L’affaire n’a pas fini de se finir… Depuis la victoire d’Alinghi en juillet dernier, la Coupe déborde de coups plus ou moins bas, d’egos démesurés, de magouilles et de transferts plus ou moins attendus. Bref, l’été a été chaud et l’automne s’annonce aussi dense. D’abord parce que le juge Kahn de la Cour Suprême de New York a rendu son jugement le 22 octobre dernier en indiquant… qu’il jugerait plus tard ! C’est-à-dire sous trois semaines au moins, ce qui signifie quand il voudra bien juger…
Rappelons que le différent officiel (les officieux sont longs comme un jour sans vent !) qui oppose la Société Nautique de Genève (SNG : club détenteur de la Coupe de l’America) et le Golden Gate Yacht Club de San Francisco (GCYC : ex-Challenger of Record pour la dernière édition) tient au fait que le Clube Nautico Espanol de Vela (CNEV : Challenger of Record désigné par Alinghi en 2007) ne serait qu’un « club de paille », c’est-à-dire un yacht club créé de toutes pièces par la Fédération Espagnole de Voile spécialement pour la 33ème Coupe de l’America à Valencia.
Ensembles flous
Il faut dire que les révélations du Président de la Fédération Espagnole de Voile (RFEV), Monsieur Gerardo Pombo, le 3 novembre au Salon Nautique de Barcelone, ne sont pas de nature à clarifier l’histoire puisqu’il précisait que : « pour le bien de l’Espagne et en accord avec les toutes institutions impliquées dans le projet, c’était une nécessité (de créer ce nouveau club)… » En fait, la défense ibère s’appuie sur l’interprétation du Deed of Gift qui ne préciserait pas (linguiste shakespearien demandé !) s’il fallait que la « régate annuelle » du club challenger ait déjà eu lieu ou qu’elle puisse être organisée a posteriori par le club. Le CNEV a donc créé une nouvelle course à Valencia pour des voiliers de croisière (jauge RN locale) du 23 au 25 novembre 2007 !
Une question a aussi été posé aux dirigeants du nouveau club espagnol : comment devient-on membre du CNEV ? Car il semblerait pour l’instant que les seuls cotisants soient Manuel Chirivella (Président), José Maria Martin Puertas (vice-Président), José Angel Rodriguez (Trésorier et Secrétaire) et Luis Merino (Directeur), tous vice-Présidents de la Fédération Espagnole de Voile… D’ailleurs, les coordonnées du club et la ligne téléphonique sont tout simplement ceux du Challenger espagnol, Desafio !
Mercato à gogo
Pendant ce temps, les syndicats déjà en marche pour la prochaine Coupe de l’America version suisse (l’été 2009 était programmé, mais ACM a laissé entendre que la 33ème édition pourrait être reportée d’un an…), ne chôment pas : ça recrute dans tous les sens et les transferts sont parfois surprenants ! Côté Américains (pas encore déclarés comme Challengers…), le triple vainqueur de la Cup viré lors de la dernière édition par Ernesto Bertaralli, est installé comme CEO : Russell Coutts. Et on sait que des architectes espagnols travaillant pour Alinghi sont passés à « l’ennemi » aux côtés de Ian Burns (design coordinator)…
Chez les Espagnols, Paul Cayard est à poste à Valencia tandis que Bruce Farr planche sur les nouveaux Class America ibères. Pas de changements notables chez Emirates TNZ, alors que les Britanniques (de retour après un break de deux éditions) sont dirigés par le Kiwi Mike Sanderson avec Ben Ainslie (ex-Shosholoza) et Ian Percy (ex-Italien de +39) aux commandes, Juan Kouyoumdjian (ex-BMW Oracle) à la table à dessin, Julien Cressant seul Français du team au pied de mât…
Côté français, Areva a semble-t-il définitivement fermé le robinet alors que Stéphane Kandler est toujours à la recherche d’un financement. Les Chinois sont aux abonnés absents, les Suédois sont incertains, les Sud-Africains en ballottage avec les soucis de santé du Captain Salvadore Sarno (Directeur général) et le départ présumé de l’architecte Jason Ker… chez un autre syndicat.
Si Luna Rossa a définitivement annoncé son retrait, tout comme +39 Challenge, le Mascalzone Latino attend le dénouement de la Cour Suprême de New York. Et les Allemands désormais emmenés par Jochen Schuemann (ex-Directeur sportif d’Alinghi) et le barreur Polonais (ex-Desafio) Karol Jablonski, auraient recruté les architectes français Dimitri Nicolopoulos et Bernard Nivelt, récupéré certains équipiers du bateau « B » suisse comme les Français Yann Gouniot ou Bernard Labro.
Difficile d’en savoir plus car tous les syndicats restent très discrets en attendant de savoir à quelle sauce ils vont être mangés… dans le différent juridique entre Ellison et Bertarelli.
La boîte à coucou
Et sous la direction de l’Australien Tom Schnackenberg (ex-Australia 3, ex-TNZ, ex-Luna Rossa), une commission de designers a réfléchi à la nouvelle jauge lancée par les Suisses en juillet dernier, mais mise en cause par les Challengers potentiels. Et à part les 90 pieds de long imaginés à l’origine, les contraintes sont parfois étonnantes ! Ainsi, la largeur maximum de 5,30 mètres a été retenue parce que la distance entre les piles des pontons de Valencia ne permettait pas de faire rentrer un Class America de 5,70 m comme initialement prévu…
De même, la hauteur de mât est réduite à 39 mètres (au lieu de 41 m à l’origine) parce que les plateformes de cargo n’acceptent que des pièces de 41 m maximum (il faut pouvoir emballer et protéger les tubes). En découle que le poids de 25 tonnes a été descendu à 23 tonnes dans la version finale pour prendre en compte cette réduction de largeur et de hauteur de mât… En bref, pour concevoir un Class America nouvelle formule, il suffit de prendre les cotes du port d’accueil !
Dominic Bourgeois



















