
Sixième jour de course, François Gabart (Macif) et Thomas Coville (Sodebo) naviguent dans des conditions de rêve et entament leur remontée vers l’arrivée. François Gabart (Macif), qui a pris les devants à la faveur d’un léger décalage dans le contournement de l’anticyclone et plus rapide de 5-6 nœuds affiche désormais 143 milles d’avance sur son poursuivant immédiat et 265 milles sur Yves Le Blevec (Actual). Ce dernier, aux premières loges pour apprécier la bataille navale qui oppose ses prédécesseurs, ne démérite pas sur cette première course en solitaire à bord d’un engin de 30 mètres de long. Il peut d’ailleurs se féliciter de reprendre du terrain sur une route un peu plus courte qui lui permet de ne rien lâcher à la barre de son trimaran plus ancien et moins véloce.
Pour tous les dix-huit concurrents des trois autres classes, le passage de la dernière tempête qui a affolé les speedomètres (rafales à près de 60 nœuds) et levé une mer démontée (jusqu’à 7 mètres de creux), la Transat Anglaise a pris une nouvelle tournure. « Il y a un avant et un après », comme le confirme Thibaut Vauchel Camus (Solidaires en peloton-Arsep) : « Il y a un avant, un pendant et un après pour tout et en particulier dans le cas de figure de cette belle dépression. Elle était annoncée costaud, alors on révise un peu sa trajectoire pour l’appréhender du meilleur côté (ou du moins pire… ), on fait le tour du bateau, du rangement, on prend des forces, on s’habille en conséquence et on y va ! Elle a tenu ses promesses (elle au moins !! ) avec un peu de rab même ! Un peu comme chez le boucher/charcutier : “il y en a un peu plus, je vous le laisse !” 45 noeuds annoncés ? Je confirme, ils étaient bien là, avec le “un peu plus”. J’ai vu à deux reprises 58 noeuds en rafale. Ça commence à causer et forcément ça remet un peu en cause la préparation de l’avant ! Bon ben maintenant qu’on y est matelot, y a plus qu’a tenir la barre et le flot, qui lui se tenait autour de 4 à 5 mètres de creux dans les plaines ! Ce combiné a tout simplement permis d’exploser le record de vitesse du bateau qui était de 24,5 noeuds à maintenant 27,2 noeuds. Je vous assure que je vais très bien m’en contenter sans chercher à le battre ! Trop de paramètres inconfortables.
Et donc aujourd’hui… Mauvaise surprise au lever du jour avec 30 à 40 noeuds de vent, il s’avère que la grand-voile a un peu souffert. Ce qui n’est pas vraiment étonnant quand un bateau de 5 tonnes lancé à plus de 20 noeuds dans une vague s’arrête dans le fond de la cuvette avec le cul qui décolle presque de l’eau… Forcément, faut bien que l’énergie passe quelque part… Les conditions (mer et vent) interdisent tout projet de réparations. Il faut attendre que ça mollisse… C’est donc à 13h TU que dans 25 noeuds je saisis l’occasion d’affaler la GV ce qui m’a pris 1h15, 3h pour réparer, 30 mn pour la re-hisser et 10 jours à espérer que ça tienne ! Ça a donc été une journée quasiment sans grand-voile, ce qui explique la petite perte de terrain sur Phil, Louis et Isabelle qui font une très belle course. La bataille va être belle ! Moralité : plus il y a d’avant moins il y a d’après et le milieu est plus savoureux ! »
Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) conforte lui son avance chez les IMOCA mais cela devrait revenir derrière où Vincent Rioi et Jean-Pierre Dick restent en embuscade.
Armel Le Cléac’h (IMOCA-Banque Populaire) : « Cette Transat bakerly est assez engagée dans ses transitions météo. On a eu un passage assez délicat avec un vent qui est passé de Sud-Est à Nord Ouest en 2 milles. La mer était chaotique. C’était assez sport. On est passé de tribord amure sous gennaker à babord amure sous trinquette. C’est sport sur ces bateaux. Le vent est assez instable. Il y a des moments où ça mollit bien. J’ai le petit plus qui me permet de mettre des milles mais Vincent s’accroche. Ça sera compliqué jusqu’au bout. Il est coriace. »
Du côté de la Class40, une chose est sûre, un petit groupe de quatre bateaux, qui a cherché son salut au Nord de ce virulent système, sur sa face où il était supposé être le moins hargneux, se détache. Force est de constater que Phil Sharp (Imerys) et ses poursuivants, qui connaissent tous leur lot de pépins (problème de grand voile pour Thibault Vauchel Camus, pénalité de 6 heures pour Phil Sharp qui a traversé le DST d’Ouessant la première nuit de course, etc.), la course repart de plus belle. Au sein de ce carré d’as, réuni en 50 milles alors qu’il reste plus de 1900 milles et dix bonnes journées de mer pour rallier New-York, la bataille promet de redoubler d’intensité.
Pas de chance en revanche pour Armel Tripon (Black Pepper / Le Ptits doudous par Moulin Roty), particulièrement malmené dans la tempête. Il se déroute vers Açores pour réparer la somme de soucis techniques qui s’accumulent (problème d’aérien, voile déchirée et souci de recharge d’énergie) et ne lui permettent plus d’espérer traverser en toute sécurité. Il espère rallier Horta demain matin.
Enfin, chez les Multi50, c’est au niveau de la stratégie que la course promet de maintenir le suspense avec deux duels par routes opposées et interposées. Les dernières heures de course sont marquées par le changement de leader dans cette catégorie. Gilles Lamiré (French Tech Rennes Saint-Malo) – qui a parcouru 473 milles ces dernières 24 heures contre 205 milles pour Lalou Roucayrol qui se bat comme un beau diable sur la route cabossée par le passage de la dépression – a logiquement pris les devants. Preuve s’il en est que le débat Nord/Sud, même dans le contexte de cette Transat bakerly pleine de surprises et de rebondissements, est finalement toujours d’actualité.
ESTIMATION DES HEURES D’ARRIVEES
Macif Mar. 10 Mai 19:00 Mer. 11 Mai 01:00
Sodebo Mer. 11 Mai 03:00 Mer. 11 Mai 09:00
Actual
Jeu. 12 Mai 03:00 Jeu. 12 Mai 09:00
MULTI 50
Arkema Ven. 13 Mai 03:00 Ven. 13 Mai 09:00
French Tech Rennes Saint Malo
Sam. 14 Mai 00:00 Sam. 14 Mai 00:00
IMOCA
Banque Populaire Sam. 14 Mai 07:00 Sam. 14 Mai 13:00
PRB Sam. 14 Mai 14:00 Sam. 14 Mai 14:00
St Michel Virbac
Sam. 14 Mai 22:00 Sam. 14 Mai 22:00
CLASS40
Imerys
Mer. 18 Mai 22:00 Jeu. 19 Mai 04:00
PENDUICK
Pen Duick II nc nc
CLASSEMENT PROVISOIRE
Classements provisoires, le 8 mai à 4h GMT +1 :
Ultimes
1. François Gabart (Macif), à 1 119 milles de l’arrivée
2. Thomas Coville (Sodebo), à 142 milles
3. Yves Le Blevec (Actual), à 265 milles
IMOCA
1. Armel Le Cléac’h (Banque Populaire), à 1 522 milles de l’arrivée
2. Vincent Riou (PRB), à 43 milles
3. Jean-Pierre Dick (St-Michel Virtbac), à 130 milles
MULTI50
1. Gilles Lamiré (French Tech – Rennes St Malo), à 1 696 milles
2. Lalou Roucayrol (Arkema), 56 milles de l’arrivée
3. Pierre Antoine (Olmix), à 226 milles
CLASS40
1. Phil Sharp (Phil Sharp Racing), à 1918 milles de l’arrivée
2. Isabelle Joschke (Generali – Horizon mixité) à 16 milles
3. Thibault Vauchel-Camus (Solidaires en Peloton – ARSEP) à 19 milles