PRB réclame 750 000 euros au Vendée Globe

PRB - Vincent Riou / VG
DR

L’entreprise vendéenne PRB (qui, pour mémoire, a gagné deux fois le Vendée Globe en 2001 et 2005) a donc entrepris une action pour réclamer à  la SEM Vendée organisatrice du Vendée Globe, la réparation des dommages subis par son bateau (démâtage) et le coût de son rapatriement depuis le Chili, pour un montant qu’elle estime à 750 000 euros. 

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On se souvient que le bateau de Vincent Riou s’était dérouté à la demande de la direction de course pour sauver Jean Le Cam, prisonnier de son bateau retourné au large du cap Horn – opération réussie mais dans laquelle PRB  avait cassé un outrigger, puis démâté. Vincent Riou avait donc avait du abandonner et PRB était pris en remorque vers le Chili. Côté sportif, l’épisode avait donné lieu à une décision déjà inédite, à savoir le classement à la troisième place ex-aequo de Vincent Riou au titre de la “réparation donnée”.

De Villiers : “l’esprit du Vendée Globe en péril”

Aujourd’hui donc, c’est d’argent que l’on parle. Selon l’AFP, des experts représentant les deux parties ont été nommés pour estimer avec précision le montant des dégâts. C’est la première fois qu’une telle plainte est enregistrée sur le Vendée Globe. Et cela ne fait pas franchement plaisir à Philippe de Villiers, président de la SEM Vendée, la société organisatrice du Vendée Globe. Dans un communiqué, Philippe de Villiers a réagi en ces termes :  “Lorsque Jean Le Cam s´est trouvé en grand péril au large du Chili, Vincent Riou, le skipper de PRB, s´est spontanément porté à son secours, respectant la loi fondamentale de l´entraide entre les marins. Si l´action de PRB devait aboutir, cela mettrait en péril l´esprit du Vendée Globe et de la course au large, car cela laisserait entendre que Vincent Riou n´aurait pas dû porter secours à Jean Le Cam. Les conséquences seraient dramatiques, toute personne en mer devrait désormais y réfléchir à deux fois avant d´aller secourir un naufragé.”

Déclaration de la société PRB :

“Engagée depuis 1992 dans la course au large, PRB a armé plusieurs bateaux qui ont glané des victoires mais aussi subi plusieurs avaries graves notamment dans le cadre du Vendée Globe. PRB a toujours assumé ces coûts, souvent non couverts par des assurances, sans jamais remettre en question son engagement dans la voile. Engagement qui s´est même traduit par une prise de participation financière significative avec d´autres entreprises vendéennes dans la SAEM Vendée Globe afin que celle-ci puisse assurer la pérennité de l´épreuve suite aux problèmes rencontrés par l´ancien propriétaire de celle-ci. PRB a donc toujours pris ses responsabilités en étant depuis 17 ans un acteur solide du circuit Imoca et du Vendée Globe avec une passion pour la mer et les marins que savent bien tous ceux qui connaissent Jacques Laurent, créateur de PRB, et Jean-Jacques Laurent, PDG de l´entreprise.

Mais PRB s´est retrouvé au début de l´année face à une situation inédite dans la course au large : son monocoque a subi une avarie de gréement lors du sauvetage de Jean Le Cam par Vincent Riou, cette avarie entrainant quelques heures plus tard le démâtage de PRB. L´entreprise a dit à l´époque sa fierté du geste accompli par Vincent et elle maintient aujourd´hui ces propos. La solidarité en mer ne se discute pas, imaginer l´inverse est contraire à l´éthique de PRB.

Mais il y a une autre réalité : PRB s´est aussi trouvé devant les lourdes conséquences financières de l´opération. Soit une somme estimée par l´entreprise à 750 000 euros qui constitue strictement le débours occasionné par l´avarie et ses suites (mât, gréement, voiles, avaries causées par le démâtage, rapatriement, etc…) et en aucun cas un manque à gagner. Or ces avaries n´ont pu être prises en charge par l´assureur du bateau qui ne couvre, comme pour la majeure partie des monocoques IMOCA, que la perte totale. Responsable de la bonne marche d´une entreprise qui emploie aujourd´hui 350 salariés, Jean-Jacques Laurent a estimé que si la solidarité était évidente dans un sens, elle pouvait aussi avoir lieu dans l´autre et que l´armateur du bateau sauveteur ne pouvait être le seul à payer le coût du sauvetage. Malgré différentes démarches engagées par PRB, aucune solution n´a été alors trouvée pour que ce coût soit pris en charge par les assurances RC des parties éventuellement concernées. Dès lors, il ne restait plus qu´à entamer une procédure juridique de recherche en responsabilité.

Il convient à ce stade d´être précis. Mené par Maître Jean-Jacques Ollu pour le compte de PRB, cette procédure n´en est pas aujourd´hui au stade d´une mise en cause de quiconque. Il ne s´agit pour l´heure que d´une procédure classique pour estimer le coût réel et définitif des dommages. Pour cela, PRB et Vincent Riou ont sollicité la nomination d´un expert et « fait valoir qu´il est utile que cette mesure se déroule en présence », pour reprendre les termes du référé, des différents acteurs concernés par la question : SAEM Vendée, Ambrose Light (société du directeur de course), la société Mer Vent (armateur du navire VM Matériaux), Jean Le Cam et l´assureur en Responsabilité Civile du bateau VM Matériaux. En réponse, Jean le Cam et la société Mer Vent ont accepté cette demande. A l´inverse la SAEM Vendée a répondu par la négative et estimé ne pas avoir à être « sollicité pour la mise en œuvre des constatations ». Le Tribunal de Grande instance de Quimper, saisi du dossier, a estimé que ce n´était pas justifié et que la SAEM Vendée devait participer, comme les autres parties, aux constatations confiées à l´expert désigné. 
 
Il n´y a donc pas aujourd´hui, pour reprendre un terme juridique, « une action au fond » engagée, autrement dit un procès ou une mise en accusation. Cette décision, et la question de savoir à l´encontre de qui elle pourrait se porter, n´a pas été prise à ce stade par PRB et son avocat. Il est donc difficile et incompréhensible pour l´instant de commenter ou interpréter une action non entreprise et a fortiori son résultat !            
                 
PRB est conscient de l´émotion suscitée par cette procédure même si, en grande partie comme on vient de le voir, son interprétation ne correspond pas à la réalité juridique actuelle. Mais la société vendéenne tient également à dire qu´elle a le seul tort de se retrouver dans une situation inédite et heureusement exceptionnelle qu´aucun armateur, fusse-t-il un mécène, ne pourrait prendre à la légère. Cette situation  mérite donc une réponse claire pour l´avenir et la pérennité d´un sport auquel PRB tient profondément. De cette façon, il sera possible, quelque soit la  réponse, de prendre à l´avenir les dispositions ad hoc en terme d´assurances.

Déclaration de Vincent Riou :

« J´approuve la démarche entreprise par PRB même si je ne suis pas directement concerné par les dommages. D´abord, il me parait normal que l´armateur du bateau sauveteur ne soit pas seul dans ce cas à payer le coût occasionné par une opération de ce type. Heureusement, on n´a jamais eu à s´interroger sur des conséquences de ce type dans la course au large mais imaginons que cela survienne à un skipper armateur qui ne dispose pas de l´assise financière d´un sponsor, on voit bien que le problème pourrait être bien  plus grave… C´est bien sûr une situation exceptionnelle. Il faut donc une réponse qui permettra ensuite de savoir quelle RC d´assurance devra l´anticiper et je pense du coup que chacun aura l´esprit plus libre au moment de déclencher une opération de sauvetage : les bateaux concernés, l´organisateur, etc… A terme, ce sera un bien pour tout le système car un vide juridique ne peut le rester.  Je comprends que cela apparaisse matériel aux yeux de certains, mais je demande à chacun de réfléchir : une fois l´émotion et le geste nécessaire accompli, qui aurait envie de se retrouver ensuite dans la peau de celui qui doit assumer seul un tel coût ? Quoi qu´il en soit, je tiens à dire évidemment que je recommencerais cent fois ce que j´ai fait, ce n´est évidemment pas cela qui est mis en cause ».”