Les clés du succès de Gahinet et Meilhat

Arrivée Safran Guy Cotten
DR

1. Marcassiner
Paul Meilhat  : « On a vraiment travaillé les réglages en se disant : on veut aller plus vite que les autres. Et dans le vent fort, en gros, on a fait comme Xavier Macaire avec qui j’ai fait un stage cet hiver à La Grande Motte. On a « marcassiné ». C’est un peu l’expression maintenant en Figaro. Avant, il y avait les sangliers. Nous, les jeunes, on est les marcassins. Le marcassinage, en gros, c’est : plus il y a de vent, plus on tire sur les voiles, plus on gîte, plus ça penche et plus ça fait peur, mais plus on va vite et plus on borde et moins on choque et on bourrine ! On a passé deux nuits, après le Cap Vert, où la bôme était presque tout le temps dans l’eau. Gwéno disait : bon ben là, il faudrait peut-être choquer un peu de hâle bas, ballaster. Et moi je lui disais non : on pousse, on pousse, je suis sûr que ça va marcher… »

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Gwénolé Gahinet : « Il y a un moment qui m’a marqué : le passage du DST. On choisit notre option, elle se révèle pas mal parce que le vent monte. Et puis il monte et il monte encore, avec une mer démontée au cap Finisterre. J’ai barré pendant 2 heures le long du DST, c’était bien physique. On arrive à la fin du DST, on choisit quand même d’affaler le spi pour empanner tranquillement et puis au moment de renvoyer, je dis à Paul, bon, on mettrait pas le petit spi là ? Et là, Paul me regarde et me dit : NON, Y’A PAS DE VENT OK ? »

Paul  : « Et tout en lui disant ça : je regarde l’anémo, y’avait 38/39 nœuds. On renvoie le grand spi, ça mollit à 35 nœuds et je lui dit : Bon, maintenant on largue le ris, et on y va, on mule. »

2. Attaquer
Paul : « Les jeunes en Figaro ont compris que plus c’est dur, plus il faut attaquer, plus il faut se faire mal. C’est la première fois que j’attaquais aussi longtemps. La prise de risques rend la compétition encore plus belle. Le fait d’avoir suivi le Vendée Globe m’a donné aussi l’envie d’appliquer ce qu’ont fait Mich’ (Michel Desjoyeaux) et François (Gabart). Car François a attaqué tout le temps. A un moment  donné, si on veut gagner, il faut attaquer. »

3.Prendre des risques, tenir le rythme
Gwénolé : La prise de risques est parfois inquiétante. J’avais quand même ce stress de la casse, comme ça m’est arrivé à la dernière Mini-Transat devant le Portugal. On s’est quand même fait peur devant le DST. Quelque chose est resté coincé dans le safran, une tortue peut-être, on ne sait pas vraiment. Du coup, nous avons du affaler le spi rapidement, pensant qu’on avait cassé le safran. »

Paul : « Nous n’avions pas vraiment le temps de se prendre la tête ni de râler. De temps en temps, je râlais  sur moi, je voulais que ça aille plus vite. Mais Gwéno a vite compris que c’est de temps en temps ma manière de fonctionner. »

4. Les moyens, plus que l’objectif
Paul : « On avait peut-être moins de pression que les autres, mais on a hyper bien préparé cette course. Sachant que c’était dans les attentes de Gwénolé, il y avait l’objectif de découvrir le bateau, de progresser. Ça fait partie de ma formation aussi de transmettre (Paul est coach en dériveur), on s’est servi de ça pour s’enlever la pression du résultat. On s’est dit : il y a un tas de cadors qui veulent tous gagner cette transat. Nous aussi, mais on a d’autres choses à aller chercher. Au lieu de se dire : « on va gagner, on va gagner », on s’est dit  « on va essayer de faire avancer le bateau plus vite possible ».

5. Transmission et échange
Gwénolé : « Nous avons instauré un dialogue intense, parce que l’objectif c’était la transmission d’expérience de la part de Paul. Quand on changeait de quart, à chaque fois il y avait discussion. Les autres équipages sont très bons, mais ils ont chacun leur projet, et peut-être qu’ils n’ont pas l’habitude de coopérer. »

Paul : « Il y a deux ans, quand j’ai fait la Transat AG2R LA MONDIALE avec Fabien (Delahaye), il m’avait raconté comment il avait gagné avec Armel (Le Cléac’h). Je me souviens qu’il avait insisté sur le côté « on se prend la tête sur les réglages ». Du coup moi aussi j’avais appris plein de choses. Avec Gwéno, j’ai retrouvé cette configuration de l’échange. Je crois c’est une des clés de notre victoire. »

6. Et la victoire fut…
Paul : « Nous nous sommes rendus compte que ça sentait la victoire à deux jours de l’arrivée. Quand Skipper Macif empanne. Il est au vent, il empanne et se met derrière nous, dans l’axe, et là on se dit « c’est bon ». Je pense qu’ils ont douté. Et nous, ça nous a boosté. Nous nous sommes dit qu’on pouvait aller encore plus vite. Fabien et Yoann ont du avoir un mauvais coup au moral. »

7. Le gène Gahinet
Gwénolé : « Cette question revient souvent… mon père, je ne l’ai pas connu mais il a tracé une belle route avant moi et je suis content de lui rendre hommage en traçant la mienne. »