Loïck Peyron

Loïck Peyron Portrait
DR

«J’ai fait toutes les éditions de la Route du Rhum… sauf la première, et celle qui se déroule actuellement. En 2002, je fêtais les 20 ans de ma première participation… on passe sur le cadeau, merci ! (ndlr : au cas où cela aurait échappé à certains, Fujifilm s’était disloqué lors de la tempête qui a décimé la flotte dans le golfe de Gascogne). Et il y avait franchement trop de vent pour qu’on allume des bougies, alors… Enfin, cela fait partie des choses de la vie et il y a plus malheureux.

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Le Rhum est un événement qui a marqué ma génération. Avant sa création, il n’y avait qu’une transat (l’Anglaise, ndlr), et dès que le parcours St Malo – Pointe à Pitre a été inauguré, tous les jeunes marins comme moi se sont dit qu’un jour, il faudrait qu’ils soient au départ. Et en ce qui me concerne, c’est lors de l’édition 1982 que j’ai effectué ma première traversée en solitaire en multi. Puis les éditions se sont succédé… Il y a plusieurs façons de ne pas gagner une course (ndlr : le Rhum s’est toujours refusé à Loïck, qui a par ailleurs signé un doublé sur l’Ostar, égalant ainsi Tabarly). Il y a la casse, l’erreur stratégique, ou tout simplement le manque de préparation – j’ai à peu près tout vécu en participant à cette course ! Il y a bien sûr eu des années plus frustrantes que d’autres, et la perte d’un bateau comme en 2002 est de loin la plus douloureuse. C’était je l’espère la première et la dernière fois. Mais la plus frustrante car la mieux préparée, celle qui à mon sens m’a vraiment échappé, c’est l’édition 94. Il n’y avait pas de raison de ne pas la gagner… sauf qu’à un moment donné, je me suis retrouvé sans mât.

Après, intervient l’amnésie indispensable pour y retourner, et j’y ai eu recours souvent sans quoi je n’aurais pas autant engrangé de milles en multi en solo… Récemment, lors de mes sorties avec Lionel Lemonchois et Thierry Duprey, j’ai constaté que les automatismes étaient toujours là, comme une seconde nature : pas question pour autant de jouer les donneurs de leçons, les deux garçons se sont préparés en vrais solitaires, et je ne me sens pas du tout dans la peau du coach qui choisit ses poulains… Nous travaillons en bonne intelligence, ils font appel à mon « ancienneté » quand ils estiment que cela est profitable, mais je n’adopte pas l’attitude du mentor. En course d’ailleurs, j’aimerais ne pas avoir de contacts directs avec eux, ils ont chacun leur interlocuteur météo… mais naturellement, j’ai l’œil rivé sur leur progression ! "

Propos recueillis par Jocelyn Blériot