L’an passé, la non-sélection de Damien Seguin à la Solitaire avait fait du bruit dans le microcosme de la voile. "En cas de problème majeur, il ne pourra pas réagir en bon marin", lui avait-on rétorqué. Une phrase pour le moins vexante pour un garçon qui, depuis plus de 15 ans, navigue avec les valides. A vrai dire, on reprochait à Seguin son manque d’expérience au large en solitaire. Soit.
"J’ai bon espoir"
Alors, le skipper avait décidé de louer un Figaro 2 et de partir en solitaire accomplir 900 milles. "J’en avais marre de m’opposer à eux en permanence. Il fallait que j’aille sur l’eau afin de leur apporter la preuve de mes capacités". Ce qu’il fit sans aucun souci. Un an plus tard, Damien Seguin ne sait toujours pas s’il sera autorisé à participer à la Solitaire. "J’ai tout fait pour leur prouver que j’en étais capable, alors j’ai bon espoir". En attendant la réponse de la FFV qui a hérité de ce dossier brulant, Seguin n’a cesse de s’entraîner à Lorient. En solitaire, mais aussi en double avec son coéquipier Denis Lemaître en vue de la Transat AG2R : "Ce sera ma première transat. Avec Denis, nous sommes complémentaires. Lui, il a plus d’expérience que moi au large. Je suis d’un tempérament fougueux, impulsif car je viens de l’olympisme. Denis va me canaliser". Face aux ténors de la série, Seguin sait qu’il sera difficile de se faire une place au soleil. Aussi, rêve-t-il "d’une belle course, propre tactiquement". "Je pense que si on réalise une belle course, on pourra rêver d’une belle place".
Le Rhum sur un tri de 42 pieds
Une belle place à Saint-Barth’ permettrait, peut-être, de faire taire certains de ses détracteurs : "Mon objectif est d’être au départ de la Solitaire Afflelou – Le Figaro l’été prochain, puis sur la ligne de départ de la Route du Rhum". En effet, à Saint-Malo, le prof d’EPS du lycée d’Auray doit prendre la barre d’un trimaran de 42 pieds, le "Krysalid" actuellement en construction : "C’est une classe nouvelle. Nous avons voulu un bateau sain, rapide et sécurisant". Là encore, sa participation au Rhum dépend de la décision des instances fédérales. Damien le sait et quelle que soit la décision de la FFV, il se battra : "Parce qu’à 27 ans, j’ai vraiment envie de faire de la course au large en solitaire".
"Des Pieds et des mains"
En parallèle, il utilise son association "Des Pieds et des Mains", créée en 2003 et destinée à faire voler en éclats les préjugés sur le handicap. "Et favoriser l’intégration de tous dans le monde des valides par le biais du sport", dit-il. D’ailleurs, à Concarneau, il a prévu d’organiser une petite régate une semaine avant le départ : cette course, la Pozigotte Race, devrait réunir quelques skippers de renom sur des Mini J. Des valides sur des bateaux d’ordinaire réservés aux handicapés, en voilà une belle initiative. A moins que quelqu’un ne s’y oppose ?
Philippe Eliès
Damien Seguin voit large
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