Tout reste à jouer

morvan 09
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Dispersion ! Tel semble être le mot d’ordre qui a parcouru la flotte de la Transat BPE. A l’heure des choix, le bel ordonnancement des derniers jours semble vouloir voler en éclat. Au petit jeu des empannages et des écarts de route, il semble bien qu’il n’existe plus de vérité : preuve, s’il en était besoin, que le jeu reste plus ouvert qu’on n’imagine. Au nord, quand certains choisissent de privilégier la route directe, d’autres cherchent encore à gagner dans le sud. Pour les uns, tels Nicolas Troussel (Financo), Gérald Veniard (Macif) ou Thierry Chabagny (Suzuki Automobiles), le salut passera par la recherche de la trajectoire la plus proche de l’orthodromie, quand d’autres espèrent retrouver un flux d’alizé plus stable au fur et à mesure qu’ils descendront en latitude. Plus au sud, certains sont tentés, comme Gildas Morvan (Cercle Vert), de profiter de leur avantage stratégique provisoire pour venir se recaler en espérant coiffer leurs adversaires. Problème : plus les routes convergent, moins les différences de pression seront sensibles. En conséquence de quoi, les gains risquent d’être minimes. Mais les risques aussi. D’autres, à l’instar d’un François Gabart (Espoir Région Bretagne) ou d’un Erwan Tabarly (Athema) semblent avoir envie de pousser leur avantage, au risque d’un retour de flamme. Plus les écarts latéraux s’accroissent, plus les mises sont importantes au grand jeu de poker menteur qui agite la flotte. D’autres semblent jouer tapis, tel Armel Tripon (Gedimat), constant dans sa volonté de gagner dans sud ou bien encore Adrien Hardy (Agir Recouvrement), fort isolé dans le nord de la flotte. Enfin, légèrement en retrait, certains attendent des jours meilleurs, tels Franck Le Gal (Lenze) qui paie ses petits soucis techniques de course ou bien encore Isabelle Joschke (Synergie), en prise avec des problèmes récurrents d’énergie.

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Utopistes ou rationnels ? Réalistes plutôt…

Certains parient sur l’option à long terme, quand d’autres préfèrent encore capitaliser petit à petit ce que les variations de vent leur offrent. Bref ! L’anticyclone favorisera-t-il les libres penseurs et les audacieux ou bien consacrera-t-il la victoire des petits épargnants ? Question de tempérament, bien sûr, mais aussi de circonstances, les impétueux d’un jour pouvant se transformer demain en gagne-petit. Pour autant personne ne crie victoire. D’une part, parce qu’il reste encore, au bas mot, plus d’une semaine de course et d’autre part, parce que les projections de route pour rallier Marie-Galante ne désignent pas encore une stratégie gagnante. Suivant certains modèles météo, les hommes du nord finiraient par décrocher le Graal d’une route compliquée, à flirter avec les bordures anticycloniques, quand d’autres prédisent que l’allongement de route des sudistes sera largement compensé par un vent suffisamment stable pour espérer une progression linéaire. De toutes ces considérations, les solitaires s’en fichent comme de l’an quarante. Peu leur importe de savoir qu’ils seront les porte-drapeaux d’un parcours original et révolutionnaire ou si c’est une navigation toute en prudence et opportunité qui leur permettra de goûter en premier le traditionnel ti punch qui accueille les concurrents sur la ligne d’arrivée caraïbe. Pour eux seul compte le résultat : au vu de ce qui les attend pour les jours à venir, le pragmatisme est en passe de devenir une vertu cardinale.

Le mot du jour : énergie
Entre pilote automatique, ordinateurs de bord, électronique, la navigation en solitaire est relativement gourmande en énergie. Les navigateurs solitaires ont besoin, pour mener leur bateau au mieux de ses possibilités, de disposer d’un équipement en parfait état ; Pour alimenter les batteries du bord, le plus sûr moyen reste le moteur in-board. Mais cela suppose un alternateur en parfait état de marche et une mécanique parfaitement rodée. Pour compenser, nombre de navigateurs, sur un parcours comme la transat BPE, embarquent des panneaux solaires de complément.

Ils ont dit :

François Gabart – Espoir région Bretagne – 6ème au classement de 15h
« J’ai eu Gildas Morvan de visu, tout à l’heure. Tout va très bien, ça glisse pas mal. Depuis ce matin c’est moins faiblichon, le vent a l’air de s’installer de façon plus homogène sur toute la zone. Armel est plus au sud, c’est plus qu’intéressant… Nous on a la direction et lui, la pression. Chacun fait sa route au mieux, on tire partie de ce qu’on peut. Nico Troussel est bien aussi, il suffit qu’il prenne un peu de pression, étant donné sa direction, ça peut bien payer. Tout peut encore arriver. Nous sommes à la moitié de la course, le bilan pour le moment est positif, je suis content d’être là. J’ai réussi à faire ma route, c’est une bonne chose. Je me sens en phase avec le bateau, je commence à bien sentir les choses, c’est super agréable. Ça me parait plutôt court, les jours passent, ça s’enchaine, j’ai l’impression qu’on est parti hier. Quand je vois les routages qui me font arriver dans huit ou dix jours, ça s’enchaine sans que j’ai le temps de dire ouf. »

Franck Le Gal – Lenze – 7ème au classement de 15h
« Ce ne sont pas des conditions faciles depuis deux jours. Le vent est assez faible, c’est à nouveau l’ambiance Solitaire du Figaro : on est collé à la barre, on dort très peu, c’est fatiguant tout ça. Il faut malgré tout être lucide sur les jours à venir. Les nordistes ne sont pas encore morts et on va toucher du vent à nouveau cette nuit. J’ai fait de petites siestes ce matin… j’en profite dès qu’il y a un peu de vent ; dans ce cas, je mets le pilote et je dors par tranches de 20 minutes. La nourriture aussi, c’est ambiance Solitaire du Figaro : là, par exemple, j’ai le pain et le saucisson à côté de moi, je ne fais pas de bons repas comme prévu. Ce n’est pas la même qu’il y a deux ans, mais on ne va pas se plaindre, il fait beau, il y a du jeu, on n’arrête pas d’empanner ; ce n’est pas monotone. »