Pouvez-vous nous raconter ce qui s’est passé lors du chavirage ?
Le bateau était au près dans 16-17 noeuds de vent mollissant. J’étais sous grand-voile haute et solent. J’avais décidé d’aller me reposer à l’intérieur. Ce que je n’avais pas fait depuis plusieurs jours. Le vent est rentré. Quand j’ai choqué, les voiles n’ont pas choqué. Les bouts avaient séché autour des winches. Ça s’est joué à un petit retard de « choquage » de quelques secondes. L’accident bête et fatal.
Ensuite, il a fallu sécuriser le bateau ?
Ensuite, je n’avais qu’une idée en tête. Comme il y avait un peu de houle, j’avais peur que le mât abîme le bateau par en dessous. Rapidement, je suis allé dans l’eau pour couper ce que je pouvais, larguer le mât et le gréement afin de préserver la plateforme. Il n’y a plus rien en dessous du bateau. Le mât n’était pas récupérable, il s’est cassé en deux lors du chavirage.
Depuis, comment vivez-vous cette attente ?
Il y a des hauts et des bas. J’essaie de m’occuper l’esprit, de ne pas penser, ne pas regarder le temps qui passe. Je fais des petits bricolages. Si je peux, je vais sur le bateau chercher des ficelles, récupérer ce que je peux. A l’intérieur, il n’y a pas d’entrée d’eau, j’éponge juste au fur et à mesure. C’est surtout la chaleur qui est difficile. Pour éviter que l’eau rentre, je suis obligé de fermer le hublot et ça devient vite insupportable.
Avez-vous vu des bateaux ?
Lundi, pour la première fois – je suis dans une zone hors de tout trafic maritime -, un petit bateau à voile argentin, qui arrivait de Cape Town et allait à Rio, est tombé sur le bateau. C’était hallucinant. Ils étaient plus paniqués que moi. Ils ne comprenaient pas que je veuille rester sur le bateau à l’envers. Ils voulaient m’évacuer. J’ai eu beaucoup de mal à leur faire comprendre. Sinon, il n’y a strictement personne ni dans le ciel ni sur l’eau.
A quand estimez-vous l’arrivée du remorqueur ?
Ce midi (hier midi), le remorqueur était à 420 milles. A la vitesse où il progresse, il devrait être là d’ici deux jours et demi – trois jours. (Silence) Enfin j’espère !
Que va-t-il se passer alors ?
Dès que l’équipe sera là, on va remettre le bateau dans le bon sens. On va remplir un flotteur d’eau et tirer sur le flotteur opposé pour faire basculer le bateau. Après, on enlèvera toute l’eau qu’il y a dans le flotteur. C’est une opération qui a déjà été réalisée, ça devrait bien se passer. Le remorqueur vient de Rio de Janeiro, donc c’est là que nous irons avec le multi en remorque. C’est le plus grand port le plus proche pour organiser un rapatriement du tri vers l’Europe.
Propos recueilli par Aline Merret / Le Télégramme