Vers un final à couteaux tirés

gildas morvan 2009
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D’un côté de l’Atlantique ou de l’autre, la nuit enveloppe les esprits alors qu’au milieu, se joue un drame shakespearien. Au Nord, Gildas Morvan, seigneur de la Transat BPE 2009 depuis plusieurs jours et jusqu’à il y a encore quelques heures, confortablement installé dans un fauteuil le menant vers la victoire. Ce matin la voix du skipper de Cercle Vert se fait entendre, plus tendue, teintée d’une angoisse, celle de n’être plus maître de son destin. Dans l’état actuel des choses, seule la météo décidera maintenant de l’issue à donner au combat. L’homme des Abers a vu son avance fondre comme neige au soleil depuis 24 heures. Il sait qu’il a face à lui un adversaire largement à sa mesure et qui ne commettra aucune erreur. Ce conquérant qui a eu plusieurs centaines de milles pour fourbir ses armes et se préparer à l’ultime bataille, c’est Erwan Tabarly. Discret et posé à terre, à la barre d’Athema ce dernier se révèle entre enthousiasme et combativité. Il sait qu’il a toutes ses chances et si le bras de fer tourne à son avantage, il pourra, en bon père de famille nombreuse qu’il est, louer les vertus de l’investissement à long terme. C’est en effet depuis Madère, qu’Erwan Tabarly prépare l’estocade, à la faveur d’un décalage au Sud qui pariait sur un meilleur angle et un vent qui lui serait plus favorable pour aborder le finish. Depuis quelques jours, il tire ainsi pleinement profit de cette option et ne cesse d’avaler les milles et d’aplanir l’écart avec qui le sépare de Gildas Morvan, tel un rouleau compresseur. Puisant son inspiration dans la même veine, le jeune François Gabart avait emboîté le pas à son aîné en choisissant la route du Sud. Bien lui en a pris ! Voici le skipper de Espoir Région Bretagne, qui détrône le tenant du titre Nicolas Troussel et s’empare avec assurance de la troisième marche du podium. Sur sa lancée, il pourrait bien ne pas s’arrêter en si bon chemin et Erwan Tabarly ne cachait pas ce matin qu’il voyait en son poursuivant une réelle menace. Toujours plus rapide que le skipper d’Athema d’un pointage à l’autre, ce dernier sait bien que rien n’arrêtera François.

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Mais réduire ces derniers 400 milles de la Transat BPE 2009 à une lutte entre ces trois marins serait ne pas reconnaître que même si, doucement et régulièrement, un fossé se creuse entre le trio Morvan-Tabarly-Gabart et le reste de la flotte, derrière les ambitions de certains demeurent… légitimement. Ainsi, Nicolas Troussel et Gérald Veniard (Macif) n’ont-ils certainement pas dit leur dernier mot… si tant est que la météo leur en laisse l’occasion ! Définitivement, il ne faut manquer aucun épisode de la saga qui se joue sous nos yeux pour en saisir toute l’intensité. Dénouement attendu dans 48 heures ; tiendrez vous jusque là ?

Ils ont dit :

Gildas Morvan (Cercle Vert) – 1er au classement de 5h30
« Ca va ! Comme un Gildas qui vient de se faire prendre 10 milles, mais je m’y attendais un peu. J’essaie de lofer pour contrecarrer, mais il (Erwan Tabarly) avance toujours plus vite. Cependant, il devrait toucher un peu moins de vent bientôt, il y a donc encore des coups à jouer, surtout sur les empannages. Le dernier devra être bien calculé : direct pour Marie Galante.
Le décalage et les choix qui ont été fait à Madère paient maintenant. Je n’aurai peut-être pas du les laisser partir. Mais c’est l’avantage de la monotypie, sur cette Transat, il n’y a jamais eu plus de 50 milles entre chaque bateau, c’est ça qui est passionnant. »

Erwan Tabarly (Athema) – 2ème au classement de 5h30
« Au niveau conditions en ce moment, j’ai 20 nœuds de vent en moyenne au vent arrière. La mer est un peu plus calme depuis hier, cela permet de se reposer un peu, mais le vent est instable. Ca passe de 20 à 27 nœuds toutes les dix minutes. Mais ça va bien, j’ai repris 7 milles sur Gildas, il n’y a plus que 14 milles qui me séparent de lui. Ces derniers jours, ce n’est plus le même rythme que les semaines passées. Je dors moins. Il ne reste plus que deux jours, alors j’y vais, je suis à fond dans la course. Ca va être serré.
Quant à François Gabart qui revient bien derrière moi, il va plus vite que moi depuis 24 heures, alors, oui, je le considère comme une menace ! Il m’a repris presque 10 milles et j’avoue que j’aimerais qu’il s’arrête là.
Désormais, c’est une question de bascule, si le vent se tient comme ça jusqu’à l’arrivée je peux passer devant. Mais on verra, pour l’instant rien n’est fait. Dans tous les cas, ce sera un beau « finish ». Il y a un trio présumé pour le podium, on verra bien qui montera sur la première marche. »