– Que ressent-on après une victoire dans une course qu’on a soigneusement préparé pendant deux ans ? Corentin Douguet : “De la joie bien sûr. J’ai eu une journée pour réaliser. Le matin, j’ai vu une voile à l’horizon, celle du bateau d’Alex Pella, donc je savais que si tout se déroulait normalement, Alex ne pouvait pas me reprendre 9 h 40′. Néanmoins, j’avoue que mardi soir, j’ai eu très peur en écoutant la vacation de Denis Hugues (ndlr : directeur de course) car il a commencé en disant ceci : “”De gros écarts se sont créés””. Et le seul truc que je n’ai pas entendu, c’est la distance au but de Pella. J’ai juste entendu : “”Pella à 300 milles de l’arrivée, le 2e à 344 milles””. Là, j’ai eu peur : je me suis fait des mauvais films””. – Avez-vous douté entre les Canaries et Bahia ? C.D. : “”Oui, après l’équateur, le neurone de la vitesse était bloqué : je n’arrivais plus à faire avancer le bateau. Pella me reprenait 15 milles par jour. Comme tu ne sais pas où sont les autres concurrents, tu gamberges. J’ai également eu un coup de mou au Cap Vert : une vraie baisse de régime. Là, tu regardes le GPS et tu vois “”Bahia à 2.000 milles””. le moral en prend un coup. Dans ces moments-là, tu ne peux pas appeller à la maison comme sur le Vendée Globe. Alors, moi, j’écoutais de la musique et ça allait mieux””. – Pas de Pot au Noir, des surfs interminables sous spi : on imagine que vous avez dû prendre du plaisir sur l’eau ? C.D. : “”Ah ça oui ! On a eu des sessions de planning magiques, des surfs de folie en pleine nuit avec la musique à fond. De grands moments ! On a été super gâtés par les conditions météo : pour moi, le Pot au Noir n’aura duré que 2 h, soit le temps que je me fasse piéger bêtement sous un nuage. C’était une transat de rêve””. – Qu’avez-vous cassé sur votre bateau ? C.D. : “”Des broutilles : un bout de ficelle et mes lampes torche. Le bateau est en parfait état. D’ailleurs, je pense que la différence est là. La victoire se joue sur la préparation du bateau. Alex Pella a opté pour des spis collés et ça lui a coûté la première étape. S’il n’avait pas fait ce mauvais choix, il est clair que le scénario aurait été très différent””. – Et le démâtage d’Yves Le Blévec ? C.D. : “”J’ai vu que je lui reprenais 25-30 milles par jour. Là, j’ai compris qu’Yves avait un problème. Au départ, je voyais Le Blévec, Pella et moi sur le podium. Je ne me suis pas trompé, sauf pour Yves qui a cassé. Je suis malheureux pour lui, c’est un copain, un vrai gentleman sur l’eau. Yves n’avait que 3 h de retard sur moi aux Canaries, donc il fallait le surveiller. A un moment, il était devant moi, il naviguait proprement, comme toujours. La casse fait partie du jeu, mais j’aurais préféré le battre à la régulière””. – Vous arrivez frais comme un gardon. Vous êtes-vous mis dans le rouge pendant la course ? C.D. : “”Non, sauf une fois ou deux. Sinon, j’ai bien dormi, beaucoup bu : il me reste 3 litres d’eau seulement dans le bateau””. – Quels sont vos projets pour la saison prochaine ? C.D. : “”Je rêve d’un bateau plus grand, moins humide. En mini, j’ai fait le tour, surtout cette saison qui fut extraordinaire d’un point de vue sportif. Un Figaro, un 60 pieds ? J’ai eu le temps d’y réfléchir pendant la course : je rêve d’un tour du monde, mais pas en solitaire. Pourquoi pas un Jules Verne ou une Volvo Ocean Race. Si Seb Josse a besoin de quelqu’un, je suis là ! Avec Thierry Chabagny, on va normalement refaire une Transat AG2R. Thomas Coville m’a envoyé un mail à Lanzarote où il disait ceci : “”Si tu gagnes, tu auras une place à bord du trimaran en 2006″”. Comme Thomas est un homme qui tient parole, j’attends (1)…”” Propos recueillispar Philippe Eliès (1) : Corentin a reçu un mail, hier, qui disait ceci : “”A bientôt en Bretagne pour une navigation sur Sodebo. Thomas””.”
“Une transat de rêve”””
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