A Pâques, la Transat au balcon

francois gabart transat BPE 09
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Pour les concurrents les plus sud de la Transat BPE, Madère est apparue en fin de journée de samedi, silhouette hiératique dont le sommet masqué dans les nuages a salué la flotte. Hier, escale ou point de passage obligatoire des épreuves transatlantiques en Figaro Bénéteau, l’île portugaise n’est plus qu’une balise que les solitaires observent à distance. Mais plus encore, que la présence réconfortante d’une terre, c’est l’amélioration franche des conditions météorologiques qui induit un regain d’optimisme sur l’ensemble de la flotte. Aux voix forcément lasses ou légèrement tendues des derniers jours, ont succédé des propos beaucoup plus enjoués où s’il est encore question de stratégie à long terme chacun goûte avant tout au plaisir de retrouver des conditions de navigation plus conformes à ce qu’il était venu chercher. A être compétiteur, on n’en est pas moins homme ou femme : pouvoir retirer sa combinaison sèche pour des habits plus normaux, procéder à un brin de toilette, font partie de ces petits plaisirs ordinaires qui prennent une autre saveur quand on est en mer. Même le nettoyage des fonds à coup d’éponge et de seau a des allures de sinécure.

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Question de tempéraments
Pour autant, les considérations tactiques ne sont pas totalement évacuées : Gérald Véniard (Macif), leader provisoire de l’épreuve ne cachait pas, qu’au delà de la satisfaction légitime de se trouver provisoirement en haut de l’affiche, le classement n’avait encore guère de sens. D’autant que les prévisions météorologiques à venir annoncent une rupture de l’alizé à la longitude de l’anticyclone des Açores. En clair, la perspective de vents établis de nord-est à est jusqu’à Marie-Galante s’éloigne au profit d’une situation plus complexe que prévue. Devant ce nouvel aléa climatique, certains hument le nez au vent et se disent qu’il est parfois urgent d’attendre. D’autres laissent bouillir la marmite des supputations sous le couvercle d’un crâne heureusement protégé d’un chapeau à large bord quand d’autres encore réagissent au quart de tour… Question de tempérament : quand un Thierry Chabagny (Suzuki Automobiles) choisit de prendre son mal en patience, un François Gabart (Espoir Région Bretagne) n’hésite pas à rompre l’entente cordiale qui le liait à ses deux aînés Erwan Tabarly (Athema) et Gildas Morvan (Cercle Vert) sur la route du sud, en choisissant de plonger encore en direction des Canaries. La fortune sourit aux audacieux et l’apanage de la jeunesse n’est-il pas de prendre des initiatives, quitte à se brûler les ailes. Adrien Hardy (Agir Recouvrement) et François Gabart occupent respectivement les deux positions les plus extrêmes de la flotte. Tels Remus et Romulus, les deux benjamins de la Transat BPE ont choisi des voies contraires… De l’Aventin au Palatin, les distances étaient courtes et les luttes de pouvoir tenaces. Sur l’océan Atlantique, près de 200 milles séparent les deux adversaires : dieu merci, la course au large n’est, au bout du compte, qu’un jeu.