Le quintet des trimarans a son meneur de jeu mais pas encore son chef d’orchestre : les solistes se succèdent dans un tempo rythmé par une brise qui fait son métronome entre Sud-Est et Est, au gré des risées (blanches ou noires) qui crochent dans les voiles. Si les équipages sont en harmonie avec le vent, ils peuvent improviser leur partition pour tenter de composer dans cette musique de chambre où un duo mène la cadence, et un trio peine à raccorder les violons. A la baguette, Pascal Bidégorry alterne les pianissimos et les moderatos selon les saccades du vent et a déjà passé les Bouches de Bonifacio, franchies allegro dans une brise légèrement plus enlevée par cet effet Venturi : un petit souffle qui a permis à Banque Populaire de retrouver du punch et surtout de mieux contrôler les velléités de Frédéric Le Peutrec de travailler sa propre mélodie. Car Gitana 11, revenu à l’occasion d’une option Ouest à la sortie du détroit de Sicile, n’est plus très loin et même s’il restait à 16h00 encore 170 milles à parcourir avant d’entendre résonner les clairons et sonner les trompettes niçoises, il y a du couac dans l’air…
Sur le papier, l’écart représente plus de 10% du parcours restant, ce qui en tout autre discipline mécanique, ne laisserait aucune chance au poursuivant mais avec une propulsion vélique, l’affaire est tout autre : vingt milles s’avalent en une heure quand le vent est au rendez-vous ! La lutte finale entre Pascal Bidégorry et Frédéric Le Peutrec pourrait donc ne s’achever qu’en vue de la Côte d’Azur… Enchaînant les empannages plus ou moins éloignés de la côte, les deux trimarans n’ont pas fini de jouer de l’accordéon au diapason d’une météo… corsée. Avec l’arrivée d’un front orageux sur le Sud-Est de la France (il pleuvait avec peu de vent ce midi à Nice), la stratégie entre le cap Corse et le continent laisse entendre qu’il vaudra mieux aller au plus vite vers la côte. Mais avec la nuit, il n’est jamais évident de visualiser ce qui se passe sur le plan d’eau et avec peu de lune, ce qui évolue dans le ciel. Les deux skippers espéraient franchir la pointe extrême Nord de la Corse aux douze sons de cloche de minuit car il serait alors plus facile d’en terminer avec ce parcours de 2 600 milles, tout de même bouclé en neuf jours soit approximativement à douze nœuds de moyenne.
Banque Populaire et Gitana 11 aux avant-postes
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