Alors ça va, comment te sens-tu aujourd’hui ? Fatigué, j’ai barré et manœuvré toute la nuit ! Mais c’est ça la course ! Je vais essayer de me prendre 2-3h pour des petites siestes.
Est-ce que tu commences à sentir l’air de la Guadeloupe ? Oui, l’eau est plus chaude et semble moins salée, ça change tout quand tu t’en prend sur la gueule toute la journée ! J’ai plus une fringue sèche !
Tu restes à 60 milles d’une 2ème place, un podium sur cette course ce serait beau non ? L’arrivée ça serait déjà bien ! Maintenant un podium, bien évidemment. Je suis content, et impressionné par le niveau global des concurrents, on avait tellement été critiqué. Cela montre qu’en plus d’être beaux et « magiques », nos bateaux sont fiables. Ils n’ont jamais été aussi sécurisants et fiables. Au niveau de la course en elle-même, je m’attendais à plus de coups météo, mais bon une course de vitesse moi ça me va très bien aussi !
Croises-tu quelques fois d’autres bateaux (pêcheurs, cargos…) ? Oui et bien cette nuit justement, pour la première fois ! J’ai vu 2 cargos juste en face de moi, par quel hasard je n’en sais rien, et je suis passé entre les deux, à 50m de chaque, je t’assure que je me suis demandé où j’allais !
Comment est la mer en ce moment ? Ca s’est stabilisé. Hier la mer était formée, difficile, ça secouait. J’ai passé 10h à l’intérieur avec la télécommande du pilote. Je pilotais presque à l’aveugle. Aujourd’hui, ça glisse, c’est mieux, le bateau est moins malmené.
Que fais-tu sur le bateau avant d’aller piquer un somme ? Je fais certains réglages, pour que le bateau aille quasiment à la même vitesse tout en étant sécurisé. Mais cette nuit je n’ai pas dormi, et pas énormément barré. J’ai surtout pas arrêté de faire des manœuvres sous pilote automatique ! Voilà pourquoi je suis un peu fatigué aujourd’hui !
Depuis le départ as-tu déjà utilisé le largage automatique des écoutes ? Oui une fois, le 2ème jour. Mais de manière manuelle, ça marche bien.
As-tu fait un brin de toilette depuis le départ ? Oui, on a des lingettes. Surtout les parties intimes, sinon t’attrapes des pustules !
Le combat des chefs A l’approche de la mi-parcours de cette Route du Rhum 8ème du nom, ils sont 4 monocoques de 60 pieds à se disputer férocement le commandement. Jean-Pierre Dick est un leader impressionnant. La puissance de son Virbac-Paprec s’exprime pleinement dans le vent soutenu orienté Nord Nord Est qui lui a permis de parer à toute vitesse ce matin l’archipel des Açores. Dans son sillage, c’est Jean Le Cam qui occupe désormais le fauteuil de dauphin. Son VM Matériaux a suivi la même trajectoire que Dick, préférant traverser l’archipel Portugais dans sa partie ouest. « Bilou est parti au sud » lâche d’un ton laconique un Le Cam apparemment peu ému des choix de son camarade de Port la Forêt, troisième au classement général. Sa concentration et son énergie sont pour l’heure entièrement dédiées à la glisse de son plan Lombard. « Je barre beaucoup, car c’est le seul moyen d’aller vraiment vite sous gennaker. Les gains comparés aux performances du pilote automatique sont de l’ordre de 3 nœuds ! » L’émulation entre ces trois hommes bat son plein. Trois ? « Wavre va très vite. Son bateau va bien » tient à souligner Le Cam qui continue de voir en Téménos un adversaire de choix toujours en lice pour la victoire à Pointe à Pitre.
Un horizon bien obscurci Car rien ne semble en effet joué alors que se présentent dans le sillage des hautes pressions en cours d’évacuation vers le nord des conditions perturbées aptes à redistribuer la donne. Il reste de belles heures de glisse devant les étraves de VM Matériaux et Jean « allume » sur la route. « Je ne sais pas si nous aurons d’aussi beaux alizés que les multis » prévient-il. La chaleur qui s’installe semble pourtant prémonitoire, « Je suis en T.shirt et il fait vraiment chaud à l’intérieur ». Mais la multiplication des échanges entre les solitaires et leurs routeurs témoignent de l’intensité des réflexions quant au choix des futures trajectoires. Bilou semble avoir choisi. Il cale son Sill et Véolia sur une route franchement au sud de l’ortho. Jean maintient un léger décalage Nor d Sud avec Dick, toujours intéressant lorsque l’on s’installe dans le rôle du chasseur. Pour l’heure, la folle cavalcade continue, prélevant sur les marins son écot de fatigue et de lucidité, à un moment où précisément les solitaires doivent savoir décoder une situation qui se complique. www.jeanlecam.fr
Multicoques 60′ Orma : la chasse au viking est ouverte Le pointage de ce vendredi soir est riche d’enseignements : Thomas Coville (Sodeb’O), très au nord, et Pascal Bidégorry (Banque Populaire) se sont décidés à empanner pour faire route au sud-ouest. Le leader Lionel Lemonchois, pas encore. Sous le vent de tous ses adversaires, Gitana 11 contrôle la flotte comme dans les livres, même si lui aussi devra trouver le meilleur moment pour mettre du sud dans son plein ouest. Contrôle? De fait, Gitana 11 s’est ménagé une position optimale, même si bien sûr, rien n’est fini. "Je pourrai me relâcher éventuellement… dans le canal des Saintes" confirme le viking normand, toujours aussi désarmant de sérénité. Son avance se stabilise depuis 24 heures : 110 milles sur Banque Populaire, 142 sur le Géant de Michel Desjoyeaux, 155 sur le Brossard d’Yvan Bourgnon et 231 sur le Sodeb’O de Thomas Coville. A moins de 1300 milles de l’arrivée pour Gitana 11, ce capital est tout sauf une assurance tous risques, mais il commence à devenir "intéressant", comme dit le directeur de course, Jean Maurel. "Je suis à l’intérieur, sous pilote, à 28, 29 noeuds. J’en ai encore sous le pied s’il faut accélérer mais ça ne sert à rien, l’essentiel est de trouver le bon rythme, à la fois pour le bateau et pour le marin", ajoute Lemonchois-la-force-tranquille. Info et/ou un peu d’intox? Pour déstabiliser ce Lionel-là, il faudra se lever de bonne heure. Reste que "rien n’est fini, il reste 1500 milles et en multi tout va très vite" tempérait Yvan Bourgnon, qui a raconté en direct à la vacation du jour deux "plantés", bateau à la verticale! Brossard a frisé la correctionnelle. Yvan s’est "vu sur le toit", avant de repartir à l’attaque, dans cette "course de folie, avec un niveau incroyable où tout le monde attaque, en permanence sur les vitesses-cible du bateau… mais en équipage!" Plus dure est la route pour Franck Cammas, dont on vient d’apprendre qu’il a cassé le safran tribord de son Groupama dans un choc ce matin. Dur aussi pour Antoine Koch sur Sopra Group. Alors que le benjamin des pilotes de multis (28 ans) faisait une belle course, intelligente, à son rythme, voilà qu’il annonce ce soir une avarie importante sur le rail de grand voile. Antoine ne peut plus naviguer voile haute, impossible d’envoyer la GV au-delà du 2e ris, situation très pénalisante dans ce vent portant de secteur nord-est devant virer est qui accompagne toujours des solitaires en route pour pulvériser le record de Laurent Bourgnon, peut-être dès lundi à Pointe-À-Pitre. Alors qu’ils ont bouclé ce matin les 24 heures les plus rapides depuis le début de la course, les multicoques Orma lèvent à peine le pied ce soir : cinq d’entre eux dont le leader sont encore sur des moyennes supérieures à 500 milles par jour.
Monocoques Imoca : Dick conserve la tête, Jourdain attaque par le sud L’incertitude règne toujours du côté des monocoques 60 pieds. Les trois premiers, Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec), Jean Le Cam (VM Matériaux) et Roland Jourdain (Sill et Veolia), se tiennent en moins de 40 milles. Et deux autres concurrents, Dominique Wavre (Temenos) et Brian Thompson (Artemis) restent en embuscade, à environ 70 milles du leader. Les vitesses sont toujours impressionnantes. Sous gennaker, il faut s’accrocher à la barre et engranger des milles tant que le vent souffle fort. Dans les deux prochains jours, la situation météo devrait changer radicalement. Une petite dépression tropicale pourrait rejoindre la flotte des monocoques Imoca. Comment la contourner ? Au passage des Açores, dans la nuit de jeudi à vendredi, Roland Jourdain (Sill et Veolia) a décidé de se démarquer en tentant une option au sud de ses adversaires, pour anticiper justement sur les prochains systèmes météo. Résultat, Jourdain a perdu quelques milles en distance au but, mais a réussi à se décaler suffisamment en latéral – environ 115 milles – pour profiter de vents différents de ses concurrents dans les prochaines 48 heures. Dick, Le Cam, Wavre et Thompson sont pour leur part passés au ras des îles du nord-ouest avec plus ou moins de réussite. Manque de vent pour Le Cam, claques et départs au tas pour Wavre. Quant au Britannique Brian Thompson, il a connu des problèmes de pilote automatique pendant une vingtaine d’heures qui lui ont fait perdre un temps précieux. Philippe Fiston (Adriana Karembeu Paris), dernier à plus de 500 milles, a finalement décidé ne pas s’arrêter aux Açores, mais de trouver une zone de mer calme dans l’archipel pour grimper en tête de mât débloquer son gennaker.
Monocoques Classe 40 à fond vers les Açores La flotte des Classes 40 poursuit sa course de vitesse en direction des Açores que les premiers devraient atteindre ce vendredi dans la soirée, le trio Morvan, Vittet et Sharp en tête. Les solitaires devront négocier au mieux l’archipel afin de se positionner favorablement pour la suite. "Jusqu’à maintenant, c’était relativement tout droit : une course de vitesse pure depuis la Bretagne. A partir de cette nuit, on va être dans quelque chose de plus fin au niveau stratégique, de plus indécis aussi. S’il y en a un qui trouve le bon trou de souris, il pourrait s’échapper" notait Dominic Vittet (Audio Atao System), qui effectuera demain matin une halte technique au port de Horta suite à un problème de spi. "Celui qui sortira le plus vite des Açores aura une bonne option pour la suite" confirmait Yvan Noblet (Appart’City). Ensuite, ils devront faire un choix. Soit décider de rejoindre l’alizé, soit de poursuivre vers l’ouest pour arriver par le nord sur la Guadeloupe. Reste que l’anticyclone des Açores n’est actuellement pas en place. A noter par ailleurs que Marc Lepesqueux (Siegenia – Aubi), déjà victime d’une casse de safran mardi et qui avait été contrait de s’arrêter réparer à Brest, a perdu son safran tribord la nuit dernière. Il continue tant bien que mal sa route vers les Açores.
Multicoques Classes 2 et 3 Multi 50 pieds (classe 2) : Le "patron" de la flotte, Franck-Yves Escoffier (Crêpes Whaou) qui a croisé à 32,81 yards la route d’une énorme baleine, est à 2000 milles de l’arrivée, le skipper malouin apprécie moyennement les conditions rencontrées. "C’est une mer casse bateau, j’ai l’impression d’être dans une machine à laver ; Je suis au suroît des Açores, à 200 milles et j’ai encore une bonne journée à 25/30 nœuds de vent ¾ arrière. Je suis un peu en dessous des capacités du bateau, je préfère être raisonnable. Je fais quand même de petits surfs à 23 nœuds, grand voile haute et grand gennaker. "Eric Bruneel (Trilogic) qui mène tout le reste de la flotte des 50 pieds à la poursuite de Crêpes Whaou est en plein bonheur. A 203,3 milles du leader, il a creusé l’écart avec Laiterie de Saint Malo (Victorien Erussard) qui pointe 135 milles derrière lui. Le vainqueur de la transat 2004 se réjouit des conditions. " La mer est plate, mon petit bateau file tout droit à 15 nœuds. Les prochaines 24 heures vont être au même rythme, tout droit, le bateau ne souffre pas, c’est parfait".
Classe 3 à deux : Pierre Antoine (Imagine Institut des maladies génétiques) n’a plus qu’un poursuivant, Ross Hobson sur Ideal Stelrad. Pour autant, la course n’a rien perdu en intensité. "Il faut être à fond tout le temps, si je relâche un peu, il revient ; alors, je mets du charbon sans cesse. Il faut faire de la vitesse et encore de la vitesse et aller au bon endroit. Là, j’ai un cap direct sur les Açores, il va falloir choisir par où passer et ne pas se planter ; C’est une question d’ajustement. Il y a encore 20 nœuds bien établis, ça secoue pas mal, j’ai vu mes premiers poissons volants, c’est sympa. Il ne va pas falloir traîner en route, derrière, ça mollit."
Monocoques Classes 1, 2 et 3 Jeunes dirigeants plonge au sud, Régis guillemot Charter Martinique à l’arrêt Les monos classes 1 et 3 poursuivent leur route vers les Açores, alors que certains ont déjà déterminé leur stratégie pour les 48 heures à venir, d’autres attendent de voir l’évolution des conditions sur les Açores. Après avoir réparé sa mèche de safran cassée hier soir, Régis Guillemot a remis en route ce matin, hélas, la mèche s’est à nouveau brisée à 15 heures 30 cet après midi.
Pas de changement chez les monos classe 2, où l’Américain Kip Stone (Artforms) augmente régulièrement son avance. Servane Escoffier (Vedettes de Bréhat Cap Marine), 2e, a légèrement distancé Luc Coquelin (Cap Guadeloupe 971).
«C’est à l’âge de 20 ans que j’ai décidé de me lancer dans la course au large, en commençant par la Mini Transat et le Figaro… Lorsque la Route du Rhum a été créée, j’ai tout fait pour être au départ de cette grande première en 1978, mais j’y allais avant tout pour apprendre. Je l’ai donc courue sur un monocoque en acier, dans une démarche de découverte. A l’époque, cet événement était sans conteste le plus important de tous sur la scène française. Naturellement, par la suite j’y suis revenu – j’ai terminé second en 1982 et en 1986 – ma dernière participation relevant plus du sketche qu’autre chose ! »
NDLR : en 1990, suite à la limitation de taille imposée par les organisateurs, Bruno, Francis Joyon et Hervé Laurent avaient participé au Rhum en « pirates », les organisateurs ayant tardivement modifié les critères d’admission. Un épisode bien moins anecdotique qu’il n’y paraît, puisqu’il a conforté Bruno dans sa conviction : le « No Limit » serait plus que jamais son cheval de bataille.
« Lors de la 4ème édition, nous n’étions plus que 4 à avoir pris tous les départs du Rhum depuis sa création : Mike Birch, Philippe Poupon, Florence Arthaud et moi-même… Il est vrai que pour moi 1990 a été une année charnière, qui a marqué la fin d’un cycle et le début d’un nouveau – je ne reviendrai pas sur la polémique de l’époque, pour moi c’est du passé et j’en retiens aujourd’hui le côté positif. Je me réjouis aujourd’hui du fait qu’une classe de géants existe, ait trouvé une vraie place et soit en plein développement, après avoir été initiée en 1993. Et si on regarde la situation actuelle… les géants et les 60 pieds peuvent cohabiter pacifiquement, la preuve avec l’Orange sailing team ! Je suis bien sûr rivé sur la progression de Steve qui n’a pas été heureux avec cette collision. Je suis aussi la course magnifique de Lionel Lemonchois actuellement en tete et avec qui j’ai passé de moments intenses durant notre dernier tour du monde. Je suis sûr qu’il va aller jusqu’au bout et je trouve sa course exemplaire de maîtrise… Le team Gitana doit retenir son soufle ! Nous sommes avec eux , c’est superbe !!!!"
Le Sly 47 est un bateau de croisière rapide, sportif, facile à gouverner, confortable en croisière grâce à des volumes intérieurs étudiés et à de vastes zones libérées de tout obstacle sur le pont.
Bateau rapide de longues et moyennes croisières, il procure divertissement et gratification dans les régates de classe IRC et Open.
Caractéristiques : Le Sly 47 a une coque et un pont réalisés à partir d’un moule en sandwich en utilisant des peaux en fibre de verre et de carbone avec une âme en PVC et résine époxy. Le collage se fait avec la technique du sac à vide et de la post-cuisson. l est est pourvu d’un plan de voilure généreux, d’un déplacement réduit et d’appendices efficaces : des caractéristiques qui garantissent des prestations élevées dans toutes conditions et à toutes allures. Le mât est réalisé en fibre de carbone avec deux étages de barres de flèche poussantes sans volant. Les haubans et les étais sont de type discontinu et réalisés en tiges de nitronic, et l’enrouleur de génois est encastré sous le pont. La bôme, les barres de flèche, le beaupré et l’axe du gouvernail sont également en carbone.
Les intérieurs : Les intérieurs sont élégants et clairs et équipés de tous les conforts pour une grande habitabilité durant la navigation, l’amarrage, la croisière et la régate. Les équipements personnalisés sur demande sont en composite avec un décor en tek ou laqué.
Les extérieurs : Le Sly 47 a un rouf étroit et fuselé avec de longues fenêtres latérales, un signe distinctif de tous les modèles Sly Yachts. Dans le grand cockpit à poupe ouverte sont installés la double timonerie, le long rail de la barre d’écoute et les grands bancs convergeant vers le capot.
Caracteristiques Techniques : Longueur hors-tout 14,20 m Longueur à la flottaison 12,60 m Largeur 4,00 m Tirant d’eau 2,70 m Tirant d’eau réduit 2,50 m Déplacement 7.950 kg Ballast 3.200 kg Surface grand-voile + génois 108% 141 m2 Grand-voile 80 m2 Génois 108% 61 m2 Gennaker 225-260 m2 Moteur 55 Hp Gasoil 170 Lt Réserve Eau 450 Lt
Tel est le cas de Lionel Lemonchois (Gitana 11) qui, au classement des multicoques Orma établi ce matin à 08H00, possédait 93 milles d’avance sur Pascal Bidégorry (Banque Populaire). Le Normand avait, paradoxalement, accru son avantage après avoir, involontairement, dormi… quatre heures d’affilée. « C’est la première fois que j’ai l’impression d’avoir vraiment dormi », lançait-il, d’une voix enjouée ». La durée inhabituelle de ce sommeil n’avait pas été programmée, et l’entourage de Lemonchois n’a pu y mettre un terme qu’après plusieurs tentatives infructueuses. Gitana 11 était alors sous gennaker et progressait à quinze nœuds. « C’était clair. Heureusement, on avait fait de bons choix, on s’en sort bien ! ». En fin de nuit, le vent avait forci et Lemonchois était lancé à 28 nœuds sur la route. Il gardait un œil sur Yvan Bourgnon (Brossard) et Pascal Bidégorry (Banque Populaire), sur Thomas Coville (Sodeb’O, plus au nord) et imaginait un retour express de Franck Cammas (Groupama) dès l’arrivée des alizés, dans 24 heures, selon lui. Lemonchois expliquait qu’il avait pu créer un léger écart en évitant soigneusement le dévent des îles aux Açores. Mais, concluait-il, 60 milles d’avance en multicoque, ce n’est rien, ça peut changer très vite ». Il ne passe guère de temps dehors. « Mon pilote est beaucoup plus concentré que moi, je le laisse faire depuis 48 heures. »
Chez les monocoques IMOCA, la bataille fait toujours rage entre Roland Jourdain (Sill et Veolia), qui s’était porté au commandement en prolongeant un bord plus à l’ouest et Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec), contraint, pour sa part, de plonger pour se débarrasser d’un objet aussi mou qu’encombrant la nuit précédente. Roland Jourdain déplorait a posteriori d’avoir touché moins de vent un peu plus dans l’ouest mercredi soir. Il envisageait « un empannage à gérer dans la journée pour la passage des Açores ». Jourdain a par ailleurs souligné que le trio de tête, qu’il compose avec Virbac-Paprec (à 25,2 milles) et VM Matériaux (Jean Le Cam en embuscade à 40,8 milles) « risque de passer un bout de temps en tête et d’y faire l’accordéon ». Son alarme a retenti lors de la vacation matinale. « Ce n’est rien, a-t-il aussitôt rassuré. J’habite près de la caserne et les pompiers font des exercices. »
Si, en monos IMOCA, Jourdain, Dick et Le Cam ont creusé l’écart, la situation est plus compliquée chez les 40 pieds. Gildas Morvan sur Oyster Funds demeurait en tête encore au pointage de 4H00 ce matin. « Cette situation ne me surprend pas, explique-t-il, les bateaux sont très proches ». Morvan a attaqué un peu hier, avant de toucher 35 nœuds de vent la nuit dernière. Le bateau avançait à 19 nœuds lorsqu’il s’est allongé dans sa couchette. « Le bateau va bien, le bonhomme aussi », s’est-il réjoui. « La route est encore longue, il va se passer des choses. Il reste environ 2 700 milles et il y aura plein de coups à négocier. Mais je suis content de ma position. » A 08H00, C’est Dominic Vittet sur Atao Audio System qui prennait la tête avec un petit mille d’avance sur Gildas Morvan.
Alors Yvan, un petit souci cette nuit ? Oui ! J’ai un peu les boules, je ne comprends pas trop… le vérin de pilote s’est coincé dans son axe ce qui a par la même occasion bloqué la barre de direction… J’ai tourné dans tous les sens et j’ai même dû m’arrêter pour finalement réussir à le débloquer.
Au final rien de grave, tu repars de plus belle ? J’ai quand même perdu 2 heures dans l’histoire et avec les moyennes actuelles, ça me fait 50 milles de retard en plus… Mais là je suis reparti à fond, je suis à 28 noeuds !
Cela ne t’a pas trop déconcentré, énervé ? Non je ne suis pas énervé, juste un peu déçu, dégoûté que cela m’arrive maintenant alors que je me sentais super bien et que j’étais dans le match…
Malgré tout, tu restes bien positionné et ce passage des Açores s’est bien passé ? Oui c’est sûr ! De toute façon, je vais me battre… Je ne vais rien lâcher, je ne suis pas du genre à gamberger sur un problème passé. Je vais tout donner pour refaire mon retard.
On approche de la mi-course, quel bilan fais tu de ton début de course ? Hormis ce petit souci, tout s’est bien passé jusque là. Avec Jean Luc Nélias, on a bien négocié et je reste en course pour au minimum un podium.
Et de celui de tes concurrents ? Il faut se rendre à l’évidence, Lionel (Gitana XI) fait un super début de course, il est irréprochable. Mais rien n’est joué !
«En termes de course en solitaire, pour moi il y a deux épreuves qui tiennent le haut du pavé… Une course de fond qui est le Vendée Globe, et un sprint qui est la Route du Rhum. Le nombre de participants au Rhum est vraiment impressionnant, ce qui en fait clairement la transat de référence.
Je ne me suis d’ailleurs jamais, lors de ma préparation à l’édition 2002, senti réellement serein tant j’avais l’impression qu’il s’agissait là d’une épreuve mettant la barre très haut. Mais personnellement, il s’agissait surtout de pouvoir revenir sur le parcours de ma Mini Transat, qui avait été une expérience traumatisante : il fallait d’une façon ou d’une autre conjurer le sort, le Rhum était une excellente occasion de le faire – sans cela, je ne serais jamais reparti en solo… (ndlr : lors de la Mini Transat 1999 Concarneau – Guadeloupe, ayant connu un temps particulièrement violent, Nick avait été projeté par-dessus bord et avait bien failli se faire son trou dans l’eau. Il s’en était sorti miraculeusement avec une clavicule cassée, et un moral en berne).
Il était pour moi très important de repartir sur la même route, car je devais aller noyer quelques vieux démons, c’était vital pour mon avenir dans ce sport. Lorsque j’ai débuté les entraînement à bord de mon 50 pieds, c’était la première fois que je re-naviguais en solitaire depuis la Mini ! Je ne faisais pas le fier à bras, et la qualification a été très éprouvante mentalement. J’espérais également que lors de la course elle-même, nous n’allions pas avoir un temps aussi mauvais qu’en 1999… mais il a bien fallu que je me rende à l’évidence : cela allait être pire ! Lors de la conférence de presse la veille du départ, les vagues venaient frapper les vitres du bâtiment où nous étions à Saint-Malo.
J’ai donc pris le départ avec pas mal de stress, d’autant que c’était mon premier « gros » projet personnel, je souhaitais faire un bon boulot. Une fois les voiles hissées, toute l’appréhension s’est envolée, je pouvais enfin prendre la mesure de tout le travail fait en amont, c’était un sentiment de libération étrange, une confiance qui me venait d’un coup alors que jusque-là j’étais en permanence en proie au doute. Mon bateau (l’ex-CCP Cray Valley, plan Finot) était très solide, je savais cela et j’avais multiplié les sorties par gros temps – il manquait un peu de potentiel au près, mais je connaissais ses points forts. Très vite, on a appris que les avaries et chavirages ne faisaient que se succéder les uns aux autres, et pour ne pas me laisser gagner par le stress, j’ai volontairement mis de la distance entre ma course et ce qui se passait autour de moi… J’étais dans une sorte de « vision tunnel », je ne pensais qu’à gérer le bateau qui tapait lourdement à chaque vague, il était difficile à ralentir. J’étais couché en bas, sur le plancher, avec la télécommande de pilote sur la poitrine ! Au petit matin, la tempête s’était calmée, le vent était devenu portant, et à cette allure ce monocoque était incroyablement rapide. En début de course, Yannick Bestaven attaquait très fort, et je le voyais fondre sur moi, mais il fallait à tout prix que je ralentisse le bateau quand même, car je sentais bien que cela forçait trop… Yannick n’a pas tardé à casser sa quille, et j’ai eu le champ libre.
Quand je suis arrivé en Guadeloupe, l’équipe avait fêté la victoire d’Ellen la veille, et quand j’ai mis pied à terre vers 2 heures du matin, tout le monde était trop crevé pour remettre ça ! Par contre, on s’est tous bien rattrapés le lendemain, et le fait d’aligner deux victoires a été pour le team quelque chose de totalement incroyable. Le fait d’avoir, sur un plan personnel, réussi ma traversée m’a permis par la suite de m’aligner au Vendée Globe."
Après 11 jours de mer, Bernard Stamm à bord de Cheminées Poujoulat est toujours largement leader de la première étape de la Velux 5 Oceans, entre Bilbao (Espagne) et Fremantle (Australie). Ces derniers jours, il avait légèrement marqué le pas. La faute à une dépression située dans le Nord du Cap Vert. Un petit front qui avait « tué » l’alizé. Mais depuis hier soir, le skipper touche à nouveau du vent frais. Cheminées Poujoulat allonge la foulée et creuse un peu plus l’écart avec ses poursuivants. Kojiro Shiraishi, Spirit of Yukoh, est maintenant pointé à 400 milles du leader. Mike Golding, Ecover, est relégué à 540 milles et Alex Thomson, Hugo Boss, est confronté à des problèmes de gréement à plus de 640 milles de Stamm !
Un scénario de rêve, d’autant que Bernard Stamm devrait encore accentuer son avantage ces prochaines heures. Alors que Cheminées Poujoulat a laissé derrière lui la zone sans vent, Kojiro Shiraishi est venu buter de plein fouet dans cette zone de calme. Une zone qui s’est étendue depuis le passage de Stamm qui vient quasiment de claquer la porte derrière lui… « Pour le moment, j’ai retrouvé l’alizé, confie Bernard Stamm. Je suis dans 12 nœuds de vent soutenu et stable. Des conditions idéales, avec peu de manœuvres, ce qui me permet de récupérer un peu .Cette nuit, j’ai pu me reposer et prendre plusieurs petites tranches de sommeil. C’était parfait. J’ai rechargé les batteries, c’est pas mal. »
Mais pas question de se reposer sur ses lauriers pour Bernard. « Plus je peux engranger les milles maintenant et mieux c’est. La course présente une configuration très différente de ce à quoi je m’étais préparé, et là il faut essayer de saisir sa chance. » Une chance qui sourit à Stamm. Le passage de l’Equateur, en fin de semaine, s’annonce plutôt bien. « Je pense que statistiquement je me situe plus à l’Est que le passage normal, mais pour l’instant je ne vois pas de ralentissement. » Cap plein Sud donc. Cheminées Poujoulat engrange tranquillement les milles avec un bateau remis au top. A chaque fois que son 60 pieds Open rencontrait une zone de vent plus maniable, Bernard Stamm en profitait pour bricoler, remettre en état et entretenir son plan Rolland. « Je vais attaquer l’hémisphère Sud avec un Cheminées Poujoulat tout neuf ! »
Le cap de Bonne Espérance s’est gagné au prix de quelques souffrances. Dans un vent de 60 nœuds, des vagues de 10 mètres et le trafic maritime régulier aux parages de la pointe sud-africaine, Maud Fontenoy a vécu des heures difficiles, au plan physique mais aussi technique. « Avant le passage du cap, j’ai eu des problèmes de voile d’avant. J’ai du aller affaler, les écoutes m’ont fouetté les mains. Résultat, j’ai la main droite qui a doublé de volume avec un gros hématome et le pouce de ma main gauche, je ne sais pas s’il est cassé, mais en tout cas, il est bleu, rouge et gonflé, j’ai du mettre une atèle.»
L’éolienne, également cassée pendant le coup de tabac a pu être réparée hier (mercredi), pendant une accalmie que Maud a mise à profit pour bricoler mais aussi pour se ressourcer. « Je me suis lavée avec des seaux d’eau de mer- elle est à 18 degrés-, j‘ai fait le plein de nourriture, d’eau douce et j’ai profité des quelques rayons de soleil » expliquait-elle à la vacation du jour. Ces trois jours de mauvais temps, « il a fallu les assumer, mais ce qui est positif, c’est que le bateau a bien tenu le coup. Cette expérience m’a renforcée et m’a donné confiance en moi. Je suis très contente d’avoir franchi ce cap, ce n’est pas un tiers du parcours, mais c’est déjà une grande étape.»
Aujourd’hui, Maud évoluait au près serré, avec deux ris dans la grand-voile et son solent à l’avant. Entourée d’albatros, elle avait retrouvé le moral et sa voix était claire. « Chaque jour est une victoire sur soi-même. Il faut malgré tout tenir le coup, garder le sourire et essayer de prendre du plaisir. J’essaie toujours de regarder ce qui m’entoure avec les mêmes yeux émerveillés que ceux des enfants » philosophait-elle. Maud vogue d’obstacle en obstacle, et elle en est consciente « j’ai choisi d’être ici, donc je n’ai pas à me plaindre. » Dès aujourd’hui, elle va mettre du sud dans sa route, pour éviter le gros d’une dépression qui se dirige sur elle, ce qui ne l’empêchera pas de retrouver le gros temps avec des vents de 45 nœuds attendus dans les jours qui viennent.