A un mois du départ de la Transat Anglaise et sept mois du Vendée Globe, Jacques Guilbaud, 66 ans, vient d’être élu Président de l’IMOCA. Son prédécesseur Luc Talbourdet a exprimé le souhait de quitter cette mission qu’il exerçait depuis trois ans et demi, mais reste administrateur de la classe. Loin d’être un inconnu dans le milieu, Jacques Guilbaud a déjà exercé cette même fonction, de Juillet 2003 à mars 2004. Pour cet ancien professeur de mathématiques et physique, ancien industriel et conférencier en économie, évidemment navigateur à ses heures (il est par ailleurs le père de Stéphane, le Team Manager de Groupama), ce sera une mission « dans la continuité de l’énorme travail accompli depuis 4 ans », avec déjà quelques pistes à défricher comme la maîtrise de la course à l’armement et le souci de sécurité des marins. Voici son interview.
Vous venez d’être élu Président de l’IMOCA, comment cela s’est-il passé ?
J’ai d’abord cru à un poisson d’avril, mais non. Luc Talbourdet ne souhaitait plus assumer cette fonction, on m’a rappelé et j’ai été élu d’abord administrateur puis président jeudi dernier 10 avril. Je tiens à saluer le travail de Luc Talbourdet qui a été fantastique en quantité et en qualité, il a fait un boulot énorme et reste d’ailleurs au conseil d’administration. C’est un changement dans la continuité.
Vous arrivez au cœur d’une année passionnante pour les monocoques de 60 pieds…
C’est très enthousiasmant ! The Artemis Transat dans un mois, le Vendée Globe à la fin de l’année. Effectivement, la saison va être riche ! Le programme est exceptionnel et pour moi qui ai une grande admiration pour les marins, c’est très motivant.
Quelles grandes orientations devez-vous mettre en œuvre ?
Je débarque un peu et c’est vraiment tôt pour vous en parler, mais il y a effectivement de grandes orientations, à travailler à terme, sur les budgets par exemple qui ont explosé.
Revenir à des coûts plus raisonnables ?
Par exemple. En 20 ans, un projet est passé en gros de 3 millions de francs à 3 millions d’euros. Il faut arrêter cette course, faire moins pour le matériel et plus pour les hommes. On peut faire des choses audacieuses prudemment !
Les bateaux sont aussi devenus très complexes….
Oui, il faut faire attention. On a maintenant des machines très puissantes, très compliquées et je crois que c’est un désir des skippers aussi de faire attention à la sécurité, sur des bateaux plus simples, plus fiables. Rien ne changera d’ici le Vendée Globe, bien sûr, mais il faut préparer l’avenir et tout est lié : par voie de conséquences des bateaux moins complexes et peut-être un peu moins puissants coûteront aussi moins cher.
Quid du Championnat du Monde IMOCA ?
C’est un des autres axes de travail, une des pistes est de lui trouver un partenaire. Attention je dis bien un partenaire du Championat, pas de la classe, un peu à l’image de ce qu’était le Trophée Fico/Lacoste.
Il y a eu quelques remous cet hiver à propos du programme de l’IMOCA, qu’en est-il ?
J’ouvre à peine les dossiers, je ne peux pas vous en dire beaucoup plus. L’assemblée a adopté un programme ferme pour deux ans avec des options, ce sera compatible avec les souhaits de chacun. (NDR : sur ce sujet, lire article ci-dessus : la Transat Jacques Vabre est réintégrée au calendrier, pas la Velux, un nouveau tour de l’Europe est confirmé ainsi qu’une autre course restant à définir au printemps 2010).
Votre expérience du bateau ?
Oh moi je suis surtout un tire-boutes (rires) ! Mais j’adore ça bien sûr. J’ai un voilier avec lequel j’ai navigué plus de 50 000 milles qui est un bateau extrapôlé – en plus confortable – du premier Generali Concorde, je navigue dessus avec des skippers comme Joé Seeten, Ronan Le Goff, j’ai une grande admiration pour les marins.
Propos recueillis par Bruno Ménard.
Portrait
Jacques Guilbaud, Bio Express
Français né en 1941 à Chartres et résidant aujourd’hui à Bruxelles, Jacques Guilbaud fut il y a une quarantaine d’années professeur de mathématiques à l’école de cavalerie de Saumur. Mais c’est surtout dans l’industrie agro-alimentaire qu’il a réalisé l’essentiel de sa brillante carrière, notamment en tant qu’actionnaire dirigeant du groupe Royal Champignons, devenu le leader mondial de la spécialité. Jacques Guilbaud a exercé aussi de nombreux mandats d’administrateur ou de présidence dans diverses associations et entités, qu’elles soient sportives, privées ou interprofessionnelles. Il est entre autres conseiller honoraire de la Banque de France. Marié et père de trois enfants dont Stéphane, le Team Manager du Groupama de Franck Cammas, il avoue comme passions « la voile, le tennis, la natation, la famille… et la macroéconomie ». C’est d’ailleurs dans cette dernière spécialité – la macroéconomie – qu’il donne de nombreuses conférences, à l’Université Libre de Bruxelles, au Parlement Européen, dans des cercles privés en Belgique et en France etc. Il est en effet l’auteur d’un ouvrage remarqué intitulé « La nécessaire (r )évolution du monde occidental, subie ou choisie» (Ed.Racine), dans lequel, de son propre aveu, il se « lâche » sur les grands thèmes qui secouent le monde. « Je traite des grands chocs énergétique, financier, démographique et agroalimentaire, géopolitique … où l’on s’aperçoit que tout ce qui arrive aujourd’hui était prévisible». Son livre propose en outre « onze scénarios pour écrire l’avenir, du plus sombre au plus optimiste.»
Côté voile, Jacques Guilbaud navigue sur son voilier « une extrapolation en plus confortable du premier Generali Concorde ». Il connaît sa nouvelle fonction car il a déjà été Président de l’IMOCA pendant une courte période, de Juillet 2003 à Février 2004. « Pendant les soubresauts qui agitaient la reprise du Vendée Globe », note-t-il malicieusement.
BM




















