Nourri d’autant d’embruns que de génie mécanique, François aime à le répéter, « le métier de marin est un métier d’ingénieur. Marin sur l’eau, c’est gérer un bateau, analyser la météo, optimiser une trajectoire. A terre, c’est gérer un projet, une équipe, un calendrier et échanger avec des architectes. C’est très technique. Le métier de marin va bien au-delà de la navigation. » Pour le développement du 60 pieds MACIF, François n’est pas parti d’une feuille blanche mais du sistership du bateau qui appartenait alors à Michel Desjoyeaux et conçu par son équipe. « J’étais tout jeune, je ne connaissais rien en matière de construction. Mais il y avait un tel savoir-faire et de telles compétences autour du chantier, ça rassurait.»
« La combinaison bateau-bonhomme, elle se crée et se renforce dans le temps, comme dans un jeune couple ! » La confiance de François en sa monture s’est construite sur sa première course en solitaire, la transat B to B, à l’automne 2011. Elle suivait de trois semaines la transat Jacques Vabre, première course compliquée du bateau, MACIF révélant des soucis structurels.
Sables d’Olonne, novembre 2012. Au départ d’un premier rêve d’enfant. « Quelques jours après le départ, je connais un problème moteur grave qui peut être cause d’abandon. Mais tu prends les outils et tu relances la machine… C’est au fur à mesure que tu résous les problèmes que tu sais que tu peux aller au bout, 78 jours durant ! »
MACIF a changé quelques atours pour la Route du Rhum. Mât repensé, nouvelle quille et safrans neufs, allégés. Depuis son triomphe sur le Vendée Globe, où la fiabilité primait sur toute autre considération, François et son équipe technique ont résolument mis le curseur sur la performance dans l’optique de la mythique transatlantique. « Le mât, plus léger, a été optimisé à partir des enseignements tirés de notre démâtage sur la transat Jacques Vabre 2013. Nous progressons par tâtonnements et nous avons réalisé des avancées qui nous permettent d’être meilleurs au départ de la Route du Rhum que nous l’étions au départ du Vendée Globe »
Qu’est-ce qui satisfait le professionnel quand il triomphe d’une course ? Entre la recherche des avancées technologiques et la volonté de repousser ses limites sportives, François ne tranche pas. Ce qui le motive, « c’est, fondamentalement, l’ensemble. J’aurais beaucoup de frustration si j’avais l’un sans l’autre. Et gagner pour moi, ce n’est pas forcément être excellent dans un domaine, c’est ne pas être mauvais dans l’un des domaines. Cela ne sert à rien de construire un bateau génial si, derrière, tu ne sais pas l’utiliser ; cela ne sert à rien non plus d’être un maestro de la navigation si tu navigues sur une poubelle ! Pour gagner, il faut que tous les domaines s’équilibrent. »