Premier tiers de course et choix à faire

Jourdain Véolia
DR

C’est un peu tôt pour payer ses impôts, mais chaque solitaire a déjà mis son écot dans la tirelire de l’océan Indien : même le leader Jean-Pierre Dick (Paprec-Virbac 2) a indiqué le week-end dernier, qu’il avait cumulé un gennaker à l’eau et un grand vrac… Tous ou presque sont passés par une figure libre qui coûte très cher en termes de temps, mais surtout au niveau physique et mental, et même certains comme Dee Caffari (Aviva) ou Vincent Riou (PRB) se sont légèrement blessés, la première au genou, le second au pied. La taxe de séjour dans les mers du Sud est plus ou moins lourde et il y en a encore pour trois semaines à ce rythme ! Mais à l’occasion d’un ralentissement passager consécutif au passage d’une dorsale anticyclonique, le tempo a légèrement changé car les tentatives successives d’appuyer sur l’accélérateur dès le départ des Sables d’Olonne (Peyron, Josse, Eliès, Dick, Desjoyeaux, Stamm…), n’ont pas toutes porté leurs fruits et ont surtout eu pour conséquence, un affaiblissement physique général et probablement passager.

Prendre l’ascendant dans la descente

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En cherchant à prendre l’ascendant à différents stades de ce premier tiers du parcours, certains solitaires ont tiré sur la ficelle de la forme physique ! Or le moral est toujours plus sensible quand l’état de fatigue, le froid, le gris du ciel, l’humidité constante, la veille dans le cockpit et les difficiles déplacements sur le pont, deviennent une constante… Sans que le rythme ne soit fondamentalement ralenti, l’ambiance n’est plus à la prise de risque, à l’envie de faire le break, à la volonté de marquer son territoire. Priorité à la remise en forme tout en conservant des vitesses suffisantes pour ne pas se faire décrocher, ni trop inquiéter. Et surtout, il y a une donnée très importante à prendre en compte dès ce soir : le passage des Kerguelen ! Il faut rester très vigilant, donc très anticipateur pour affiner la trajectoire et ne pas se retrouver coincé dans le passage finalement assez étroit (230 milles) entre l’archipel austral et l’île Heard (marque de parcours à laisser à tribord).

Car dans ces contrées, ce ne sont pas les dévents des reliefs qui gênent (a contrario des Canaries ou du Cap Vert), mais le plateau continental qui déborde largement (150 milles au Nord des Kerguelen, 80 milles au Sud) et génère une mer très chaotique, anarchique, imprévisible. Or pour passer dans ce " couloir " peu recommandable, il va falloir descendre sous le 50° Sud… Ou alors, bifurquer la nuit prochaine pour contourner l’archipel par le Nord : un léger rallongement de la route (environ 50 milles), mais une solution plus " safe ", loin des risques de glace, moins pointue car plus ouverte en termes de choix stratégiques.

Dispersion ou regroupement ?

Or en ce mardi après-midi, à un peu plus de 800 milles de ces abords redoutables, le choix doit impérativement se faire avant demain mercredi matin… Au risque de se retrouver piégé, à enclencher des empannages dans la brise sur une mer démontée, à tirer un bord catastrophique dans une bascule trop prompte ou trop tardive, à descendre encore plus Sud que la latitude de l’île Heard (53°S) pour profiter d’une rotation de la brise. Toutes choses qui peuvent se transformer très rapidement en vrac par 5°C, en fatigue supplémentaire, en avarie ! Or en ce mardi après-midi, seul Yann Eliès (Generali) semble se maintenir sur une route Nord. Au sein du groupe de tête, Sébastien Josse (BT) replonge au Sud-Est pour aller contrôler le leader, Jean-Pierre Dick et Roland Jourdain (Veolia Environnement), le plus au Sud.

Les dix premiers sont modérément rapides dans un flux de secteur Nord-Ouest entre 15 et 20 nœuds, alors que leurs quatre poursuivants ont remis du charbon grâce à un front générant du Sud-Ouest 20-25 nœuds : Marc Guillemot (Safran), Dominique Wavre (Temenos II), Brian Thompson (Bahrain Team Pindar) et Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat) ont tout intérêt à pousser leur machine pour profiter de cette situation très éphémère. Le gain ne devrait pas dépasser une cinquantaine de milles d’ici le milieu de la semaine, mais c’est toujours bon à prendre quand les " chassés " ont un petit coup de mou, mou de vent, de forme, voire de mental… Ce premier tiers du parcours laisse donc prévoir une suite tout aussi exaltante !

Classement du mardi 9 décembre à 16h00 :
1- Jean Pierre Dick (Paprec-Virbac 2) à 16 300,9 milles de l’arrivée
2- Roland Jourdain (Veolia Environnement) à 30,7 milles du leader
3- Sébastien Josse (BT) à 31,3 milles
4- Loïck Peyron (Gitana Eighty) à 50,4 milles
5- Mike Golding (Ecover 3) à 75,9 milles

Sélection internationale :
12- Dominique Wavre (Temenos II) à 308,9 milles
13- Brian Thompson (Bahrain Team Pindar) à 548,7 milles
14- Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat) à 588,3 milles
15- Samantha Davies (Roxy) à 597,8 milles
16- Dee Caffari (Aviva) à 758 milles