Guirec Soudée s’est fait connaître en faisant un tour du monde à la voile à 21 ans par les deux pôles. Il est le plus jeune marin au monde à emprunter le passage du nord-ouest, avant de rejoindre le cap Horn et le pôle Sud. En 2021, il traverse l’Atlantique à la rame en solitaire, d’est en ouest, puis d’ouest en est, sans assistance. En 2022, il se lance sur le Vendée Globe. Il rachète l’Imoca de Benjamin Dutreux et rejoint l’écurie de Roland Jourdain, qui l’aide à se préparer. Il recrute également Sébastien Audigane comme boat captain et court la saison Imoca 2023 avec Corentin Douguet. Le jeune Breton découvre les hautes vitesses en mer sur un bateau de compétition et trouve vite ses marques pour batailler avec les autres bateaux à dérives.
Tu avais envie d’avoir un bateau rapide. Es-tu satisfait du tien ?
Oui, l’idée, c’était de pouvoir parcourir de nombreux milles, et avec ce bateau, ça se passe bien. Il y a eu beaucoup de travail, et je suis vraiment motivé. Je vais continuer à apprendre pendant le Vendée Globe. J’ai la chance d’être bien entouré avec une super équipe, notamment Bilou, qui a été équipier avec moi sur la Jacques Vabre. J’ai aussi Sébastien Audigane et Corentin Duguet, qui est mon coach et excelle dans le domaine de la performance.
C’est encore de l’aventure ? Ou tu te considères maintenant comme un sportif de haut niveau ?
Oui, on porte la casquette de sportif de haut niveau, mais le Vendée Globe reste avant tout une sacrée aventure. Je vais donner le meilleur de moi-même pour un bon résultat sportif. Gagner ne me déplairait pas, mais l’idée, c’est surtout de prendre du plaisir. Ce que je veux, c’est terminer mon tour du monde, raconter une histoire, rendre mes partenaires heureux, et continuer à faire ce que j’aime. J’ai beaucoup de chance, même si parfois les moyens manquent un peu, ce qui complique les choses. Mais qu’est-ce que j’aime ça, qu’est-ce que je prends de plaisir à naviguer sur ce super bateau
Tu te sens enfermé sur ton bateau ?
Pas vraiment, car il est assez ouvert, contrairement aux bateaux plus récents. C’est un bateau convivial, agréable, avec une casquette coulissante pour fermer. C’est l’un des bateaux les plus ouverts. Mais bien sûr, je passe quand même beaucoup de temps devant la table à cartes. Je ne peux pas dire que j’adore tout à 100%, mais ce qui me plaît, c’est de faire des milles. C’est un bateau qui demande un peu de réflexion stratégique en course, ce n’est pas seulement une question d’aller vite mais de trouver les bonnes stratégies et de faire marcher le bateau intelligemment. L’objectif est de ramener le bateau en bon état.
Ce bateau appartenait à Benjamin Dutreux ?
Oui, Benjamin est un super gars. Je lui ai acheté le bateau, qui était à Port Bourgenay près des Sables d’Olonne, car j’avais un bon feeling avec lui. Son équipe technique est très compétente et m’a mis en confiance. Je suis breton, et même si les gens aux Sables sont gentils, ce n’est pas tout à fait la même mer que chez nous. J’ai préféré ramener le bateau en Bretagne, où la mer me semble plus familière. Déjà, j’ai dû quitter la Bretagne nord pour la Bretagne sud… mais bon, ça reste la Bretagne et un super terrain de jeu ! On ne pouvait pas m’en demander plus (rires).
Tu vas faire la course avec les autres bateaux à dérives ?
Oui, avec Benjamin, Louis Duc, Tanguy, on forme une super petite bande. Dans la Classe Imoca, je m’entends bien avec tout le monde ; les gens sont bienveillants. J’échange beaucoup avec les autres skippers, qui ne sont pas avares de conseils. Je suis d’ailleurs le seul à avoir pris le départ d’une course en Imoca sans passer par d’autres classes, en ayant seulement barré un simple voilier. Ma première course était déjà bien engagée.
Où trouves-tu ton énergie ?
C’est de famille, on est un peu comme ça. On a envie de croquer la vie à pleines dents ! Je ne sais pas si je serai là demain, alors j’essaie de profiter à fond de chaque jour, comme si c’était le dernier. Mais j’ai tendance à vouloir faire trop de choses en même temps, ce qui est un peu mon défaut. Quand on en fait trop, on ne fait pas tout de manière parfaite. Il faut savoir prendre son temps aussi.
Tu défends une cause dans ce Vendée Globe ?
Oui, plusieurs même. Je suis très sensibilisé aux causes des enfants, surtout depuis que j’en ai deux. On a écrit des livres pour enfants, développé un guide pédagogique, et nous intervenons dans les écoles. En Bretagne nord, nous aménageons un hangar pour accueillir des scolaires. À travers mes aventures et mon tour du monde, je veux sensibiliser les enfants, les faire rêver. Aujourd’hui, les actualités sont souvent tristes ; on n’a pas toujours l’occasion de lire des choses positives. Moi, ce que je veux, c’est que les gens sourient en nous écoutant, qu’ils gardent espoir en voyant qu’il y a encore plein de belles choses, et que tout n’est pas perdu.