Les réactions de François Gabart : “c’est hallucinant…”

Arrivée Macif
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François Gabart à l’arrivée : « C’est un soulagement énorme, tant que la ligne d’arrivée n’est pas franchie, on ne sait pas ce qui peut se passer avec les pêcheurs et les cargos. Ça faisait quelques jours que je commençais à y croire mais je voulais rester concentré. Les bateaux sont de plus en plus performants, et nous, nous sommes de mieux en mieux préparés. Donc ces performances qui s’améliorent à chaque course, c’est normal, en fait. J’ai pris un petit avantage au large de l’Argentine, je me suis décalé dans l’est et Armel le Cléac’h a été bloqué dans une dépression orageuse, j’ai pu creuser l’écart. Il y a eu des yo-yo, des effets élastiques, mais j’étais devant. Quand je suis parti, je ne pensais pas jouer la victoire. Je savais que c’était possible mais je ne cherchais pas ça. Dans l’Indien, j’ai commencé à y penser et quand Armel et moi nous sommes tiré la bourre, je me suis dit que j’avais une chance sur deux de gagner. Et ensuite, dans l’Atlantique, j’y ai cru. Mon moteur m’a lâché cinq jours après le départ, ça a été dur, surtout qu’on a vu que l’énergie est importante dans cette course. Mais j’ai réussi à réparer. La longueur, l’enchaînement, c’est le plus dur. Je n’ai pas eu l’impression d’avoir un seul moment de répit. Même le golfe de Gascogne à la fin, il fallait rester hyper attentif. Merci à Armel, on a vécu des choses exceptionnelles. C’est plus beau pour moi mais je pense qu’il en gardera un beau souvenir aussi. Cette intensité pendant trois mois, c’est grâce à lui, ou à cause de lui, je ne sais pas comment dire… »Pieds nus, le visage à peine marqué par ses 78 jours et 2 heures de mer, François Gabart a ensuite pleinement joué le jeu des questions-réponses avec la presse. Il a livré du même coup le portrait d’un garçon terriblement lucide, mais aussi sensible et authentique. 

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François Gabart lors de la conférence de presse : « Je pense que je suis parti sur cette course sans l’optique de gagner. Ce n’était pas mon objectif numéro 1. Avec MACIF, on voulait faire une belle course. Dire que je voulais finir premier, ça aurait été trop ambitieux avant le départ. Mais à un moment donné, quand on était dans l’Indien et que j’ai doublé Armel, je me suis dit que je pouvais jouer la gagne ».

“La dernière nuit a été franchement dure. Les conditions ont été difficiles et j’aurais pu tout perdre. Tu dois être à l’attaque sans prendre de risque. Dans 40 nœuds, ce n’est pas facile. Quand tu prends des surfs à cette vitesse dans le noir au milieu des cargos et des pêcheurs, ce n’est pas simple. Quand on passe les rails de cargos, c’est le plus facile. Avec l’AIS, on les repère bien donc c’est facile. On sait qu’il n’y a pas de pêcheurs. Dans le golfe de Gascogne, ce n’est pas la même chanson car il y a beaucoup de bateaux de pêche. La nuit dernière, je savais qu’il y avait un bateau pas loin mais je ne le voyais pas.”

“Depuis quelques années, le chemin que j’ai parcouru est hallucinant. A la conférence de presse de Michel Desjoyeaux en 2008, je venais de devenir pro depuis 6 mois. Aujourd’hui, je suis là, c’est juste hallucinant. Ce qui est difficile, c’est qu’il n’y a pas une seule galère. Sur le Vendée Globe, il y a des galères tous les jours. C’est pour ça qu’il faut être concentré sur les trois mois. C’est très fatigant. La nuit dernière a été très difficile car c’était la dernière et il y avait énormément de mer. Beaucoup de vent, plus de 40 nœuds et il y avait aussi beaucoup de trafic. Ça aurait été trop bête de prendre des risques alors qu’il ne restait plus qu’un jour de course. Je pense que ma position a changé ma façon de gérer cette nuit. Si Armel avait été 5 milles devant moi, j’aurai envoyé le gennaker.”

“La première grosse avarie que j’ai eue, c’est un problème de moteur au 5-6e jour de course, au niveau de Madère. J’avais un moteur en plus des deux hydrogénérateurs que j’ai cassé à ce moment là. Ce n’était pas vraiment un problème sauf que si tu grilles ton back up d’énergie au bout d’une semaine, ce n’est pas l’idéal. Il a fallu gérer ce petit bazar et ça m’a pris pas mal de temps pour réparer tout ça. Après ce premier gros problème, je me suis senti beaucoup plus fort. Je me suis dit : « voilà, j’ai su réparer tout ça et je suis capable de le résoudre ». Au final, à chaque fois que tu as un problème et que tu arrives à le résoudre, tu te sens très fier. C’est pour ça que j’ai l’impression de bien avoir progressé pendant la course.”

“Je ne sais pas si j’ai envie de repartir sur un Vendée, c’est trop tôt. Il faut que je prenne le temps de me reposer un peu, de faire quelques nuits. Là, je ne repartirai pas n’importe comment. Si tu n’as pas l’envie de le faire, je pense que le Vendée Globe est une punition. Aujourd’hui, je n’ai pas les tripes pour refaire le Vendée Globe, mais peut-être que dans deux jours, je l’aurai.”

“Je suis très fier du bateau et je le dis au nom de toute l’équipe qui a bossé pour construire ce bateau. Le deuxième bateau qui arrive est quasiment le même, donc je crois que Hubert Desjoyeaux a fait du bon boulot. Je suis fier d’avoir navigué sur ce bateau. Pendant la construction, j’étais plus spectateur qu’autre chose. Pendant cette course, je pense que je me suis approprié le bateau. Je le sentais très bien et c’est vraiment très chouette de vivre ça.”