Vendée Globe. L’Imoca Macif de Charlie Dalin, l’un des favoris

Charlie Dalin a mis à l’eau le 23 juin 2023 son Imoca Macif. Il fait partie des favoris pour gagner ce Vendée Globe. Son bateau est signé Guillaume Verdier, il a été construit chez CDK avec le bureau d’études de MerConcept.

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S’il avait à décrire son nouvel Imoca, Charlie dirait « qu’il a été fait sans compromis en termes de performance avec une ergonomie la plus travaillée possible pour supporter le confort relatif à bord d’un foiler ». Avec ce nouvel Imoca, il vise clairement la gagne sur le prochain Vendée Globe, lui qui est arrivé 1er aux Sables-d’Olonne sur la dernière édition mais qui a dû céder sa place à Yannick Bestaven avec le jeu des compensations. Il a préparé son bateau avec toute la méticulosité qu’on lui connaît. Il a repris sa place de patron en Imoca en s’imposant sur la dernière course du championnat IMOCA.

Macif sera le seul Imoca de nouvelle génération signé Guillaume Verdier sur ce Vendée Globe, où les architectes sont nombreux. Le bateau de Charlie Dalin est assez différent des nouveaux plans Koch-Finot — Arkéa Paprec et For People —, devenus des cousins éloignés. Ils revendiquent une filiation commune à partir des sister-ships LinkedOut et Apivia. « Si on compare Apivia, 11th Hour et Macif, 11th Hour est plus proche d’Apivia que de Macif. Il y a eu une évolution importante. Pour concevoir ce bateau, nous avons réalisé un bassin de carène numérique dans les vagues. Ce que nous n’avions pas fait pour Apivia. Cela nous a permis de quantifier le niveau de décélération dans les plantés. En comparant Apivia et Macif, on a réussi à diminuer de 10-12 % le pic de traînée à chaque fois que l’on rencontre une vague, mais aussi la quantité d’eau que l’on retrouve sur le pont. »


La carène en détail

Cela se traduit dans le dessin final de Macif par une carène où le volume a été déplacé vers l’avant et rendu plus étroit à l’arrière. « Cela permet de rajouter de la puissance longitudinale pour qu’elle plante moins et qu’elle soit plus puissante quand elle reprend contact avec l’eau. On a rajouté des francs-bords par rapport à Apivia, poussés également par des règles de jauge modifiées dans ce sens. Cela permet de naviguer dans une mer plus formée et de limiter les entrées d’eau sur le pont. On a introduit du tulipage dans la coque. C’est quelque chose que nous n’avions pas sur Apivia. L’Imoca 11th Hour a été le premier à le faire, et cela a été repris sur les Koch-Finot. Cela permet d’avoir une carène qui répond un peu mieux quand elle reprend contact avec l’eau, et d’évacuer l’eau sur les côtés. On a rajouté une virure, comme une marche à mi-hauteur en avant sur la coque, qui évite, quand le bateau reprend contact avec l’eau, d’avoir une couche d’eau de 100 mm d’épaisseur. Celle-ci peut rester collée à la coque et remonter sur le pont. Par ce système, l’eau est chassée sur le côté. »

« Sur Apivia, les flancs de coque étaient verticaux jusqu’à un certain point, puis revenaient sur l’intérieur. Le problème que nous avions est que quand le bateau plantait et atteignait ce point de frégatage, cela avait tendance à accentuer le plantage et amener plus d’eau sur le pont. Quand tu rentrais dans une vague, l’étrave s’enfonçait encore plus et allait au fond. On a gardé un peu de frégatage mais légèrement plus en arrière, commençant à quelques mètres de l’étrave. Pour élargir virtuellement le bateau à l’avant, le bouchain redescend légèrement avant de remonter. Il est au même niveau de l’arrière jusqu’à 2-3 m de l’étrave, après il redescend puis remonte pour élargir au maximum le bateau. On a gardé de plus une spatule. »

Les gros changements par rapport à Apivia, ce sont le cockpit et la zone de vie.

« J’ai voulu une zone de vie et un cockpit les plus ramassés possible pour limiter au maximum les déplacements. La difficulté de se déplacer à l’intérieur d’un Imoca n’est pas facile à faire comprendre. Faire 2 m est vraiment compliqué. La zone de vie, où tout est à portée, est extrêmement petite et condensée. J’ai un siège de table à carte qui est à 1 m de ma bannette. Sur le dernier Vendée, j’y passais 6-7 h par jour dans un pouf, en position semi-allongée. On a retravaillé l’ergonomie. Je n’ai plus de déménagement à faire à chaque changement d’allure. Tout est fixe. Entre la zone de vie et le cockpit, il y a une cloison et une porte. On a beaucoup travaillé le niveau de fermeture du cockpit et introduit un système de trappe. Je peux matosser à l’arrière, sur les côtés. Au portant, je matosse les voiles sur le pont ou sur une bassine à l’arrière que l’on a rehaussée pour récupérer plus facilement les voiles. »

Avec ce nouveau bateau, l’objectif était de gommer les points faibles d’Apivia mais en conservant ses points forts.

« Il y a toujours une différence entre la théorie et la pratique, entre ce que l’on imagine comme comportement du bateau et la réalité. Mais de génération en génération, on trouve toujours une façon d’améliorer les bateaux. L’objectif est d’avoir un bateau polyvalent, capable de fonctionner à toutes les allures. Il n’est pas typé, comme peut l’être Malizia par exemple. La force d’Apivia réside dans sa capacité à s’autoréguler une fois qu’il est bien réglé. Il ne perd pas trop de vitesse si les conditions de vent évoluent. Un bateau qui vit bien sa vie dans les molles comme dans les risées. On a voulu garder cela sur Macif, en lui donnant d’autres points forts. 

S’il y a beaucoup de disparités entre les carènes des nouveaux bateaux, sur les foils en revanche, on est tous un peu pareils. On a tous convergé vers la même famille de foils, dits “Verdier” : un shaft incurvé vers le bas, avec le centre du rayon qui est vers le bas intérieur après le coude et un tip plus ou moins redressé. Quand on rentre ou qu’on sort le foil, on change l’inclinaison du tip. C’est une forme de foil que tout le monde a, mais avec des profils différents. Ils sont fabriqués chez AVEL Robotics, comme les autres foils d’Apivia. On aura une autre paire de foils pour le Vendée. »

« En termes d’énergie, on a conservé la même chose. On n’a pas choisi de mettre du solaire parce que c’est lourd, même si ce serait agréable de ne pas recharger avec le moteur. On a deux hydrogénérateurs. J’étais un peu court en diesel sur le dernier Vendée Globe et cela a bien fonctionné. Le problème de l’hydro, c’est la vitesse. Quand on va à 30 nds on n’a pas envie de l’avoir dans l’eau. J’ai un pilote Madintec. Pour les aériens, le sujet est toujours aussi épineux. J’ai cassé mes deux aériens sur le dernier Vendée, l’un sur la pale, l’autre sur les godets. Un NKE et un B&G. La qualité du pilote automatique, quand on n’a plus de mode vent, reste compliquée. J’ai dû naviguer avec ma perche de secours de l’océan Indien au Brésil, en attendant le bon moment de monter au mât pour réparer. C’est un gros problème. On utilise désormais des capteurs à ultrasons, qui ne marchent pas si mal. »