Un ralentissement devant qui favorise les poursuivants

Akena Vérandas 2012
DR

Pour les deux solistes en tête de course, le Pacifique a troqué les  cuivres symphoniques pour une petite musique de chambre. Le vent, qui a singulièrement molli, ne permet pas d’aller très vite, mais permet à Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) comme François Gabart (MACIF) de recharger leurs batteries avant le dernier tronçon qui les mènera jusqu’au cap Horn. Avec encore près de 400 milles d’avance sur Jean-Pierre Dick, les deux leaders ne sont pas encore sous la menace immédiate de leur premier poursuivant. L’occasion est donc belle pour faire un check-up complet du bateau, engranger quelques heures de sommeil bénéfiques et commencer à se projeter sur le passage du cap Horn, d’ici quelques jours.

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Pas de départ en fanfare pour Bernard Stamm. Le skipper de Cheminées Poujoulat a quitté Dunedin en toute discrétion, après un arrêt forcé et plus de vingt-quatre heures de travail de forçat pour remettre en état son bateau. Les deux hydrogénérateurs sont maintenant en place et le navigateur suisse fait à nouveau route. Bernard attend de vérifier si la charge de ses batteries se fait convenablement, maintenant que les deux hélices sont solidement fixées au tableau arrière du bateau. Du coup, les quelques heures à venir vont sûrement lui paraître longues, en attendant le verdict. Toutes les péripéties de son escale forcée ont fortement entamé le capital sommeil du solitaire qui avouait avoir besoin de dormir, maintenant que le bateau avance sous pilote. Entre la décompression survenant après une forte période d’incertitudes et de tension, et la fatigue physique d’un travail aussi usant qu’ingrat, la perspective d’une sieste réparatrice est plus que bienvenue. 

Pendant ce temps, derrière les deux leaders, tout baigne dans le meilleur des mondes. Jean-Pierre Dick avance à grande vitesse sur une mer qui s’est bien ordonnée, propice aux grandes vitesses. Il manque juste le souffle de vent supplémentaire pour aller titiller la barre des records, mais ce qui est pris n’est plus à prendre. Même son de cloche chez Jean Le Cam. Le skipper de SynerCiel, toujours à l’affût derrière Alex Thomson (Hugo Boss), avouait dans un message à son équipe technique avoir dormi presque huit heures d’affilée. Lui aussi profite d’une mer rangée, d’un vent stable et de la lune qui, chaque nuit, se dévoile un peu plus pour avaler les milles en direction de la porte Pacifique Ouest. Ce trio devrait creuser, au moins provisoirement, les écarts avec le groupe Mike Golding (Gamesa), Dominique Wavre (Mirabaud) et Javier Sanso (Acciona 100% EcoPowered). Les trois sont, en effet, sous la menace d’une petite dorsale anticyclonique qui s’étend progressivement depuis le sud de la Nouvelle-Zélande vers la zone de course. 

La situation fait les affaires d’Arnaud Boissières
Le skipper d’Akena Vérandas revient à grand pas sur ce petit peloton. Il tient actuellement la deuxième meilleure moyenne des dernières vingt-quatre heures, juste derrière Jean-Pierre Dick. Dans son sillage, Bertrand de Broc (Votre Nom autour du Monde avec EDM Projets) est entré à son tour dans le Pacifique. Ils ne sont plus que deux à être encore dans l’Indien, Tanguy de Lamotte (Initiatives-cœur) et Alessandro Di Benedetto (Team Plastique) qui a fêté le passage du cap Leeuwin par un tonitruant air d’opéra. On ne renie pas ses origines d’un trait de plume.

PFB

 Ils ont dit

Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat) : « Je suis reparti. Pour l’instant, j’essaye de charger. Là j’ai juste de quoi faire tourner le pilote. Je suis satisfait de ma réparation. J’ai essayé de réparer ma colonne de winch que j’ai déjà reperdue. A Dunedin, il y avait plusieurs parties abritées. Du coup, si les vents tournent, il suffit de faire 5-6 milles. Il y avait moins de risque pour moi. Je suis usé. Je vais aller dormir parce qu’il faut que je recharge les batteries aussi. »

François Gabart (MACIF) : « Je ne sais pas si c’est rassurant d’être à côté au Horn. Je pense que c’est plus rassurant d’être devant avec 200 milles d’avance mais ça va être sympa. Si on peut faire une différence à n’importe quel moment au niveau de la stratégie, on ne va pas se priver. Je me suis un peu renseigné sur les lieux. Ça fait partie des endroits symboliques et je pense que ça sera un super moment de navigation. »

Arnaud Boissières (AKENA Vérandas) : « Jusqu’au cap Horn, je veux réduire l’écart. Je vais essayer d’attaquer Javier. Je suis bien sur mon bateau, on verra comment ça se passe après le cap Horn. Il y a des icebergs assez proches donc il faudra faire attention. Mais bon, ce n’est pas tout de suite, ça a le temps de changer. »

Tanguy de Lamotte (Initiatives-cœur) : « Ce matin, je me suis dit que ça serait une bonne journée pour se laver les cheveux. Ça réveille bien. Je savais que je n’avais pas de manœuvre du coup, j’ai vraiment profité de ce réveil. J’essaye de dîner en début de nuit car ça aide à se réchauffer. Après le déjeuner, j’essaye de faire une petite sieste. Je fais le point sur la météo le matin, puis j’adapte ma vie à bord ensuite. Ça conditionne un peu ma vie sur le bateau après. »

Classement de 16h
 1         Armel Le Cléac’h Banque Populaire à 8659.0 nm
 2         François Gabart Macif à 1.1 nm
 3         Jean-Pierre Dick Virbac Paprec 3 à 385.3 nm
 4         Alex Thomson Hugo Boss à 833.7 nm
 5         Jean Le Cam SynerCiel à 1826.1 nm
 6         Mike  Golding Gamesa à 2245.2 nm
 7         Dominique Wavre Mirabaud à 2261.4 nm
 8         Javier Sanso Acciona à 2598.0 nm
 9         Arnaud  Boissières Akena Verandas à 2812.2 nm
 10       Bernard Stamm Cheminées Poujoulat à 2877.5 nm