Tu as hésité avant de te lancer dans un quatrième Vendée Globe. Qu’est-ce qui a fait pencher la balance ?
Bertrand de Broc : « Il est vrai qu’à mon retour du dernier Vendée Globe, je n’étais pas forcément prêt à repartir. Mon projet était plutôt d’épauler un jeune coureur. Mais mon nouveau partenaire voulait que je prenne le départ et il m’a offert de bonnes conditions pour partir une quatrième fois. D’ici au Vendée Globe, le bateau va beaucoup évoluer. L’idée générale, c’est de gagner du poids et de la vitesse pour me sentir sur un nouveau bateau. Lors d’un premier chantier, qui durera jusqu’à fin juillet 2015, nous allons effectuer une révision générale et simplifier l’accastillage. En fin d’année, après la Transat Jacques Vabre, MACFS entrera à nouveau en chantier pour changer tout le système de safran, recevoir de nouvelles voiles et peut-être un mât neuf. Si nous en avons le temps et les moyens, nous travaillerons aussi sur la quille.»
L’ajout de foils est une option envisageable ?
BdB : « Non, les foils ne m’intéressent pas. Mon bateau n’est pas fait pour. Ces appendices coûtent cher et demandent un important travail de mise au point. On ne sait même pas si ça marchera d’ailleurs. Je n’ai rien contre la technologie, sauf quand elle implique une sélection par l’argent et est réservée à une caste. En faisant évoluer les bateaux trop vite, on créé un grand fossé entre les très bons bateaux qui sortent de chantier et les IMOCA existants. Alors qu’il faudrait à l’inverse faire progresser tous les bateaux ensemble… On s’enflamme avec les foils qui n’ont pas grand intérêt en monocoque. Si on veut voler, il faut faire du multi ! J’ai été conquis par la Cup car on voit les régates du début à la fin, c’est spectaculaire. Mais durant le Vendée Globe, personne ne verra le bateau sur ses foils dans les mers du Sud ! J’ai l’impression qu’on ne savait plus comment faire parler des marins et qu’il fallait trouver autre chose pour créer le buzz. »
Tu penses que l’on parle trop de technologie et pas assez d’humain ?
BdB : « Oui. Le Vendée Globe a besoin de parler d’autre chose que de technologie. Les performances du bateau intéressent une petite catégorie de gens. Ce qui passionne le grand public c’est bagarre entre des coureurs, l’aspect humain. Ce n’est pas un hasard si Tanguy de Lamotte et Alessandro di Bendetto ont bénéficié d’excellentes retombées lors du dernier Vendée Globe. »
Quel sera ton objectif sportif en 2016/2017 ?
BdB : « Le plateau n’étant pas complet, je préfère annoncer un temps plutôt qu’une place. J’ai été honnête avec mon sponsor : je ne vais pas exploser les compteurs. Le but, c’est d’améliorer d’une semaine ma performance de 2012/2013, et donc de terminer en 85 jours, voire mieux si possible. Si j’arrive à faire tous les travaux prévus, le bateau gagnera en vitesse et je pourrai atteindre cet objectif. Et il y aura probablement une course dans la course avec les autres bateaux de 2008. J’aurai aussi à cœur de raconter une belle histoire. »
Quel sera ton programme de courses d’ici au Vendée Globe ?
BdB : « Ma première course sera la Rolex Fastnet Race en août. Puis je participerai au trophée Azimut fin septembre à Lorient. Le grand objectif de la saison sera la Transat Jacques Vabre (départ le 25 octobre du Havre) avec un co-skipper que je n’ai pas encore choisi. En mai-juin 2016, je tenterai de battre le record de l’Atlantique Nord en solitaire en monocoque (détenu par Marc Guillemot en 8 jours et 21 heures, NDLR). Ce sera un super entraînement avant le Vendée Globe. »
Quel est ton regard sur le circuit IMOCA dans son ensemble ?
BdB : « Il est incomplet, on pourrait faire beaucoup mieux. Début avril, j’étais à Marseille pour la SNIM. J’ai senti une demande des gens sur place, ils veulent voir nos bateaux. Pourquoi ne pas créer un événement en Méditerranée ou même s’ajouter à des courses existantes ? Cela me semble plus important que de parler de foils… Il ne faut pas que les IMOCA restent au garage, on doit les montrer au plus grand nombre. Nous avons de la chance d’avoir des budgets et de pouvoir naviguer sur de si beaux bateaux. A nous coureurs de nous prendre en main. Des teams construisent des 60 pieds seulement pour le Vendée Globe, ce n’est pas bon pour la classe. »
Source : Vendée Globe