constamment rattraper le bateau avec le pilote. Ce matin, c’est un peu mieux, on n’a plus que 11 nœuds de vent, mais à partir de demain, c’est à nouveau la guerre. On n’a pas pris d’option nord ou sud, on est au milieu ! On est des vieux, on n’a pas pris de risques ! On fait une navigation style vieille école, on est des anciens des Glénans ! »
Dominique Wavre (Mirabaud) : « On est tous les deux en forme, on essaye de récupérer un peu car le début était assez fatiguant. Il y avait énormément de mer, très creusée, et on était très secoué. Par contre, on n’a pas encore vraiment eu le temps de tester notre barre à roue, car le pilote barre mieux que nous. La nuit dernière on s’est fait bloquer dans plusieurs grains mais la route est encore longue et on aura l’occasion de se refaire ».
Les positions le 5 novembre 2011 à 17h00 :
Imoca
1- Cheminées Poujoulat (Stamm/Cuzon) à 3786 milles de l’arrivée
2- MACIF (Gabart/Col) à 1,9 milles du leader
3- Banque Populaire (Le Cleach/Pratt) à 37,5 milles
Multi50
1- Actual (Le Blévec/Manuard) à 4287,3 milles de l’arrivée
2- Maitre Jacques (Fecquet/Escoffier) à 63,5 milles du leader
Class40
1- Aquarelle.com (Bestaven/Drouglazet) à 4050,8 milles de l’arrivée
2- Concise 2 (Collier Wakefield/Goodchild) à 1,9 milles du leader
3- Initiatives – Alex Olivier (De Lamotte/Peron) à 14,2 milles