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Une flotte compacte …

Alignés
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Cette nuit, la flotte a continué sa progression à 7-8 nœuds de moyenne, vent de travers, bâbord amure. Les 44 solitaires sont encore groupés (5,4 milles du premier au dernier) et naviguent au large de Groix, décalés au vent de la route directe. Quelques options se dessinent ou plutôt quelques choix de placement. L’écart entre le bateau le plus à la côte (Gildas Morvan, Cercle vert) et celui le plus au large (Christophe Lebas, Armor Lux) se monte à 12 milles, mais pour l’heure, ce ne sont pas les axes latéraux qui payent.
 
A 400 milles de l’arrivée, Armel Le Cléac’h (Brit Air) pointe en tête, talonné à son vent par le bizuth Erwan Israel, successeur de Jérémie Beyou sur Delta Dore. Thierry Chabagny, le skipper de Littoral, 2e du classement général, est toujours là aussi, en 3e position, à 0,4 mille de Le Cléac’h. La liste du top 5, complétée par Jeanne Grégoire (Banque Populaire) et Kito de Pavant (Groupe Bel) tient en… 900 mètres d’écart au but. Nicolas Troussel (Financo), le très solide leader du classement général est toujours dans le coup, à un mille de la tête de course.
 
Cette route sur un seul bord vers Ouessant, que les concurrents devraient atteindre samedi dans l’après midi, est animée par des passages de grains et un trafic maritime intense avec de nombreux bateaux de pêche qui circulent la zone. Vendredi en fin de journée, les solitaires ont même croisé le 60 pieds open de Marc Guillemot, ainsi que le trimaran Gitana XI, venus à leur rencontre.
 
Au petit matin, le vent a molli et la flotte est peut-être sur le point de vivre un des premiers moments clés de cette étape avec plusieurs bascules de vent prévues dans les heures qui viennent et qu’il faudra négocier. Pour l’instant, sous la nuit étoilée et dans un froid qui se fait plus mordant, les marins restent concentrés sur leurs réglages.

Messages de la nuit
Christian Gout, à bord du bateau Direction de Course à 4h52 ce matin :
« Ralentissement. Le vent a molli, autour de 8 noeuds. Direction : 240° environ. Mais ça bouge toujours avec 8/15 noeuds et plus dans les grains …Toujours bâbord amure au reaching à jongler entre écoute de génois et short sheet. La mer est plus plate. La flotte s’étire gentiment du nord au sud. Gildas (Morvan) toujours dans le nord, Christophe (Lebas) au sud a trouvé quelques copains pour l’accompagner. Un joli croissant de lune nous accompagne. C’est humide avec les grains et un peu frais, peut-être un avant goût d’Irlande. »
 
Jean Yves Chauve à bord du bateau médical :
« Nuit tranquille à bord de Médical. Le ciel s’est bien dégagé laissant apparaître des milliers d’étoiles. Comme chaque année la terre traverse le nuage des Ephéïdes, zone d’astéroïdes qui, en percutant l’atmosphère, provoquent ces magnifiques étoiles filantes qui, au-delà du spectacle, vont combler tous nos vœux. Il commence à faire froid et on imagine les coureurs emmitouflés dans leur cockpit et profitant de ces conditions stables pour emmagasiner du sommeil. Ils doivent toutefois rester vigilants car le trafic maritime est intense. Certains marins-pêcheurs ne semblent pas bien comprendre les conditions de navigation des skippers comme en témoignent les dialogues saisis à la VHF. Yann Elies a dû éviter de justesse un bateau avec apparemment personne à la passerelle. »

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Tout droit vers Les sables

mini les sables
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Les leaders de la première étape jouent de nouveau les éclaireurs : huit prototypes sont roue dans roue et cinq voiliers de série se sont échappés. Le peloton est déjà à plus de quinze milles, voire à trente et plus. Karen Leibovici (Tam Tam) ferme la marche des prototypes à plus de 110 milles du leader slovène et les deux solitaires revenus à Horta pour réparer, Pierre Brasseur (Peintures Ripolin) et Hugo Ramon (Emotion), naviguent à plus de 130 milles du premier voilier de série, Thomas Bonnier (architecture élémentaire) ! Alors que la flotte a encore plus de 1000 milles à parcourir jusqu’aux Sables d’Olonne et que Horta n’est qu’à 200 milles derrière…

En tête, Andraz Mihelin (Adria Mobil Too) après être passé au Nord de l’île de Graciosa dans la nuit du départ, a choisi de laisser courir dans le vent de secteur Nord, huit à douze nœuds qui sévit actuellement sur la zone : il se retrouve donc le plus au Sud avec Peter Laureyssens (Ecover) et son compatriote Kristian Hajnsek (Adria Mobil) sur la même trajectoire dans son tableau arrière. Alors qu’à une vingtaine de milles dans son Nord, un groupe compact comprend Adrien Hardy (Brossard), Jérôme Koch (Meteor), Isabelle Joschke (Degrémont), Xavier Haize (Carben Composites) et François Salabert (Aréas Assurances). Un chassé-croisé en plein milieu de l’Atlantique. Tous suivent un cap compris entre 60° et 80°, ce qui devrait disperser ce groupe en latitude ces prochains jours. Les uns choisissent de faire route un peu en dessous pour privilégier la vitesse (6,5 nœuds au 75°), en espérant que la brise va encore tourner au secteur Nord Ouest : l’idée est alors de faire la « cuillère espagnole » par le Sud en se recalant au niveau du cap Finisterre. Les autres optent pour faire du cap (6 nœuds au 60°) afin de grappiller des milles dans le Nord pour terminer le parcours sans approcher les côtes ibères : une « louche bretonne » pour profiter de brises thermiques avant d’aborder la Vendée.

Cuisine météorologique

Car le vent s’est bien stabilisé en direction, même s’il a molli et qu’il tendra encore à diminuer à l’avenir : la dorsale anticyclonique s’installe doucement en recouvrant les solitaires. Les skippers anticipent donc sur ce qui va se passer en abordant le golfe de Gascogne : du vent mou, voire des calmes et une brise qui peut aussi bien rentrer de l’Ouest le long des côtes bretonnes, et de l’Est près des rivages ibères. Un régime minceur de toutes façons qu’il va falloir cuisiner… à la table à cartes en épluchant les bulletins météo !

Même motif, même punition pour les voiliers de série si ce n’est qu’ils ne sont que cinq à avoir fait le break : Thomas Bonnier construit méthodiquement son avance avec Vincent Barnaud (STGS.fr) dans ses basques ainsi qu’avec l’étonnant Bertrand Castelnérac (Alan France) qui fait marcher remarquablement son vieux Pogo 6.50, le jeune Thibault Reinhart (Les blouses roses-Colas) et l’animateur nordiste de la première étape, Hervé Piveteau (Jules). La différence en latitude est même supérieure à 80 milles entre le partisan du plus au Sud, Antoine Debled (ADD Modules) et les deux « Islandais » décalés dans l’extrême Nord, Gerard Marin (Escar l’escarla-CN Llanca) et Dominik Zurrer (Ubik 245).

Là encore, les écarts vont augmenter au fil des heures car ce groupe naviguent à plus de 5,5 nœuds de moyenne tandis que les retardataires peinent à 4 nœuds… Tout comme les prototypes où le différentiel entre ouvreurs et « fermeurs » de marche atteint plus d’un nœud ! Et la situation ne va qu’empirer puisque les calmes arrivent par derrière… A ce rythme, il faut compter neuf jours de mer au moins pour les premiers (soit une arrivée vers le 25-26 août) et deux à trois jours de plus pour les retardataires (soit vers le 28-29 août). Les organisateurs de la course Les Sables-Les Açores-Les Sables ont d’ailleurs décidé de reculer la remise des prix au 29 août au soir pour accueillir tous les concurrents.

Source: Les sables – Les açores – Les Sables

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Départ en peloton vers l’Irlande

passage bouée 3ème étape
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Ce matin au ponton de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, les skippers sont arrivés au compte goutte, retardant au maximum l’heure de quitter le plancher des vaches. La deuxième étape a laissé des traces sur les visages, sur le moral de certains aussi, mais avec un peu de méthode Coué et la volonté affichée de tourner la page, les discours de nos marins se voulaient positifs. Sûr qu’ils auraient bien passé une nuit de plus à terre. Pourtant, il va falloir tenir bon pendant cette remontée de l’Atlantique qui promet d’être agitée.

Pellecuer en tête à la bouée Radio France

Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec) est le premier à larguer les amarres et à emprunter le chenal de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, applaudi par un public nombreux posté aux abords du village de la course. Dehors, sous les rais de lumière, la mer est d’un vert émeraude, une houle d’un mètre secoue les bateaux qui s’élancent en ligne à 13h00, dans un vent de sud-ouest de 15 nœuds. Le ciel perturbé passe du bleu au gris avant de se charger de grains qui ne tardent pas à s’abattre sur la flotte… comme un avant goût d’Irlande.

Fred Duthil (Brossard), bien inspiré sur la ligne de départ, enroule en tête la bouée de dégagement, mais c’est Laurent Pellecuer (Cliptol Sport) qui prend l’avantage 12 milles et 1h30 plus tard à la marque Radio France, sous l’île d’Yeu. Le Méditerranéen, vainqueur l’année dernière en Irlande, se réjouissait de son entrée en matière : « C’est génial. C’est trop bien de passer cette bouée en tête, c’est de bon augure. Je me sens libre devant et j’ai choisi ma route.»

Derrière, au débridé, à 8 nœuds de moyenne, Jeanne Grégoire (Banque Populaire), Armel Le Cléac’h (Brit Air), Fred Duthil (Brossard), Gildas Morvan (Cercle Vert) et Marc Emig (A.ST Groupe) lui emboîtaient le pas.

Sur un bord jusqu’à Ouessant

Les marins vont profiter de ces premières heures de navigation. Le vent de sud-ouest (15 nœuds), travers aux bateaux, va leur permettre de tracer la route sur un seul bord (bâbord) jusqu’à Ouessant, à des vitesses plus qu’honorables. Ils y sont attendus dimanche. « Le bateau avance vite, les voiles sont ouvertes, c’est puissant. Ca nous permet de progresser sur la route », continuait Pellecuer. Gildas Morvan avait même tenté d’envoyer le spi, mais sans succès. Jeanne Grégoire, quant à elle, comptait profiter de ces conditions agréables pour aller dormir. Pourtant, il faut dès maintenant choisir son camp, au vent ou sous le vent de la flotte, pour anticiper le passage à la pointe de la Bretagne qui s’annonce délicat avec une zone de vent mou et perturbé. Entre ceux qui auront choisi de ‘pointer’ davantage et ceux qui se laisseront glisser en accélérant, le verdict sera donné dimanche.

Une course d’endurance

Ensuite, la remontée vers l’Angleterre pourrait se corser au passage d’un front. Les skippers se sont préparés à affronter ce long épisode de navigation au près, dans du vent plus fort et une mer difficile. « A priori, on risque d’avoir 300 milles de près et c’est à celui qui tiendra le plus longtemps à la barre » annonçait Oliver Krauss (AXA Plaisance) ce matin. Franck Le Gal (Lenze) : « ça va bouger, ça va taper et il y aura une sélection naturelle qui s’opèrera avec ceux qui vont baisser les bras ".

Les skippers les plus expérimentés et ceux qui auront réussi à bien gérer leur sommeil sortiront certainement gagnants de cette course d’endurance. 

Source: Solitaire Afflelou Le Figaro

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Départ aujourd’hui à 13h pour Dingle

pontons saint Gilles2
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La souris a accouché d’une montagne. La plus petite étape de cette 37e Solitaire, la plus courte, a vu se créer des écarts monstrueux. L’exploit insensé réussi par Nicolas Troussel (Financo) et Thierry Chabagny (Littoral), partis seuls dans l’ouest, laisse groggys 42 des 44 navigateurs. L’immense majorité de la flotte a la gueule de bois aujourd’hui, à Saint-Gilles-Croix-de-Vie. Crucifiés chez les Gillocruciens. Jimmy Le Baut (Port Olona) a fermé la marche cette nuit hors temps, plus de vingt heures après Nicolas Troussel. Tous les grands favoris accusent des retards compris entre sept et onze heures. On fait grâce des minutes… Des exemples ? Pourtant signataire d’une belle 4e place à l’étape, Gérald Véniard (Scutum) est désormais également 4e du général, mais avec 6h33’ de retard. Gérald vient en outre d’écoper d’une pénalité de 24 minutes sur la première étape pour dépassement du poids à embarquer (lire par ailleurs). Mais il n’a pas perdu pour autant toutes ses illusions de voir briller ses couleurs orangées sur le sol irlandais. Il dit : « mon objectif est toujours de finir dans les 10 premiers au général et je vais me battre bec et ongles. »
 
Chez les grands favoris, on a déjà fait les comptes. Info ou intox, façon peut-être de mettre la pression sur les deux leaders, on leur accorde volontiers déjà les deux premières places à Concarneau. On répète à qui veut l’entendre que seule la troisième place d’Armel Le Cléac’h est éventuellement attaquable. On simplifie. C’est un peu tôt. En fouillant, on finit par dénicher des raisons d’espérer. Par trouver un Erwan Tabarly (Iceberg Finance, 7e au général à 7h32) qui tempère l’écrasement en se souvenant : « une fois, à l’arrivée à Dingle justement, j’étais juste derrière le trio de tête. Et puis le vent est tombé pile devant moi et ils m’ont mis six heures dans la vue. Six heures ! Alors même si Nico et Thierry ont une énorme avance, tout est encore du domaine du possible. » On l’a déjà écrit ici : impossible n’est pas figariste. Et si un coup tel a statistiquement peu de chances de se reproduire, son impossibilité totale n’est inscrite nulle part.
 
479 milles vers la verte Erin
 
Armel Le Cléac’h (Brit Air, 3e à 5h29) sait mieux que quiconque, qu’il ne faut jurer de rien, lui qui a déjà gagné La Solitaire pour 13 secondes. « En distance, on n’est pas encore à la moitié de l’épreuve. Il peut se passer beaucoup de choses dès cette étape, notamment après la pointe Bretagne où on va tirer des bords dans de la mer et du vent fort, sans doute 30 nœuds dans l’axe ».
Car voilà. Fourbus ou pas, revigorés ou pas par deux petites nuits de sommeil et des passages chez les kinés de la course où l’on sait que certains sont déjà allés taquiner la limite (avalanche d’hallucinations de fatigue : certains ont vu des pelleteuses en pleine mer, d’autres ont perdu 5 kg depuis le départ), ils repartent demain.
La direction et le comité de course leur ont toutefois accordé deux « faveurs », prévues par le règlement : le départ sera donné à 13h au lieu de 11h et surtout, on fera route directe vers l’Irlande, sans descendre au préalable virer la bouée du pertuis d’Antioche. « Nous les faisons partir directement vers une porte sous l’île d’Yeu, puis ils doivent laisser Ouessant et le Fastnet sur leur tribord » résume Christian Gout, directeur de course.
Raboté de 70 milles, le parcours se trouve « réduit » à 479 milles. Près de deux fois l’étape qui vient de faire tant de dégâts. C’est toujours à un Tourmalet de la voile que vont être confrontés les 44 solitaires… Et comme souvent quand on parle d’accéder à la verte Erin depuis le bas des cartes, on s’attend à ce que ce ne soit pas un concours de poésie. Le fighting spirit (l’esprit de combat, ndr) cher aux rugbymen du trèfle va s’appliquer aussi aux marins : il va falloir ferrailler ferme pour espérer, qui gagner l’étape, qui revenir au général, qui jouer le classement Bénéteau des bizuths où Christopher Pratt (Espoir Crédit Agricole) met jusqu’ici tout le monde d’accord.
Pour l’instant, on voit la flotte arriver à Ouessant 24 heures après le départ, doubler les Scilly un jour plus tard et toucher Dingle dans la nuit de lundi à mardi. Mais la dernière étape a prouvé que la météo n’était pas près d’émarger au rayon des sciences exactes. Enfin, on rappelle avec Gildas Mahé (Le Comptoir Immobilier) et Thierry Chabagny qu’il ne faut jamais perdre de vue que « la voile est d’abord et avant tout un jeu ». Et dans la plupart des jeux on peut tout perdre à tout moment. Ou tout gagner.
 
L’écho du Large:
 
Nicolas Troussel, (Financo, leader) : « Le temps de récupération est extrêmement court, même pas eu le temps de fêter la victoire et on repart. Franchement, j’aurais bien pris un jour de repos supplémentaire…Et encore pour moi ça va, mais j’ai une pensée pour ceux qui sont arrivés dans la nuit, ceux qui n’ont pas assez de budget pour avoir un préparateur. J’ai été dans ce cas là souvent et je sais que ce n’est pas évident. Je vais me plonger dans la météo dès ce midi et me reposer encore pour être d’attaque demain. »
 
Thierry Chabagny (Littoral, 2e à 1h31’) : « Nico et moi avons fait un bon coup, mais en ce qui me concerne je n’ai pas encore épanché ma soif de victoire d’étape. Alors bien sûr que je vais attaquer et tenter de gagner ! »
 
Armel Le Cléac’h (Brit Air, 3e à 5h29’) : « L’écart créé par Nico et Thierry n’est pas un drame. C’est la place qui compte et pour l’instant troisième c’est déjà très bien. Je suis sur le podium, avec du monde qui pousse derrière. Je vais continuer à faire ma course sans penser aux deux premiers, pour l’instant je suis dans le bon tempo. »

Le Prix Argos pour Christophe Lebas (Armor Lux)
Christophe Lebas (Armor Lux) a remporté le Prix Argos de la deuxième étape qui récompense le skipper ayant réalisé la meilleure progression entre la bouée Radio France (dernière marque du parcours côtier de Santander) et l’arrivée. Parti en 35e position, Christophe Lebas a gagné 22 places tout au long du parcours vers Saint-Gilles-Croix-de-Vie où il est arrivé 13e.
 
Record Hublot et Grand Prix Suzuki pour Nicolas Troussel (Financo)
Vainqueur à Saint-Gilles-Croix-de-Vie, le skipper de Financo cumule les récompenses. Il a réalisé la plus grande distance parcourue sur 24h00 entre le 15 et le 16 août : 153 milles, à 6,4 nœuds de moyenne. Il remporte donc le prix Hublot, décerné par le chronométreur officiel de la Solitaire Afflelou le Figaro. En tête à la marque des Birvideaux, il s’adjuge également le Grand Prix Suzuki.
 
Bouleversement chez les bizuths
Cette deuxième étape a provoqué du remue-ménage dans le classement Bénéteau des bizuths. En tête, Christopher Pratt (Espoir Crédit Agricole) a pris la place de Gildas Mahé (Le Comptoir immobilier) et dispose désormais d’une confortable avance d’une heure sur ce dernier. Erwan Israel (Delta Dore), régulier, complète le podium. Ce trio se tient en 1h37 et laisse sur le carreau la plupart de ses poursuivants qui ont accusé, comme l’ensemble de la flotte, des écarts importants à l’arrivée. Les grands gagnants du parcours Santander/ Saint-Gilles-Croix-de-Vie sont Robert Nagy (Théolia) et Jean Pierre Dick (Virbac-Paprec) qui ont respectivement gagné 5 et 6 places au classement général. A l’inverse, Corentin Douguet (E.Leclerc Bouygues Telecom) a beaucoup perdu sur ces 314 milles de course. Il est passé de la deuxième à la septième position et cumule désormais 5 heures de retard sur Christopher.

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Ca secoue encore chez les minis

andraz Mihelin
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Cette deuxième étape ressemble à s’y méprendre à la première ! Même si le rythme est moins soutenu qu’il y a deux semaines, les Minis ont été et étaient encore jeudi après-midi sérieusement secoué par une mer plutôt chaotique. En tête, les partisans du virement de bord précoce pour sortir des îles açoriennes, sont emmenés par Xavier Haize chez les prototypes et par Thomas Bonnier pour les voiliers de série.
 
Et du près ! Encore du près… Décidemment cette nouvelle épreuve du circuit Mini n’est pas de tout repos et cette deuxième étape, un retour entre Horta (Açores) et les Sables d’Olonne, a des allures de répétition. Dans le golfe de Gascogne, les Minis avaient tout de suite été pris dans une dépression jusqu’en Espagne. Cette fois, c’est une dépression qui les accompagne dans leur Sud et l’anticyclone des Açores qu’ils bordurent, génère des vents instables de secteur Nord à Nord-Est sur une mer très croisée. Car après le départ donné mercredi à 15h40 (heure française) dans une belle brise de Nord Est vingt nœuds, il a fallu monter dans le Nord pour sortir de l’archipel, parer Sao Jorge avant de retrouver le grand océan. Un méchant clapot, du courant de marée, des rafales brusques, des dévents soudains, des bascules de vent : la fin de journée et toute la nuit ont été plutôt fatigantes pour essayer de s’extraire le plus rapidement possible de ces reliefs volcaniques.
 
Le premier choix tactique était pris dès le soleil couchant mercredi quand il a fallu opter soit pour un virement afin de passer entre les îles de Sao Jorge et de Graciosa, soit pour un bord prolongé vers le Nord. Et dans cette deuxième stratégie, il y a encore eu différentes façons d’aborder cette bordure anticyclonique, certains virant en milieu de nuit, d’autres en milieu de journée ! Résultat : la flotte était dispersée sur plus de cinquante milles jeudi midi en latitude et les partisans du virement précoce pointaient en tête… Mais pas si longtemps que cela puisque le vent était très oscillant : des bascules de plus de 20°, une brise de huit nœuds à peine avec quelques bouffées imprévues sous les nuages, un ciel plombé, et surtout un clapot très désordonné qui oblige les skippers à barrer, à régler, à s’adapter en permanence et à trouver l’angle le plus favorable pour ne pas « planter des pieux », c’est-à-dire s’arrêter à chaque vague…
 
Deux options qui se ressoudent
 
Ainsi chez les prototypes, le groupe du Sud (Hardy, Joschke, Salabert, Laureyssens, Haize, Koch, Sineau) qui était passé avant la nuit entre les îles en virant entre Sao Jorge et Graciosa, cherche à se recaler vers le Nord Est pour croiser devant la route des partisans du bord prolongé… mais pas trop (Vidal, Mihelin, Hajnsek, Brennan, Kaczorowski). Car ceux qui ont attendus encore plus longtemps avant de virer de bord, cap à l’Est, n’ont pas tiré de bénéfice de cette option : Cusin, Vadeleau, Bonvin, Bloom, ne sont pas en situation favorable très au Nord !
Du côté des voiliers de série, même topo : les « Sudistes » (Bonnier, Reinhart, Barnaud, Castelnérac) ont pris le commandement, mais cherchent eux aussi à se recadrer devant les bateaux plus au Nord (Lobato, Marsset, Vidal…) alors que les extrêmes du Nord (Quélen, Bouw, Riou…) ont déjà plus de 25 milles de retard sur les leaders, sans parler des partisans du « Pôle » (Marin, Hupin, Girolet, Zurrer) qui concèdent plus de cinquante milles ! Après une journée de mer, ça fait très mal… Quant aux deux skippers revenus à Horta dans la nuit de mercredi à jeudi, ils ont pu réparer et repartir à 11h00 TU ce jeudi : Hugo Ramon a remplacé sa ferrure d’étai rompue et Pierre Brasseur a circoncis son court circuit de pilote automatique.
 
Le vent généré par l’anticyclone de Açores, qui se replace ces prochaines heures sur l’archipel, va bien tourner au Nord vendredi pour une douzaine de nœuds, et les hautes pressions vont engluer la flotte des retardataires ! Il ne faut pas traîner… au risque de rater le coche pour l’Espagne. De toutes manières, l’installation progressive d’une dorsale anticyclonique des Açores à la Vendée va forcément ralentir tous les Minis un moment ou un autre, avant les Sables d’Olonne. Pour l’instant, les solitaires avancent difficilement autour de six nœuds dans un vent variable en force et en direction et un clapot chaotique. De quoi soulever les cœurs, barbouiller les estomacs et fatiguer les corps. Il faut être attentif et il est probable que ceux qui passeront la nuit à la barre, à régler et à suivre les variations de la brise en observant le ciel et le baromètre, vont faire le break…

Source: Les Sables – Les açores – Les sables

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Du jamais vu sur la Solitaire

brit air 2006
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De mémoire de figariste, on n’a jamais vu ça. Certes en 1979, à l’époque révolue des half-tonners, et dans une flotte décimée par la tempête, Patrick Eliès s’était imposé avec un total de 14 heures d’avance. Mais à l’ère de la monotypie et de la régate océanique, celle où la flotte avance compacte, en privilégiant souvent la tactique à la stratégie, les écarts sont d’ordinaire infimes. La Solitaire 2006 fera certainement exception. Un cru qui sera marqué par l’option occidentale de Troussel et Chabagny, une option ambitieuse et dévastatrice pour le reste de la flotte. Ces deux concurrents qui partagent une amitié à terre, ont partagé les mêmes points de vue en mer et ont eu raison du reste du monde. Peu inspirés par les prévisions météorologiques avant le départ de Santander, ils ont tenté le tout pour le tout, n’hésitant pas à partir en travers de la route pour se positionner 60 milles dans l’ouest de leurs adversaires. Leur coup de poker s’est transformé en coup de maître. Ce soir, ils sont respectivement premier et deuxième du classement général provisoire après deux étapes.
 
Les options extrêmes existent mais ne payent pas toujours
« Ce qui est le plus frappant, c’est que ça a payé énormément. C’est presque miraculeux » explique Christian Le Pape, responsable du Pôle Finistère Course au Large – où s’entraînent les deux leaders-, et témoin de La Solitaire depuis plus de 15 ans. « Car il y a toujours eu des stratégies extrêmes. En 1995, Philippe Vicariot avait créé la surprise sur la première étape avec une grosse avance sur ses poursuivants. Des coureurs comme Marc Thiercelin ou Christophe Lebas ont souvent été des partisans d’options radicales. Mais ça paye rarement, donc on en parle peu. »
 
Troussel, Chabagny et Le Cléac’h à l’abri
Le podium de Saint-Gilles-Croix-de-Vie sera t-il celui de Concarneau dans moins de 15 jours ? Les espoirs des concurrents de pouvoir renverser la vapeur sont maigres, même si tout n’est pas fini. Armel le Cléac’h, lui, n’est pas le plus mal loti : « Leur avance est considérable, irrattrapable même, mais pour l’instant, je suis sur le podium et il reste encore deux longues étapes ».
 
Derrière lui, les arrivées se sont succédées, preuve que dans l’est, la bagarre a été intense. Au près, dans la brise et une mer hachée, les poursuivants ont eu droit à un finish difficile.
Gérald Veniard (Scutum) termine 4e, suivi d’Erwan Tabarly (Iceberg Finance) et de Yann Eliès (Groupe Generali assurances), trois coureurs qui réussissent ainsi deux étapes très solides. Conscient que la victoire leur a probablement échappé, leur discours s’accordent sur une chose : ils n’ont aucun regret. « Je suis en accord avec moi-même. Les infos météo que j’ai eu à disposition étaient floues. Quand c’est comme ça, je reste avec la flotte et j’essaye de lui régler son compte» déclarait Yann Eliès à l’arrivée. Septième, Eric Drouglazet (PIXmania.com) lui fait écho : « Il y a toujours des attaquants qui sont prêts à tout jouer. Je n’aurais pas fait ce qu’ils ont fait. Je pense avoir navigué intelligemment par rapport aux modèles météo américains, anglais et allemands que j’avais. »
 
Viser une victoire d’étape
Dès lors, les enjeux se déplacent vers d’autres objectifs : gagner une étape et pourquoi pas tenter de ravir la troisième place du général à son actuel occupant, Armel Le Cléac’h. Le départ de la troisième manche vers Dingle (Irlande) longue de 545 milles sera donné vendredi à 11 heures. D’ici là, les 44 figaristes, déjà bien fatigués, n’auront eu que très peu de temps pour récupérer. Cette variable pourrait être déterminante dans le déroulement de ce troisième acte.

Echos des pontons

Nicolas Troussel (Financo), vainqueur de l’étape et 1er au général provisoire
« C’est une grande émotion. Je suis très content pour mon partenaire Financo et pour tous ceux qui ont cru en moi, avec qui je travaille tout l’hiver. Gagner une étape de La Solitaire, c’est un rêve qui se réalise. J’avais bien regardé la météo à terre et je voulais tenter d’être plus à l’ouest que les autres. Mais je n’avais pas les classements le premier jour et j’ai fait ma route tout seul. J’ai croisé Thierry Chabagny la première nuit et je suis content pour lui aussi. Je m’étonne que tous les autres aient choisi l’est, qu’on n’ait pas été plus nombreux à tenter ce coup-là. Maintenant on me dit que j’ai de l’avance au général. On va essayer de la gérer mais la course n’est pas finie. Ceci dit un podium d’étape et du général avec mes deux copains Thierry et Armel, c’est ‘pecab !’’»
 
Thierry Chabagny (Littoral), 2e de l’étape et 2e du classement général provisoire :
« Je suis allé chercher cette place à la force du poignet. Avec Nicolas, on n’a pas eu froid aux yeux. J’avais ce coup dans un coin de ma tête avant le départ. Au bout d’une heure de course, je savais que Nico et moi on allait chercher quelque chose dans l’ouest, où les autres n’iraient pas. On y a trouvé de l’or, ça a marché. Cette décision, il fallait la prendre dès le premier jour de course. Mais j’avoue que le lundi soir, j’ai eu très peur. On n’entendait pas les autres à la VHF, je n’avais ni météo, ni classement. C’était quitte ou double. Mais bon, quand il y a du risque, il y a aussi du plaisir »
 
Armel Le Cléac’h (Brit Air), 3e de l’étape et 3e du classement général provisoire :
 « C’est l’étape qui tue !  La plus courte et celle qui fait le plus mal au classement général. Ce n’était pas simple du tout. La fin était longue car le vent est monté fort dans le nez et on s’est retrouvé à tirer des bords dans une mer courte (…)  Je suis super content pour Nico et Thierry, on a souvent navigué ensemble sur les mêmes bateaux, mais là, ils ont été opportunistes et ça a payé. On rêve tous de ce schéma idéal de gagner avec 6 ou 7 heures d’avance sur le peloton,  eux l’ont fait. Il reste deux étapes, leur avance est considérable, voire irrattrapable, mais pour l’instant je suis sur le podium et la route est encore longue, il peut se passer beaucoup de choses. Une chose à prendre en compte, c’est qu’il y a très peu de temps de repos ici.»
 
Gérald Veniard (Scutum), 4e de l’étape, perd son leadership au général provisoire : « Je me doutais un peu que je n’allais pas rester en tête du classement général jusqu’à la fin. J’ai un objectif, finir dans les 10 premiers. Sur cette étape, je n’ai pas de regret parce que je n’avais aucune info me permettant de croire que leur option était la bonne. C’était osé, je ne l’aurais pas fait. En tant que leader, je me suis interdit toute prise de risque. Mais je suis très admiratif de ce qu’ont fait Nico et Thierry. Depuis le temps, ils méritaient d’y arriver. »
 
Christopher Pratt (Esprit Crédit Agricole), 12e de l’étape et 1er bizuth : « J’ignorais qu’on pouvait repousser les limites du sommeil aussi loin. Au départ, je suis bien resté dans le paquet de tête, simplement il n’y avait pas de vent dans l’est. Je suis vraiment content pour Nico (Troussel) avec qui je naviguais sur le Tour de Bretagne. De belles histoires comme celles qu’il vit en ce moment n’arrivent pas si souvent. J’ai revu à la baisse mes ambitions au général après la 1ere étape. Maintenant je vise le classement des bizuths et je suis vraiment content d’être le premier des débutants dans la course aujourd’hui. On a eu des moments magnifiques sur cette étape, avec des couchers de soleil et une mer plate incroyable, mais par moments c’était vraiment dur… Je suis complètement cassé et j’ai du mal à tenir debout. Les seules choses que je veux faire maintenant, c’est voir ma chérie, dévorer un bon steak-frites et aller dormir ! »

Source: La Solitaire Afflelou Le Figaro

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La deuxième étape pour Nicolas Troussel,

Nicolas Troussel
DR

Il fait encore nuit. Le ponton de Saint-Gilles-Croix-de-Vie a bien du mal à contenir la famille, les amis de Plougasnou, les journalistes. Nicolas Troussel arrive. Incroyablement calme. Il sourit et murmure juste son mot fétiche de Finistérien pur jus, ce mot qui est sa signature dans le monde de la course au large : « Pecab’ ! ». Et oui, pour être impeccable, c’est impeccable. Le skipper de Financo vient de frapper un coup énorme dans l’histoire de La Solitaire. Ce n’est plus un wagon comme ils disent, c’est un train d’avance. L’étape. Le général. Et la perspective d’être trois amis sur ces deux même podiums, avec Thierry Chabagny et Armel Le Cléac’h. Un rêve éveillé.

Heureux, Nicolas Troussel ?

Pecab’ ! C’est génial, une grande émotion. Je me sens très, très content pour mon partenaire Financo et pour tous ceux qui ont cru en moi, avec qui je travaille tout l’hiver. C’est à eux que je dédie cette victoire. Gagner une étape de La Solitaire, c’est un rêve qui se réalise. C’est le travail qui paie, aussi, car comme on dit au centre de Port-la-Forêt pour gagner il faut manger Figaro, penser Figaro, vivre Figaro, ce qui n’est possible qu’avec une approche professionnelle et donc un partenaire financier solide. En tous cas, je me suis fait plaisir. C’est bon de passer les bouées avant tout le monde et d’arriver en sachant que les autres sont encore en mer pour un petit moment. C’était tout de même un peu long sur la fin, avec le vent qui mollissait.

Cette grande option à l’ouest, c’était prémédité ?

Un peu. J’avais bien regardé la météo à terre et je voulais tenter d’être plus à l’ouest que les autres. Mais je n’avais pas les classements le premier jour, je ne savais pas où ils étaient et j’ai fait ma route tout seul. J’ai croisé Thierry (Chabagny, NDR) la première nuit et après on s’est quitté. Je suis content pour lui aussi. Je m’étonne que tous les autres aient choisi l’est, qu’on n’ait pas été plus nombreux à tenter ce coup-là. Pour moi c’était un risque mesuré, même si les routages au départ disaient d’aller dans l’est mais je n’y croyais pas. Je voyais que ça pouvait passer dans l’ouest et c’est ce qui s’est passé. En même temps, l’avantage d’être seul c’est que tu n’as pas à contrôler les autres. Je faisais ce que je voulais.

On ne doute pas tout de même dans ces cas-là, seul contre tous ou presque?

Bien sur que si ! Tu doutes toujours, en voile. Car si tu te plantes dans ton option, c’est sûr que tu te retrouves loin derrière. Le fait que Thierry Chabagny y soit allé aussi me rassurait un peu, et puis je n’arrivais pas à avoir de vacations, je ne savais pas trop où étaient les autres. Je n’ai pas calculé les autres, j’ai fait ma route seul. Le vent n’était pas stable et il suffisait d’une petite bascule pour tout remettre en cause. Mais je suis parvenu à aller vite et à tirer les bons bords, à ne rien lâcher, tout le temps à fond. J’ai réussi à bien dormir la deuxième nuit, mais je suis fatigué quand même. Il faut que j’aille me coucher !

Tu as creusé des écarts considérables au général.

Thierry Chabagny n’est pas très loin, et je n’ai pas trop calculé pour les autres, je verrai ça demain, il fera jour. On me dit que je vais avoir beaucoup d’avance sur le troisième. C’est sûr que je vais être plus motivé et plus concentré que jamais pour tenter de garder cette avance. On va déjà profiter de la joie d’avoir remporté cette étape et après on verra. Mais vous savez, on vient tous pour gagner et la course n’est pas finie. Il y a déjà eu deux étapes avec des écarts. C’est à Concarneau qu’on fera les comptes. Je veux rester lucide.

As-tu conscience d’avoir réalisé une performance qui fera date?

Je ne réalise pas trop encore, les autres n’ont pas encore passé la ligne. Mais ça me fait penser à Philippe Vicariot en 1995 (lequel avait pris une avance d’une heure avant d’être battu sur le fil par un certain Philippe Poupon). On est à la moitié de la course, on a de l’avance, c’est vrai. mais je le répète, ce n’est pas fini.

Le podium d’étape et le général provisoire ce sera probablement Troussel, Chabagny et Le Cléac’h, trois copains à terre et en mer.ça fait quoi ?

Ah la la. (il soupire en souriant, les yeux dans le vague), alors là. alors là. ça tu vois, ça, ça c’est pecab’ de chez pecab’ ! On est vraiment super potes et si ça pouvait être le même podium à Concarneau. alors là. là il y aurait une fiesta énorme !

Recueilli par Bruno Ménard

Source: Solitaire Afflelou Le Figaro

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Troussel et Chabagny attendus dans la nuit …

Thierry Chabagny 2006
DR

Nicolas Troussel sera sans doute le premier à virer Les Birvideaux ce soir, peut-être vers 19 ou 20h. Sur son Financo, le Finistérien est à 100 milles de l’arrivée et avance à 6 nœuds. Il a réussi à se tricoter un matelas de 12,5 milles d’avance sur Thierry Chabagny (Littoral). Derrière eux, le désert. Du leader au troisième (Eric Drouglazet sur Pixmania.com) l’écart est énorme : près de 33 milles. Des favoris comme Charles Caudrelier (Bostik) et Gildas Morvan (Cercle Vert) sont à plus de 44 milles. Le leader du général provisoire Gérald Véniard (Scutum), pourtant 7e, est relégué à plus de 37 milles, soit l’équivalent de la moitié du chemin qu’il restera à parcourir entre Belle-île et Saint-Gilles-Croix-de-Vie, que les deux leaders devraient atteindre dans le milieu de la nuit, au pire à l’aube.
Car sauf accident, on a du mal à voir quel improbable scénario pourrait empêcher ces deux-là de monter sur les deux plus belles marches du podium de l’étape et pourquoi pas d’en faire autant au classement général où ils n’ont respectivement que 1h54’ (Troussel) et 1h11’ de retard (Chabagny). Or, avec plus de 32 milles de débours au minimum – 76 milles pour le dernier ! –  les 42 autres marins risquent fort d’accuser un retard à Saint-Gilles se comptant en heures. Au pluriel.
 
Seuls au monde
Troussel et Chabagny ont donc tous les atouts en mains pour se partager un gâteau énorme en terre vendéenne. On pèse nos mots. Jamais dans l’histoire du Figaro Bénéteau II, depuis 2003, jamais deux hommes seuls n’avaient réussi à creuser un écart aussi conséquent sur tous les autres. La question est davantage de savoir combien de temps ils prendront à tous. En outre, Nicolas et Thierry sont en train de réaliser le rêve absolu de tout marin. Oser envers et contre tous partir seul dans son coin chercher le vent. Le trouver. Cueillir les lauriers et goûter à ce sentiment narcissique mais jouissif d’avoir eu raison en faisant fi de l’avis général. Contre les 42 autres partis à l’est de la route directe, pourtant tous avec de bonnes raisons.
L’histoire est belle. Deux cow-boys solitaires partis chercher fortune en leur Far West sont en train d’y dénicher un fabuleux butin. « Ils ont fait preuve d’une clairvoyance assez nette », juge Jean-Paul Mouren (MarseillEntreprises).  « Ils ont été opportunistes », appuie Kito de Pavant (Groupe Bel). « Les deux se sont barrés… c’est bien vu et bien joué de leur part, ils ont réussi à contourner la bulle par l’ouest. C’est un peu inquiétant pour nous autres », admet Erwan Tabarly (Iceberg Finance). Voguant dans les profondeurs du classement hier, aux alentours des 35e et 40e places, les deux têtus Bretons sont effectivement seuls au monde depuis le pointage de 20h hier. Pendant une vingtaine d’heures, bénéficiant de vent bien plus soutenu au grand large, ils se sont ainsi autorisés des moyennes de 6 à 7 nœuds. Pendant ce temps le paquet s’engluait à l’arrêt dans une molle infernale où tourne en grinçant la roue de la fortune.
 
30 nœuds de vent cette nuit ?
Le vent qui est enfin rentré ce midi sur la zone de course, de l’ouest d’une dizaine de nœuds, devrait s’orienter sud-ouest en forcissant nettement à 20 nœuds, peut-être jusqu’à 30 dans les rafales. Cela donne un avantage supplémentaire aux deux leaders. Car ces conditions autoriseront un grand run de vitesse tout droit, peu propice à revenir. Il n’y aura sans doute pas grand chose à tenter pour la meute derrière eux.
« Je ne pensais pas que ça marcherait aussi bien », avoue Thierry Chabagny, le seul du tandem de l’extrême ouest à avoir pu être joint aujourd’hui. Le premier aussi à être parti totalement en travers de la route à peine quitté Santander. « Quand tu quittes le peloton et que tu pars tout seul dans ton coin, il y a un risque énorme. Tu te demandes si tu n’es pas un peu inconscient. Ce n’est pas évident, il faut se faire confiance ! Je crois que j’avais envie de faire un truc différent… » Et Chabagny ajoute : « celui qui passera en tête aux Birvideaux aura toutes les chances d’être aussi premier à Saint-Gilles, car ensuite c’est tout droit à fond la caisse. »

Yann Elies (Groupe Generali Assurances) confirme que la fin d’étape sera rapide et musclée :  « on va attaquer costaud. Fini les réglages fins, ça va être du lourd ». Lui se voit aux Birvideaux vers 23 h ce soir. Nicolas Troussel y sera probablement déjà passé trois heures plus tôt. Pour l’immense majorité qui ne peut plus guère prétendre à la victoire, il sera l’heure de jeter ses dernières forces dans la bataille, tenter de limiter la casse et espérer des écarts intermédiaires favorables.
Une chose est sûre. Qu’on ne vienne plus parler sempiternellement aux deux leaders de «Bretons de Panurge » et autres « chevaux de bois qui se copient les uns les autres ». Troussel et Chabagny sont en train de réussir un truc de marins. Un grand truc. Un grand truc de grands marins. Sortez la caisse à superlatifs. On va en avoir besoin.

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La chronique de Capian : Baptème du feu !

Départ Les Sables - Les Açores
DR

Et pour apprendre, sur cette première étape, j’ai appris!
J’en ai pas mal pris aussi. Car autant, d’une part, j’ai explosé mon record sous spi dans la grosse houle Atlantique, autant, d’autre part, j’ai nettement perfectionné ma technique des paquets cadeaux en toile à spi et petit noeuds d’écoute (et bras et drisse aussi). Il ne restait plus qu’à aposer l’étiquette plaisir d’offrir!
Celà se termine invariablement en croix au fond du cockpit, trop content de n’avoir rien éclaté ni trop tordu, en jurant qu’on ne m’y reprendrait plus! Soit mollo pendant quelques heures, le temps de se refaire une santé,… jusqu’à la prochaine.
 
Cette première étape au aussi clairement mis en évidence pour moi qu’un format différent demande des aptitudes différentes ou tout au moins une autre facette des mêmes aptitudes.Par exemple, prévoir la bascule pour dans trois jours demande de s’inscrire dans une autre échelle de temps, un autre système, plus large que celui rencontré habituellement. pareil pour la gestion du bonhomme en course, sur la durée.
 
Apprentissage inestimable pour l’année prochaine.
Bien sûr il se passe pas mal de choses en solo et au large, avec toujours quelques surprises. Il y en a qui ont tapé une baleine, d’autres qui ont dématé ou passé une semaine sans pilote. pour ma part j’ai été plutôt chanceux sans grosse casse. Une frayeur quand même, la nuit où j’ai été réveillé en sursaut par un gros "Bang" sur le bateau et immédiatement une odeur de cramé, quelque chose de métallique, je ne sais pas trop quoi. Pour en avoir croisé plusieurs qui n’ont pas bougé d’un pouce, je pense immédiatement que je viens de taper un cargo, ou quelque chose du genre. J’attends un autre bruit, rien. Je sors la tête, rien. J’allume la frontale, le mat est là. Je ne comprends plus. Retour à l’intérieur. L’odeur de cramé est toujours là.
En fait ce n’était pas pour dormir que j’étais rentré mais pour me faire chuffer à manger au bain marie. je me suis endormi et l’eau épuisée, la bouilloire a été chauffée à blanc ainsi que le sachet qu’elle contenait, voilà pour l’odeur. Pour le bang, c’est mon fusible de hale-bas qui a lâché et projetée la poulie sur le roof, qui m’a réveillé. Finalement, j’ai été chanceux, j’aurai pu tout cramer…
Les travaux pratiques reprennent le 15 à 11h02 TU. à bientôt, de retour aux Sables.
Matthieu Girolet

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Thierry Chabagny prend les commandes de la course

Thierry Chabagny
DR

Au pointage de 14h00 hier, Thierry Chabagny accusait 21 milles de retard sur les leaders (alors Le Cléac’h –Brit Air, Pellecuer – Cliptol Sport et Bérenger – Koné Ascenseurs) et était décalé à 50 milles dans l’ouest de ses concurrents. Il avançait aussi trois fois plus vite et l’on pressentait bien que sa stratégie radicale était susceptible de payer. Tôt ou tard. Le skipper de Littoral a réussi non seulement à se glisser en tête, à se recaler à proximité de la route directe, mais aussi à prendre 5 milles à son plus proche poursuivant Nicolas Troussel, lequel persiste et signe dans l’ouest (il est actuellement le plus extrême à cette position). Avec une vitesse légèrement supérieure à celle de leurs adversaires, ces deux là devraient continuer à creuser l’écart.
 
Calme blanc, nuit blanche
La grande majorité de la flotte s’est regroupée à droite de la route et prend son mal en patience dans cette nuit sans vent. « La mer est d’un lisse un peu agaçant » commentait Nicolas Bérenger (Koné ascenseurs), classé 16e ce matin, à 12 milles de Chabagny. Au-dessus d’eux, les skippers évoquaient le plafond étoilé et devant, les myriades de lumières, celles de leurs concurrents mais parfois celles des cargos ou des bateaux de pêche. Ce calme blanc contraste avec l’agitation intérieure. Pratiquement aucun d’entre eux n’a eu le temps de se reposer, un exercice d’ailleurs impossible avec le bruit des voiles faseyantes et surtout l’obligation de réguler à la moindre veine de vent. « Je n’ai pas le temps de m’ennuyer, je ne vois pas le temps passer, c’est parfois un peu aléatoire, mais il n’est pas question de dormir » confiait Charles Caudrelier (Bostik), placé au milieu du paquet.
 
Hormis les deux premiers concurrents, ça passe un peu dans tous les sens. Christophe Lebas (Armor Lux) était signalé en troisième position, suivi d’Erwan Tabarly (Iceberg Finance), Armel Le Cléac’h (Brit Air), Eric Peron (Cigo) et Jeanne Grégoire (Banque Populaire)… et pratiquement aucun d’entre eux ne naviguait sur le même axe. Entre stress et résignation, tous attendent le retour d’un souffle salvateur pour y voir plus clair. Peut-être en fin de matinée.

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