Le plein d’émotions

Pascal Bidégorry
DR

Après un peu plus de 9 jours de course, six grands multicoques sont déjà arrivés à Pointe-à-Pitre, (Desjoyeaux 4e, Cammas 5e, Bourgnon 6e) où l’on attend désormais le Foncia d’Alain Gautier, dans la nuit. Autre illustration des conditions exceptionnelles de cette édition, Foncia aussi arrivera dans un temps inférieur à l’ancien record de Laurent Bourgnon, établi en 1998. Les quatre derniers multicoques de 60 pieds en course, eux, ont encore plusieurs jours de mer devant leurs étraves. Claude Thellier (Région Guadeloupe Terre de Passions) est pour l’instant le plus proche du but après Foncia, à environ 800 milles de Pointe-à-Pitre. Chez les monocoques, le suspense continue même si la tête de course est désormais à moins de 1000 milles de l’arrivée. Roland Jourdain (Sill & Veolia) a néanmoins pris un sérieux avantage, puisqu’il possède un matelas de plus de 110 milles d’avance sur ses plus dangereux adversaires passés par une route plus nord : Jean le Cam (VM Matériaux) et Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec). Tout peut encore arriver bien sûr mais "Bilou", avec une avance supérieure à 10% de la route restant à courir, a pris une sérieuse option d’autant que les quatre bateaux de tête vont naviguer de nouveau dans le même système météo. Chez les multis 50, le Crêpes Whaou! de Franc-Yves Escoffier est à moins de 950milles de l’arrivée et possède désormais… plus de 350 milles d’avance sur le Trilogic d’Eric Bruneel. En multis de classe 2 en revanche, le duel est toujours indécis entre l’Ideal Stelrad de l’Anglais Ross Hobson et l’Imagine de Pierre Antoine, relativement proches l’un de l’autre (25 milles). En monocoques de classe 1, 2 et 3, les leaderships sont plus affirmés à l’avantage de Jeunes Dirigeants en classe 1, d’Artforms en classe 2 et de Roaring Forty en classe 3. Du côté des Classe 40 enfin, on assiste à une bagarre stratégique extraordinaire avec un écart latéral énorme entre les bateaux (400 milles). A 1600 milles de l’arrivée Le leader britannique Phil Sharp récolte les fruits d’une option nord très osée et très payante pour le moment. Phil Sharp se retrouve avec un capital de 107 milles d’avance sur son dauphin Gildas Morvan (Oyster Funds), un peu moins au nord, et plus de 210 milles sur le troisième Dominic Vittet (Atao Audio System) qui a réussi à s’extirper des calmes du sud après une nuit difficile où nordistes et centristes ont engrangé, à l’inverse des sudistes.
 

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Multicoques 60′ Orma : Alain Gautier attendu dans la nuit pour la 7e place
Ce mardi soir, six grands multicoques Orma sont déjà arrivés à Pointe-à-Pitre ou on a déjà fêté vainqueur et podium. Dans l’ordre, Lionel Lemonchois (Gitana 11, vainqueur), Pascal Bidégorry (Banque Populaire, 2e), Thomas Coville (Sodeb’O, 3e), puis  Michel Desjoyeaux (Géant, 4e) Franck Cammas (Groupama, 5e) et Yvan Bourgnon (Brossard, 6e). Tous pulvérisent l’ancien record de l’épreuve : il n’y a jamais qu’un peu plus de 9 jours qu’on a quitté Saint-Malo… Le prochain attendu sur la ligne est le Foncia d’Alain Gautier, pointé à moins de 190 milles de l’arrivée à 16h. Sans réels adversaires sur l’eau désormais, Alain annonce une "arrivée cette nuit". Alors qu’Orange Project a chaviré et que Stève Ravussin a été récupéré par un cargo russe, outre Foncia, quatre grands multis restent en course. Si Gilles Lamiré (Madinina) ferme toujours la marche, c’est Claude Thellier (Région Guadeloupe-Terres de Passions) qui est le plus proche du but ce soir, à environ 810 milles de l’arrivée. Claude n’a pu être joint à la vacation du jour, à l’inverse des deux jeunes skippers qui tentent de boucler leur première transat en multicoque en solitaire : Thierry Duprey (Gitana 12) et Antoine Koch (Sopra Group). Relativement proche de Claude Thellier au sud de la route directe, Thierry Duprey bataille avec son bateau meurtri dans un choc avec une baleine et pestait ce midi contre "10 heures dans la pétole dont je ressors à peine". Son étrave endommagée l’empêche de porter la voile du temps et Thierry avoue que son ambition première est de ramener le bateau proprement à bon port et de continuer à beaucoup apprendre, "entre autres sur la gestion du sommeil". Même sagesse chez Antoine Koch, beaucoup plus au nord, lui aussi handicapé par un flotteur qui prend l’eau et un rail arraché qui l’empêche d’envoyer sa grand voile au-delà du deuxième ris. Pour lui aussi, participer et arriver seront deux belles victoires. Gitana 12 pointe ce soir à 719 milles de Foncia, soit environ 900 milles de l’arrivée, Sopra Group est 70 milles derrière et il reste encore 1900 milles à Madinina pour boucler sa belle aventure.

Monocoques Imoca : Roland Jourdain maintient la cadence
Stressantes. Epuisantes. Ces dernières 48 heures n’ont pas laissé les solitaires beaucoup se reposer. La traversée d’un front dépressionnaire a imposé un grand nombre de manœuvres et engendré un stress important. Zones de pétole. Vents instables en force et direction. Le tout sous des trombes d’eau. Entre dimanche 16h et mardi à la même heure, l’écart entre Roland Jourdain (Sill et Veolia), solide leader, et le deuxième, Jean Le Cam (VM Matériaux), est passé de 50 milles dimanche à 160 milles lundi pour retomber à 115 milles aujourd’hui mardi. L’accordéon des écarts engendre systématiquement un stress important, soit de voir son adversaire revenir à fond soit qu’il s’échappe à jamais. A moins de 1000 milles de l’arrivée, Jean Le Cam semble s’être fait une raison. « 100 milles de retard (à midi, ndlr), cela ne va pas être facile à reprendre maintenant » déclarait Jean à la vacation de la mi-journée. D’autant que Bilou, décalé dans le sud, navigue maintenant dans le même système météo et a remis le turbo en direction des Antilles. Revenu en troisième position, Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec) a perdu le contact avec Jean Le Cam, qui le précède maintenant d’une trentaine de milles. Quant à Dominique Wavre (Temenos), pointé deuxième lundi, il se retrouve à nouveau en quatrième position depuis le retour en force de Dick et Le Cam. Reste maintenant au groupe de tête à négocier un empannage dans la courbure anticyclonique pour enfin faire route directe vers Pointe-à-Pitre où les premiers sont attendus vendredi matin. Les premiers monos devraient donc aussi battre l’ancien record de Laurent Bourgnon en trimaran !

Monocoques 40 :  Sharp fait le grand écart
Aux commandes de la flotte des Classe 40 depuis 36 heures, Phil Sharp tire pleinement les bénéfices de son pari audacieux et continue de creuser l’écart sur ses poursuivants. " Il est passé sur la droite, il en profite bien le coco! " lâchait Gildas Morvan ce matin à la vacation. Le Britannique est en effet en train de prendre la poudre d’escampette. Hier à 16 heures, il devançait le skipper d’Oyster Funds de 19,5 milles. Aujourd’hui à la même heure, il possède 107,6 milles d’avance sur le Finistérien. Et pour cause, alors que ses camarades de jeu sont flashés entre 2 et 7 noeuds au maximum depuis 24 heures, Phil Sharp ne laisse pas son speedomètre descendre en dessous de 12 noeuds. " J’ai du vent assez fort, jusqu’à 40 noeuds dans les raffales " annonçait le skipper de philsharpracing.com en fin de matinée. " Sharp a l’avantage. Il risque bien de sortir avec 300 milles d’avance sur nous. Mais rien n’est joué " a affirmé Dominic Vittet (Audio Atao System).


Multis Classe 2 : Crêpes Whaou, loin devant
Après 48 heures pénibles, Franck Yves a repris sa route à bonne vitesse en début de nuit, après avoir passé le front. Derrière, la flotte des 50 pieds multis prend son mal en patience, attendant de traverser la dorsale qui a freiné le leader 24 heures plus tôt. Seul, Loïc Escoffier plus au nord, sur Deléage & Diazo tire son épingle du jeu en ayant été ralenti que quelques heures.


Multis Classe 3 : Ideal Stelrad a repris la tête
Les deux multis classe 3 encore en course soutiennent le rythme. Pierre Antoine (Imagine Institut des maladies génétiques) s’est fait dépasser par son ‘ami Anglais’, Ross Hubson. « Je suis tombé dans une bulle hier, il n’y avait pas un souffle d’air. A la fois, j’en ai profité pour réparer ma grand voile qui était déchirée sur 4 mètres de long. Huit heures de couture et de collage, j’espère qu’elle va tenir quand ça va repartir. Il va falloir négocier proprement ce qui nous arrive. Il n’y a plus de choix de système. Il est plus au nord, nous allons y entrer par deux portes différentes… Ideal Stelrad a touché hier le sud, sud ouest et est parti avant moi. Il a davantage de route à faire pour rejoindre la Guadeloupe, je suis plus proche de la route directe… On verra bien ».

Mono Classe 1 : Ils ont retouché du vent
Les bateaux les plus à l’ouest ont redémarré les premiers et c’est Jeunes Dirigeants (Pierre Yves Guennec) décidément très en forme, qui a tiré les premiers bénéfices de la dépression du sud ouest. Il maintient son avance, à 16 heures aujourd’hui, 97,2 milles le séparent de Ville de Dinard son poursuivant. « Je croyais que mon bateau marchait mieux que le sien au près, ben non, là encore il est le plus rapide » explique Bruno Reibel qui, par ailleurs nous envoie une petite carte postale depuis les Açores. « C’était hier, des paysages merveilleux, des dizaines de dauphins, un ciel bleu, du soleil, j’ai même vu des tortues de mer… Aujourd’hui, c’est l’automne, j’espère que demain il ne va pas neiger… »

Monos classe 2 : Servane Escoffier (Vedettes de Bréhat Cap Marine) et Luc Coquelin (Cap Guadeloupe 971) profitent du ralentissement du leader Kip Stone (Artforms) pour reprendre un tiers de leur retard. Mais l’Américain possède toujours plus d’une centaine de milles d’avance sur ses poursuivants.

Mono Classe 3 : Roaring Forty est toujours en tête et concentré sur sa navigation. Il devançait Dangerous When Wet de plus de 300 milles à 16 heures et Fantasy Forest de 505,8 milles.

Source Route du Rhum