Tactique oblige pour les concurrents de la Transat

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Vacations très Quai d’Orsay ce midi et réponses toutes diplomatiques des marins. Du moins pour ceux qui ont répondu. Où passerais-je demain ? Ben, faut voir ? C’est trop tôt ? On ne sait rien. Tout est flou. Mais enfin par l’Est ? Pet’ bien. Si c’est visiblement le cas, où exactement ? En coupant l’archipel canarien ou alors le long des côtes africaines où le vent est portant, mais super faiblard. Hé-hé, pas simple. On sait que ça va être long puisque Jean Le Cam (VM Matériaux), avare de confidences depuis le début, a lâché l’info du jour : « On va commencer à se rationner, je pense ». Attention c’est pas non plus un tableau de Géricault que nous peignait Monsieur Jean. Mais disons que ça va être un peu plus long que prévu.
Yann Eliès et Seb’ Audigane sur "Generali" furent les seuls à dire qu’ils allaient « mettre de l’Est » dans leur route. Qui fera le coup des côtes africaines ? "Gitana Eighty", par exemple ? Bah! On verra demain matin.
 
Côté Orma, "Groupama" a repris le leadership devant "Brossard". "Groupama"  (tout comme Banque Pop’) va vraisemblablement couper l’archipel tandis que Brossard poursuit son option extrême Ouest. "Gitana 11" pourrait s’arrêter à Madère.   
 
Côté Multi 50 pieds, le cata "Avocet 50" abandonnait, suite à une avarie de safran et faisait route sur la Corogne. "Crêpes Whaou ! " était cet après-midi à la hauteur de Lisbonne alors qu’une bonne partie de la flotte était hier dans le Golfe de Gascogne. Les deux gars de Laiteries de Saint Malo s’accrochent pour le moment avec un bateau de 21 ans.
En classe 40, le passage le long du Cap Finisterre a été préjudiciable à "Clarke", "Fujfilm", enfin pour ne citer qu’eux. Ils ont perdu 24 places en 24 heures avec cette option Est, une vraie dégringolade. Les gagnants du jour sont : "Atao", "Chocolats Monbana", "Groupe Partouche". Donc Angleterre 0- France 1.
 
On notera pour le chiffre : 500 milles entre le premier bateau (Groupama) et le dernier (DZ energy.com)

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IMOCA : Récupération et gamberge

Après le coup de chaud au passage du Cap Finisterre, où les équipages ont fait le dos rond dans des rafales à 40 nœuds, cap au sud, soleil et glisse au programme. Tout ce que les marins aiment, mais l’absence d’alizés portugais, pourrait bien contrarier leur paisible descente.  
 
« Tu vois les cormorans en Bretagne, qui, après un grain, bien installés sur des balises font sécher leurs ailes en les déployant ? Et bien, c’est exactement comme ça à bord de "Generali" » explique Yann Eliès à la vacation du milieu de journée. Depuis cette nuit, la mer s’est enfin calmée après la ‘cartouche’ annoncée au passage du Cap Finisterre et les équipages en profitent pour recharger les accus, ranger le bateau et faire sécher leurs plumes de cormorans. « On n’a pas fait les malins », confirme Jean Le Cam (VM Matériaux).

L’heure est aussi à la stratégie, à la gamberge. « Revenir sur Safran ? Je ne me fais pas trop d’illusion, mais j’aimerais bien participer à la fête qu’organise la bande Ecover, Bel et autres Poujoulat » avoue Eliès (Generali). « La météo est tordue depuis le début, explique Jean Le Cam, si ça part par devant, on va avoir du mal à revenir. Je pense qu’il va falloir commencer à se rationner parce qu’on ne va pas arriver vite de l’autre côté. On réfléchit à la suite pour descendre jusqu’au Cap Vert. Il n’y a pas de route directe, les alizés ne sont pas établis, il y a donc du jeu. Il faut peser le pour et le contre, le court terme et le long terme et nous glisser dans un trou de souris ».  Chez "Generali", le choix est fait : « Ce sera un peu d’est et on verra bien. Depuis le début, c’est tellement aléatoire, à part la baston du Cap Finisterre ».
 
Avec le vent d’est nord-est actuel qui va, au fur et à mesure de leurs descentes, tourner au secteur sud-est tout en faiblissant, ils le savent, la partie est loin d’être jouée. Ils se traînent un peu sur un chemin dont ils n’ont parcouru que le premier tiers. Après les empannages, place aux virements de bord et là, comme d’habitude, il faudra choisir son camp. A gauche vers l’Afrique, à droite pour profiter de plus de pression créée par la dépression Açorienne, telle est la question. Certains y ont déjà répondu.
 
ORMA : Route médiane de "Groupama" et "Banque Populaire". "Gitana" en stop pour Madère?
 
"Brossard" plus que jamais à l’Ouest.

Brossard, pointé en tête ce midi, de peu, mais en tête. On peut imaginer le contentement des deux gars sur leur bateau rouge et blanc, eux qui avaient travaillé cette option Ouest, tout comme "Gitana 11". Mais pas moyen de les avoir en vacation ce midi pour avoir l’avis du bord. D’évidence Yvan Bourgnon et Jacques Vincent vont passer à l’ouest de l’Archipel Canarien «  On ne va changer d’option au dernier moment » souriait Romain Attanasio, qui les route. «  On a pris cette option dès dimanche soir et on va s’y tenir ». Brossard devrait rencontrer « du près ». En soirée de demain ? « Et c’est tout le problème. Longtemps ou pas longtemps ? », expliquait l’ex-figariste aujourd’hui routeur. Et de poursuivre : « On sait qu’il y a les alizés à prendre derrière mais faut pas se laisser coincer entre temps dans l’impasse ».  Brossard devrait encore pas mal se comporter au classement pendant deux jours. Mais après ?
Pas de nouvelles non plus des hercules forains de "Groupama" (en tête au classement de 16h) et de "Gitana 11", ce midi. On ne saura pas où et quand "Gitana 11", qui a cassé son foil tribord pourrait s’arrêter.  S’il s’arrête ? Mais on pouvait imaginer que oui.  Il se dit qu’une équipe technique était déjà en toute pour Madère. Ou alors intox complète ?  Dans tous les cas ça serait au 3-4 heures de stop pour changer cette grosse pièce courbe de près de 80 kilos. A Madère, les Canaries ? Reste que naviguer sans cette pièce maîtresse est extrêmement pénalisante pour la vitesse du bateau. Sans parler de la difficulté à maîtriser une machine  à pleine vitesse. En tout cas, pour un bateau qui a cassé dimanche soir, on peut dire que les deux hommes ont remarquablement mené leur affaire. Pascal Bidégorry joint par le PC Presse, a raconté que "Banque Populaire" n’avait pas été épargné : « On a cogné avec le flotteur bâbord. Le foil est touché et il y a un peu d’eau dans le flotteur.  Pour le foil on a tapé dans un requin, ou truc comme ça… »  Personne n’a vraiment osé lui demander de poursuivre vu que le Basque était quand même d’une humeur de dogue. Bah, on peut le comprendre.  Arrêt probable ? Ou alors pas arrêt du tout ? Banque Populaire n’a pas souhaité l’évoquer. Bidégorry est revenu rapidement sur la situation pour dire qu’il ne dirait rien de plus sur les routes futures (passer par les Canaries par sa moitié ?). Comme l’ensemble des skippers l’heure était la vacation diplomatique, genre Quai d’Orsay, si vous voyez le genre : « C’est pas clair et c’est pas fini. On verra mieux les choses après les Canaries ».  En clair, "Groupama" et "Banque Pop’" devraient couper l’archipel par sa moitié. On verra demain matin au pointage de 4 heures.

Sinon il commence à faire beau et les hommes ont sorti le linge.  « Tu parles,  va t’en faire sécher les fringues  sur un multi ! Ca mouille tout le temps ! » Enfin Grégory Gendron, co-skipper de "Sopra" est venu dire qu’ils étaient sous grand voile haute et gennaker. Eux aussi faisaient sécher.  Qu’ils avaient 13 nœuds de vent, qu’ils marchaient à 15 nœuds, que leur « positionnement était un peu Est » Donc vers les Canaries mais que tout était flou : « Dans deux jours on verra beaucoup mieux » qui à fait quoi. Grégory s’est aussi posé pas mal de questions «  On ne comprend pas comment on s’est fait distancé. On se dit que la route est longue et que rien n’est fait. »

50 pieds Multi : d’un continent à l’autre.

"Crêpes Whaou ! " a quasiment atteint la hauteur de Gibraltar, alors que "DZ energy.com",  "Victorinox" et "Négocéane" négocient encore le passage du Cap Finisterre où continue de souffler un vent très fort. "Crêpes Whaou !" a dorénavant neuf 60 pieds Imoca dans son sillage tandis que Laiteries de Saint-Malo, qui comme prévu s’accroche, continue de concéder un peu moins d’un mille par heure au trimaran de Franck-Yves Escoffier et Karine Fauconnier.

"NIM", "Avicat 50", "Anne Caseneuve", "Laiteries de Saint-Malo" et bien évidemment "Crêpes Whaou !" ont dépassé un Cap Finisterre «quelque peu humide avec 35 noeuds au portant et une mer formée. Nous sommes sous trinquette deux ris à 12 nœuds et nous avons hâte de pouvoir renvoyer de la toile » dit le message sibyllin de Anne Caseneuve en début de matinée. Victorien Erussard, sur "Laiteries de Saint-Malo" est plus dithyrambique : «Je ne pensais pas qu’il y aurait autant de mer. On a été rapide pour passer le cap Finisterre, mais c’était pour moi interminable. Des surfs de folie. On a fait quelques plantés. Quelques heures avant le Cap, la mer était très formée, désordonnée avec une houle très courte et un vent Est-Nord-Est de 30 à 40 noeuds. En gros, toutes les bonnes conditions pour enfourner et faire chavirer un multi. La nuit a tout de même été bonne car nous avons maintenu notre écart avec "Crêpes Whaou !"et continué de creuser l’écart avec Anne Caseneuve".

Plus haut au nord, trois bateaux luttent encore pour franchir la pointe espagnole. « On est tout mouillé et ça secoue dans tous les sens. En voulant nous écarter des côtes, on a perdu du terrain, mais c’était plus raisonnable. Il vaut mieux semer avant, qu’après, s’amuse Roger Langevin à la vacation du milieu de journée. Dans quelques heures, nous serons sortis de la baston, il y a quatre mètres de creux, une mer hachée et 30 nœuds de vent. C’est bizarre cette zone, où, finalement il y a toujours de la mer et du vent ». "Négocéane" partage ce moment difficile avec "Victorinox", plus à la côte et "DZ energy.com", beaucoup plus au large, tandis que les cinq autres concurrents en 50 pieds multis ont entamé leur descente le long des côtes portugaises.

Classe 40 : Telecom Italia leader de la flotte. FujiFilm et Clarke décrochent.

Les concurrents de la Classe 40 ont dépassé le cap Finisterre cette nuit, poussés par un vent de 30 noeuds – atteignant jusqu’à 40 noeuds dans les raffales – et une mer formée. Le duo Giovanni Soldini et Pietro d’Ali sur "Télécom Italia" reste solidement accroché à sa place de leader. Derrière en revanche, quelques changements sont à noter, notamment les retours en force de "Mistral Loisir – Pôle Santé Elior", "Atao Audio System", "Chocolats Monbana" mais aussi "Groupe Partouche" ou, à l’inverse, la descente aux enfers des Britanniques de "Fujifilm" tombés dans les dévents de la péninsule ibérique, désormais 26e alors qu’ils étaient deuxièmes hier ! A présent, le gros du coup de vent est passé. L’ensemble des concurrents fait maintenant route le long des côtes portugaises porté par un flux d’est qui se maintient entre 10 et 20 noeuds. « C’est totalement grisant, très excitant de naviguer avec les conditions actuelles d’autant qu’il fait un temps superbe ! » lâchait Nicolas Marchand sur "EDF Energies Nouvelles" ce midi à la vacation. Cela devrait durer encore jusqu’à demain mais ensuite, comme les 60 pieds, les Classe 40 vont devoir tirer des bords pour rester sur la route directe car le vent va tourner au sud-est. Des options plus radicales vont sûrement alors commencer à se dessiner. En attendant, les 30 équipages vont profiter des prochaines 24 heures pour se reposer, ranger le bateau et réparer les petits pépins subis la nuit dernière (atelier couture sur "Thirard", changement de pièces suite à un problème de lattes de grand voile pour "Pindar 40"…).