Rendez-vous ce samedi matin aux Sables pour Le Cléac’h

Armel Le Cleac h - Brit Air
DR


” Samedi avant midi, je serai sur la ligne ” a promis le skipper de Brit Air à la vacation du jour. Une arrivée qui sonnera comme une libération pour Armel Le Cléac’h, malmené depuis les Açores par une dépression qui stagne sur sa route. Dire que le navigateur a passé une nuit ” sportive ” dans le golfe de Gascogne est un doux euphémisme. Mais le marin de Morlaix, malgré les conditions dantesques, n’est pas du style à verser dans le pathos. Pourtant, la casquette de Brit Air (prolongement du roof qui protège l’espace de manœuvre dans le cockpit) a bien explosé la nuit dernière sous la violence d’une vague et le chariot de têtière de grand-voile est sorti de son logement. Avec 35 nœuds de vent moyen (10 de plus sous les grains) et des creux de 5 à 6 mètres par le travers, on comprend aisément qu’Armel le Cléac’h persiste à naviguer prudemment vers les côtes françaises. Le plan Finot-Conq arbore trois ris dans la grand-voile et rien à l’avant… une configuration qui a permis à Armel de faire quelques courtes siestes de trois quarts d’heure ce matin. Le moins qu’on puisse dire est qu’il aura sacrément mérité cette deuxième place et le steak frites qui l’attend à l’arrivée.


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Marco à fond sous spi
L’odeur de l’écurie se fait aussi plus présente aussi pour Samantha Davies et Marc Guillemot qui rivalisent pour un fauteuil sur la troisième marche du podium… en temps réel. En ce 89e jour de course, la bagarre semble tourner à l’avantage du skipper de Safran. Il a réussi à contourner par l’ouest l’anticyclone des Açores et a envoyé son petit spi. Au portant dans 25 nœuds de sud-ouest, le plan VPLP-Verdier filait à 15 nœuds tandis que Roxy progressait toujours au près à proximité des hautes pressions, dans un vent voué à s’écrouler. Ces deux-là sont attendus aux Sables d’Olonne à partir du mardi 10 février 13 heures… une prévision que Marco jugeait un peu optimiste.

Derrière, le duel fratricide entre Bahrain Team Pindar et Aviva suit son cours. Les deux concurrents britanniques s’apprêtent à négocier à leur tour le fameux anticyclone avec un avantage pour Dee Caffari qui a la possibilité de raccourcir sa route. La navigatrice se réjouissait de pouvoir choquer les voiles et de limiter les embardées de son bateau. Comme sa compatriote Samantha Davies qui rêve d’une douche chaude et de moelleuses serviettes en éponge, Dee commence à penser aux fruits et aux légumes frais de l’arrivée.

Excepté Arnaud Boissières (Akena Vérandas), dans la même situation que Dee Caffari, chacun compose avec des conditions météo variées, typiques de cette remontée de l’Atlantique. Steve White (Toe in the Water) voit les alizés s’essouffler en approche du pot au noir, Rich Wilson (Great American III) est englué dans les orages au large du Brésil; Raphaël Dinelli (Fondation Ocean Vital) galère au près dans une dépression très active qui pourrait permettre à son compère Norbert Sedlacek de gagner du terrain. Devant les étraves de Nauticsport-Kapsch, encore 6700 milles, soit un bon mois de course avant de boucler la boucle.


Voix du large…

Armel Le Cléac’h (Brit Air), à la vacation du jour : « Jusqu’au bout c’est assez sportif. J’ai eu encore une nuit agitée, plus calme qu’hier après-midi mais avec de gros grains bien costauds. Je n’ai plus que trois ris dans la grand-voile et rien devant car ça rentrait bien fort. Je me suis reposé ce matin. J’ai dormi deux fois trois quarts d’heure. J’ai eu de la casse aussi. La casquette du bateau s’est arrachée dans une énorme vague. Maintenant elle doit être en train de couler dans le golfe de Gascogne. Et le chariot de têtière de grand-voile est sorti du rail. Je vais devoir affaler ma grand-voile. Je peux finir comme ça mais il faut que je vois s’il n’est pas cassé. C’était des conditions difficiles. Je ne suis même pas sûr d’avoir assez de gaz pour faire chauffer le dernier plat qu’il me reste. »

Marc Guillemot (Safran) : « Je viens de changer de spi, de mettre le petit et je vais pouvoir toucher les retours sur investissement. Ça commence à bien avoiner, je viens de manœuvrer, je souffle un peu, mais tout va bien à bord et il y a du soleil. Je suis sorti de cet anticyclone sans trop de douleur malgré mon manque de toile dans les petits airs, mais bon, ça ne s’est pas trop mal passé dans l’ensemble. Le vent est à 22 nœuds, c’est pour ça que j’ai affalé le grand spi car après, ça devient un peu chaud pour l’affalage. Je pense que je vais garder cette voilure jusqu’aux Açores. Je suis content d’y être arrivé, même si en matière de navigation on a toujours un doute sur le pourcentage de risques. Quand on tente quelque chose, on essaye d’y croire et d’y mettre beaucoup d’énergie.»

Samantha Davies (Roxy) : « J’ai dix à douze nœuds de vent et je suis toujours au près. Hier soir, j’avais des grains jusqu’à 32 nœuds, c’était encore une nuit sportive, mais ça aussi ça commence à se calmer. J’attends un peu de pétole cet après-midi et je vais travailler dur pour être ralentie au minimum. C’est sûr que je vais passer dans l’anticyclone et j’espère qu’en fin de nuit, je vais commencer à trouver le vent de l’autre côté. J’essaye de ne pas trop regarder la position de Marc, parce que ça va me stresser et je ne pourrai rien y changer. Ce qui me manque le plus par rapport à la terre, c’est ma salle de bain. Je suis une vraie fille et la vie est rude à bord d’un bateau de course. Un seau pour tout faire, ce n’est pas très ” fun ” pour une fille. Mais une fois à terre, la priorité ça va être une petite bière fraîche, je suis anglaise et ça me manque!»

Raphaël Dinelli (Fondation Ocean Vital) : « Je suis en train de me faire pilonner dans une grosse dépression, je suis au près avec plus de 40 nœuds, ce n’est pas facile. Hier, après l’épisode des Malouines, j’ai traversé une bulle anticyclonique, puis là je suis dans une dépression qui tape dur. Demain je serai dans des vents portants, en attendant ça pilonne sévère. J’ai affalé parce que j’ai révisé mes chariots de latte, je n’ai pas pu monter dans mon mât parce qu’en fait il y avait une houle résiduelle. Enfin, j’ai les médicaments, l’arrêt m’a bien servi, c’est déjà ça.»

Le classement de 16 heures le 06/02/09
1- Michel Desjoyeaux (Foncia) arrivé aux Sables d’Olonne après 84j 03h 09’
2- Armel Le Cléac’h (Brit Air) à 170 milles de l’arrivée
3- Samantha Davies (Roxy) à 1698,6 milles de l’arrivée
4- Marc Guillemot (Safran) à 1897,2 milles de l’arrivée
5- Brian Thompson (Bahrain Team Pindar) à 2113,6 milles
6- Dee Caffari (Aviva) à 2240,3 milles
7- Arnaud Boissières (Akéna Vérandas) à 2747,1 milles
8- Steve White (Toe in the water) à 3545,5 milles
9- Rich Wilson (Great American III) à 4996,1 milles
10- Raphaël Dinelli (Fondation Océan Vital) à 6245,3 milles
11- Norbert Sedlacek (Nauticsport-Kapsch) à 6699,5 milles
RDG Vincent Riou (PRB), réparation accordée, classé 3e