Le film de la course

Les vainqueurs TJV 2013
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Les coups de vent succèdent aux tempêtes en ce milieu d’automne : la Manche et surtout le golfe de Gascogne sont balayés par un train de dépressions qui lèvent une mer très chaotique et génèrent des vents principalement orientés au Sud-Ouest et à l’Ouest. Le 3 novembre, une nouvelle perturbation est attendue au large du Havre et les conditions se dégradent encore les jours suivants en mer d’Iroise : la Direction de Course en accord avec l’ensemble des partenaires et des classes décide le report du départ. Le coup de canon libérateur sera donc finalement donné le jeudi 7 novembre à 13h00 et l’ensemble des participants s’élance dans une brise modérée de secteur Ouest avec une mer encore agitée. Et comme une dépression doit passer au milieu du golfe de Gascogne samedi, les 26 Class40’ sont arrêtés à Roscoff pour une escale météorologique.

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La sortie de la Manche reste très maniable pour l’ensemble des concurrents, et en à peine 24h, les deux MOD-70 sont déjà bien engagés dans le golfe de Gascogne : vent de travers avec une brise de 25 nœuds d’Ouest, les deux trimarans monotypes alignent plus de 20 nœuds de moyenne et passent le cap Finisterre dans une brise devenue plus maniable quand les Multi-50 et les monocoques Imoca sont au cœur de la tourmente. L’état de la mer est tel que le trimaran Maître Jacques voit la partie avant de son flotteur tribord au vent arraché : il fait route à petite vitesse vers La Corogne. Certains font le gros dos quand d’autres filent déjà derrière le front à l’image de MACIF (Gabart-Desjoyeaux) qui prend la poudre d’escampette à la pointe espagnole : le monocoque casse quelques centaines de milles plus tard son safran et fait escale à Peniche (Portugal) pour en changer.

Les alizés sont plutôt puissants au large du Portugal et surtout très irréguliers avec pas mal de nuages : le 10 novembre dans la nuit, Arkema-Région Aquitaine se fait surprendre par une rafale et chavire au large de Lisbonne ! Pendant ce temps, les Class40’ sont au milieu du golfe de Gascogne avec une vingtaine de nœuds d’Ouest : GDF SUEZ a déjà fait le break au point qu’il va pouvoir faire une escale express à Muxia pour changer ses aériens électroniques tout en gardant le leadership sur Mare… Le rythme est donc extrêmement soutenu grâce à cet anticyclone des Açores qui s’étend sur tout l’Atlantique jusqu’au Sud du Cap-Vert. D’ailleurs les deux MOD-70 sont déjà par le travers de l’archipel dans un alizé toujours soutenu en approche d’un Pot au Noir assez haut en latitude mais finalement peu étendu et relativement peu actif. 

Premières arrivées brésiliennes

Cela déboule tellement en tête de la flotte que les deux trimarans monotypes franchissent l’équateur en un peu plus d’une semaine, dans les temps des records du Trophée Jules Verne des années 2000 ! Josse-Caudrelier d’une part et Gavignet-Foxall d’autre part mènent à un rythme d’enfer ces machines et la descente le long du Brésil est toujours aussi véloce : il n’y a que le cap Frio avec son front orageux qui pose un problème stratégique aux navigateurs car pour le reste, tout se passe sur le pont où la concentration extrême est de mise pour ne pas chavirer. Onze jours et cinq heures seulement seront nécessaires à Edmond de Rothschild pour s’imposer à Itajai à plus de 22 nœuds de moyenne ! Et avec seulement cinq heures d’avance sur Oman Sail-Musandam qui n’a jamais été très éloigné du leader : cent milles au maximum…

Derrière, le duel fait rage entre les deux premiers Multi-50 qui suivent aussi les mêmes trajectoires, sauf que Actual en tête au large de Madère, a dû faire un pit-stop à Porto Santo pour remplacer son électronique de tête de mât. Il repasse en tête quelques heures au Pot au Noir, mais finalement FenêtréA Cardinal maintient son avance de 50 milles au passage de l’équateur. La bagarre ne cesse qu’en baie de Rio de Janeiro lorsque Erwan Le Roux et Yann Eliès profitent de leur placement plus méridional pour s’imposer avec cinq heures d’avance sur Yves Le Blévec et Kito de Pavant.

Au large de Madère, les monocoques Imoca se sont scindés en deux groupes : les cinq leaders de la dernière génération suivi par Bureau Vallée et VNAM un peu moins à l’aise dans ces allures où la puissance parle, et les trois ‘vintages’ qui ont du mal à suivre le tempo particulièrement relevé. PRB a pris le commandement mais MACIF est déjà dans son tableau arrière tandis que Maître CoQ et Safran se font piéger par un nuage de calmes en plein dans les alizés ! Puis c’est au tour de Cheminées Poujoulat de se faire arrêter alors qu’il était en tête… Mais c’est tout de même la grande cavalcade vers le Pot au Noir quand le duo Riou-Le Cam annonce qu’il va faire escale au Cap-Vert pour lui aussi changer de safran… 50 minutes seulement seront nécessaires mais Gabart-Desjoyeaux en profitent pour prendre la main.

A la sortie d’un Pot au Noir classique, les deux voiliers sont à vue et leurs trois poursuivants déjà décrochés. Les alizés de l’hémisphère Sud sont tout aussi instables et puissants et la descente vers Vitoria n’est plus qu’une course de vitesse où MACIF s’impose… jusqu’à ce qu’il démâte au large de Salvador de Bahia ! Malgré tous les efforts de Guillemot-Bidégorry et Beyou-Pratt, PRB ne peut plus être rattrapé une fois les orages du cap Frio transpercés : Vincent Riou et Jean Le Cam signent leur première victoire sur la Transat Jacques Vabre.

L’arrivée des Class40
En ce 24 novembre, dix-sept jours se sont écoulés et les Class40’ sont déjà au large de Recife ! Il faut dire que les conditions météorologiques ont été particulièrement favorables même s’il faut noter beaucoup de grains sur la route : le Pot au Noir est peu pénalisant, les monocoques naviguent sous spi ou sous gennaker dans une brise qui descend rarement en dessous de 20 nœuds, la route est toute droite, sans manœuvre, mais le ciel est toujours aussi plombé. GDF SUEZ n’aurait plus à s’inquiéter si ce n’est que Sébastien Rogues et Fabien Delahaye annoncent après avoir dépassé Salvador de Bahia, qu’ils ont déchiré leur spi dès le Cap-Vert… Ils ont été ralentis certes, mais pas tant que cela puisque leur sistership Mare est toujours cent milles derrière. Ce sont les Espagnols qui impressionnent le plus avec Tales Santander 2014 qui revient très fort depuis son escale ibère et qui commence à stresser les leaders : Alex Pella et Pablo Santurde ne finissent que 3h30 plus tard…

Et derrière, les Class40’ se tirent la bourre par paquet : Watt & Sea devance de peu Groupe Picoty, SNCF Géodis, ERDF-Des pieds et des mains et Vaquita, le voilier autrichien qui a interpelé par sa vitesse au vent de travers. Puis par vagues, les autres duos se succèdent avec des arrivées parfois extrêmement serrées comme celle de Matouba qui bat de douze minutes Proximedia… Les écarts sont à la hauteur des problèmes techniques qu’ont dû résoudre la plupart des équipages dans ces conditions toujours musclées au moins jusqu’au cap Frio. Car les derniers peinent ensuite dans les petits airs et le dernier, 11th Hour Racing mettra ainsi XX jours pour conclure cette onzième édition de la transat Jacques Vabre.

Le bilan de cette édition
L’Atlantique du Nord au Sud a été avalé quatre à quatre par les quatre classes et les quarante-quatre voiliers partis du Havre : seuls deux Multi-50, un monocoque Imoca et trois Class40’ ont abandonné ! Les quatre vainqueurs ont explosé les compteurs avec des temps de course à faire pâlir les prétendants au Trophée Jules Verne et les duos ont dépensé une énergie folle pour rester à l’endroit pour les multicoques (MOD-70 et Multi-50) ou préserver le matériel pour les monocoques (Imoca et Class40’) : Sébastien Josse et Charles Caudrelier (MOD-70) n’auront mis que 11 jours 05 heures pour boucler les 5 450 milles entre Le Havre et Itajai, Erwan Le Roux et Yann Eliès (Multi-50) trois jours et demi de plus, Vincent Riou et Jean Le Cam (Imoca) 17 jours et Sébastien Rogues et Fabien Delahaye (Class40’) 20 jours et 21 heures !

Classement général des Class40’ de la Transat Jacques Vabre après jury (26 partants)
1-GDF SUEZ (Sébastien Rogues-Fabien Delahaye) : 20j 21h 41’ 25’’
2-Tales Santander 2014 (Alex Pella-Pablo Santurde) : 21j 01h 22’ 15’’
3-Mare (Jörg Riechers-Pierre Brasseur) : 21j 03h 21’ 55’’
4-Watt and Sea-Région Poitou Charentes (Yannick Bestaven-Aurélien Ducroz) : 22j 08h 14’ 46’’
5-Groupe Picoty (Jean-Christophe Caso-Aymeric Chappellier) : 22j 10h 26’ 47’’
6*-SNCF Géodis (Fabrice Amédéo-Armel Tripon) : 22j 11h 54’ 39’’
7-ERDF-Des pieds et des mains (Damien Seguin-Yoann Richomme) : 22j 12h 14’ 14’’
8-Vaquita (Christof Petter-Andreas Hanakamp) : 22j 13h 39’ 33’’
9-Campagne de France (Halvard Mabire-Miranda Merron) : 22j 23h 02’ 22’’
10*-Phoenix Europe (Louis Duc-Stéphanie Alran) : 23j 03h 40’ 07’’
11-BET1128 (Gaetano Mura-Samuel Manuard) : 23j 10h 29’ 48’’
12-Fantastica (Stefano Raspadori-Pietro D’Ali) : 23j 11h 43’ 40’’
13*-Solidaires en peloton (Victorien Erussard-Thibaut Vauchel-Camus) : 23j 15h 02’ 05’’
14-Caterham Challenge (Mike Gascoyne-Brian Thompson) : 23j 16h 36’ 10’’µ
15-Matouba (Bertrand Guillonneau-Sébastien Audigane) : 24j 22h 12’ 15’’
16-Proximedia-Sauvez mon enfant (Denis van Weynbergh-Jean Edouard Criquioche) : 24j 22h 24’ 21’’
17-Mr Bricolage (Damien Rousseau-Matthieu Alluin) : 24j 23h 40’ 40’’
18-Eärwen (Catherine Pourre-Goulven Royer) : 25j 00h 43’ 45’’
19-April/Deltacalor (Lionel Regnier-Tim Darni) : 25j 16h 24’ 15’’
20-Obportus3 (Olivier Roussey-Philippe Burger) : 26j 17h 28’ 15’’
21-Croix du Sud (Michelle Zwagerman-Patrick Conway) : 26j 23h 23’ 28’’
22-EcoElec-Fantronic (Eric Darni-Florent Bernard) : 28j 04h 49’ 20’’
23-11th Hour Racing (Hannah Jenner-Rob Windsor) : XXXX
*Pénalité incluse

Classement général des IMOCA de la Transat Jacques Vabre après jury (10 partants)
1-PRB (Vincent Riou-Jean Le Cam) : 17j 00h 41’ 47’’ à 13,30 nœuds de moyenne
2-Safran (Marc Guillemot-Pascal Bidégorry) : 17j 04h 43’ 23’’ 
3-Maître CoQ (Jérémie Beyou-Christopher Pratt) : 17j 05h 15’ 07’’
4-Cheminées Poujoulat (Bernard Stamm-Philippe Legros) : 17j 12h 19’ 44’’
5-Bureau Vallée (Louis Burton-Guillaume Le Brec) : 20j 02h 18’ 45’’
6**- Votre Nom Autour du Monde (Bertrand de Broc-Arnaud Boissières) : 20j 02h 34’ 05’’
7-Energa (Zbigniew Gutkowski-Maciej Marczewski) : 20j 10h 47’ 17’’
8-Initiatives Cœur (Tanguy de Lamotte-François Damiens) : 21j 03h 55’ 46’’
9-Team Plastique (Alessandro Di Benedetto-Alberto Monaco) : 21j 03h 55’ 55’’
ABN-MACIF (François Gabart-Michel Desjoyeaux)

**Bonification de 2 heures incluse

Classement général des Multi-50 de la Transat Jacques Vabre (6 partants)
1-FenêtréA Cardinal (Erwan Le Roux-Yann Eliès) : 14j 17h 40’ 15
2-Actual (Yves Le Blévec-Kito de Pavant) : 14j 22h 47’ 30
3-Rennes Métropole-Saint Malo Agglomération (Gilles Lamiré-Andrea Mura) : 19j 16h 03’ 46
4-Vers un monde sans Sida (Erik Nigon-Samy Villeneuve) : 20j 01h 11’ 18
ABN-Maître Jacques (Loïc Frequet-Loïc Escoffier) : flotteur arraché
ABN-Arkema Région Aquitaine (Lalou Roucayrol-Mayeul Riffet) : chavirage

Classement général des MOD-70 de la Transat Jacques Vabre (2 partants)
1-Edmond de Rothschild (Sébastien Josse-Charles Caudrelier) : 11j 05h 03’ 54
2-Oman Air-Musandam (Sidney Gavignet-Damian Foxall) : 11j 10h 04’ 0