Thomas Coville : “encore une chance »

Thomas Coville - Sodebo
DR

Depuis la nuit dernière, Thomas Coville traverse le Pot au Noir avec son lot de grains et de manœuvres usantes. Le maxi trimaran devrait rejoindre d’ici peu des alizés de Nord-Est, stabilisés entre 18 à 22 nœuds, qui lui permettront de gagner rapidement au Nord. Il sera alors temps pour lui d’abattre une de ses dernières cartes. Une dépression venue des Etats-Unis se dirige vers les Açores. Si Sodeb’O arrive à monter dans le train au bon moment, ce flux pourrait l’emmener jusqu’à Brest, avec encore des chances de jouer le record de quelques heures… Extraits de la vacation avec Thomas Coville :

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Attraper la dépression aux Açores…
"Je suis entouré de grains très actifs. On avait prévu un Pot au Noir moins actif, mais il s’est réactivé dans la nuit avec des grains à plus de 30 noeuds. (…) C’est physiquement et nerveusement très compliqué car on peut chavirer à ces endroits-là ou casser beaucoup de matériel. (…) Il faut continuer à aller vite, à pédaler puisqu’on est dans la dernière ligne droite et il me reste très peu de temps et très peu de chances pour passer devant Francis Joyon. Si on arrive à attraper la dépression qui passe dans les Açores dans quatre jours, ça le fera peut-être de quelques heures. Si on n’arrive pas à attraper ce front qui nous emmènerait jusqu’à Brest, on raterait le record de quelques heures. Cela se joue à pas grand chose, après un tour du monde à courir derrière, il ne faut pas baisser les bras.(…) Pour l’instant il y a eu un bon dosage du matériel, je suis au service du bateau, je n’ai pas lâché une seule minute. (…)"

Plus de chemin parcouru qu’IDEC
« Je suis à fond depuis le début. C’est maintenant la météo au niveau des Açores qui va décider. Il faut que je sois au rendez-vous. Quand on sait à quel point la météo fluctue sur cet anticyclone, je n’ai aucune idée de l´issue du record. (…) On a fait beaucoup plus de milles que Francis Joyon (1450, ndr) à cause des glaces et de la météo. C’est vous dire à quel point je n’ai pas molli. J´ai cette frustration d’avoir été le jouet de la météo. C’est le principe des records (…). Francis avait eu une belle phrase à son arrivée, il avait dit : « la nature m´a laissé passer ». Cela résume bien les choses. Il faut jouer avec elle, la respecter, rester humble. Soit, elle vous laisse passer, soit vous subissez. »

Une concentration permanente
"Il faut avoir en tête que naviguer en multicoque demande une attention et une concentration permanente du fait de la vitesse constante ou de l’accélération rapide. La moindre minute d’inattention peut être fatale. C’est un exercice de tous les instants et c’est ce qui est harassant dans la tête et physiquement car on est à 100% tout le temps (…). Je n’ai pas eu le temps de m’évader. J’avais emmené deux livres que je n’ai même pas effleurés. (…) J’ai dû écouter de la musique deux ou trois fois seulement alors que je suis mélomane. La musique me manque mais je ne peux pas me couper du bateau, ça ne m’est pas permis pour garder la vitesse mais aussi pour ma sécurité".

Repousser ses limites

"Plus tu as passé de temps sur l’eau, plus tu as de sensations. Tu ressens chaque vagues, c’est un prolongement de toi. Ce sont des sensations de marin, de quelqu’un qui a passé beaucoup de temps sur l’eau (…). Je ne pensais pas que je puisse repousser aussi loin nerveusement et psychologiquement. Et physiquement je ne pensais pas pouvoir pousser si loin le bateau et me pousser aussi loin. Et finalement ça reste une énigme: où est la limite? Je crois que je m’en suis approché plusieurs fois (…)"

Le point à 17h jeudi :

A 17 h heure française ce jeudi, Sodeb’O avançait à 17,3 noeuds à 3110 milles de l’arrivée, dans du vent d’Est-Nord-est force 6. Son retard sur le chrono de Francis Joyon s’était stabilisé dans la journée autour de 590 milles. Thomas Coville en était alors à 51 jours et 2 heures de course. Autrement dit il lui restait 6 jours et 11 heures pour arriver à Brest et battre le record de Francis Joyon, soit tenir une moyenne légèrement supérieure à 20,06 noeuds.