Aussi discret que rigoureux, Hubert Desjoyeaux préférait l’ambiance des chantiers au-devant de la scène médiatique. Dans cet univers de la course au large, il était un homme de l’ombre qui a joué un rôle essentiel dans certaines victoires de son frère Michel et de bien d’autres marins depuis trois décennies.
La saga CDK
Lui-même était fin régatier. Complice de Jean Le Cam sur le célèbre Armagnac «Mervent» et de Patrick Morvan sur le half tonner «Farsseur» (1977), équipier de Philippe Jeantot sur le catamaran «Crédit Agricole», il aurait pu embrasser la carrière de coureur. Mais ayant hérité de l’esprit pionnier de son père Henri, un des créateurs du centre des Glénan, Hubert avait rapidement opté pour le métier de constructeur. En 1984 à Plymouth, au départ de la Transat anglaise, avec ses complices Jean Le Cam, Gaëtan Gouérou et l’architecte Marc Van Peteghem, il décidait de lancer le chantier CDK Composites. Le début d’une belle aventure au moment où la course au large explosait. Depuis près de 30 ans, la saga CDK a été jalonnée de nombreux succès. Constructeur de «Poulain», le trimaran d’Olivier de Kersauson, le chantier de Port-La-Forêt a aussi vu naître «Bagages Supérior», le ketch d’Alain Gautier, vainqueur du Vendée Globe 1992, ou a transformé «PRB» pour Vincent Riou, vainqueur du Vendée 2005. Pour son frère Michel, il avait notamment construit le trimaran «Géant», vainqueur de la Route du Rhum 2002, et de la Transat anglaise et plus récemment le 60 pieds «Foncia» que son cadet avait si brillamment mené à la victoire dans le dernier Vendée Globe.
Technicien et marin
Esprit novateur, à l’écoute des coureurs, Hubert Desjoyeaux était toujours à la recherche du meilleur compromis entre l’avancée technologique et la fiabilité de la solution au plan maritime. Sa compétence était unanimement reconnue dans cet univers de la haute compétition océanique. Le chantier devenu CDK Technologies est encore impliqué dans le programme de construction des trimarans monotypes MOD70. Hubert Desjoyeaux n’avait pu être présent à Lorient en février lors de la présentation du numéro un de la série mais il était au coeur de ce projet. Malgré la maladie qui l’avait affaibli depuis quelques mois, ce travailleur infatigable était en lien constant avec ses équipes jusqu’à ces jours derniers. «Il s’est battu jusqu’au bout. Il était encore investi sur tous les projets. Le chantier a été sa vie. C’était un grand technicien mais qui s’appuyait sur son sens marin», dit son ami Gaëtan Gouérou. Dans la nuit de mercredi à jeudi ce combattant a affalé les voiles. A ses parents, Henri et May, à son épouse Monique, à ses quatre filles et à toute sa famille, la rédaction du Télégramme présente ses sincères condoléances.
Gilbert Dréan / Le Télégramme
La rédaction de Course Au Large s’associe à la peine de la famille Desjoyeaux, à qui nous présentons notre amitié et nos sincères condoléances. Hubert était un grand spécialiste, discret et talentueux, le chantier CDK un interlocuteur évidemment précieux. Il aura beaucoup oeuvré pour le monde de la course au large, beaucoup contribué à l’amélioration permanente des bateaux qui nous passionnent tous. Sa disparition laisse un grand vide.