Le 23 décembre 2012, le skipper de Cheminées Poujoulat jette l’ancre au sud de l’île d’Enderby. Très vite les conditions météorologiques se détériorent. Au lever du jour, le Suisse remarque la présence d’un navire scientifique russe, le Professeur Khoromov. Dans la demie heure qui suit, le mouillage du 60 pieds Imoca commence à chasser, menaçant son intégrité en risquant de l’envoyer à la côte. Il se rapproche alors dangereusement du navire scientifique. Une situation qui conduit le navigateur à prendre contact avec l’équipage afin de le prévenir de cette dérive. Les hommes du bord proposent leur aide et devant l’urgence de la situation, le solitaire décide de se servir de ce bateau comme d’une ancre. Dans la précipitation, un équipier du Professeur Khoromov monte à bord de Cheminées Poujoulat. Subissant cette “intrusion”, Bernard Stamm en a aussitôt informé la direction de course du Vendée Globe par le biais d’un rapport circonstancié, rappelant qu’il avait agît pour préserver son bateau et que cet homme est monté à bord comme l’aurait fait n’importe quel autre marin du globe, en méconnaissance totale des sanctions pouvant peser. A aucun moment, une quelconque assistance n’a été demandée.
Bernard Stamm : « Je pense avoir agi pour la sécurité et dans l’esprit de la course. Il y avait un risque que j’entre en collision. Tout est arrivé très vite… Je n’ai pas pensé à cela. J’ai pensé à ce bateau comme à une ancre. Je ne pouvais pas repartir en mer. C’était, je pense, la meilleure façon de préserver le bateau. Les organisateurs du Vendée Globe, et la classe IMOCA souhaitent que les bateaux rentrent aux Sables. Quand j’ai vu que mon ancre chassait, j’ai pris la VHF pour prévenir l’autre bateau que j’allais essayer de venir à son contact. Ce sont eux qui m’ont proposé de m’amarrer sur eux, moi je courrais partout dans le bateau pour tout rallumer. Quand je suis ressorti, il y avait quelqu’un à bord en train de remonter l’ancre. Je n’ai même pas eu le temps de penser à lui dire de descendre de mon bateau, surtout qu’on risquait de continuer à descendre la pente. J’ai fini de remonter l’ancre tandis qu’il a passé le bout à son bateau. N’importe quel marin dans le monde entier aurait fait ce qu’il a fait, et ça s’est passé tellement vite que je n’ai pas réfléchi à ce que disait le règlement. Il est venu sur mon bateau sans que je lui demande. Cela s’est passé très vite ! Je ne suis pas sûr que le patron (du bateau russe) puisse apporter de nouveaux éléments. Il faut que je continue. Je suis au milieu du Pacifique Sud… »
Le soutien d’autres skippers
Jean Le Cam a vivement réagi aux nouvelles de la disqualification de Bernard Stamm dans un message envoyé ce matin. “Je suis remonté comme une pendule sur cette histoire-là. Pour moi, Bernard a agi en bon marin, il a tout fait pour sauver son bateau et on le pénalise ! Pour vous donner une image, c’est comme si un mec se retrouve au bord de la falaise, il risque de tomber, il y a quelqu’un qui lui tend la main et il devrait lui répondre : « Ben non, parce que c’est le règlement, alors tu ne me tends pas la main » et il tombe de la falaise ! Ça me désespère. Si ce qu’a vécu Bernard n’est pas un cas de force majeure alors je ne sais pas ce que c’est. J’ai envoyé un mail au jury ce matin car on ne peut pas prendre des décisions pareilles. Il faut se rendre compte qu’à l’avenir on ne pourra plus se porter assistance en cas de danger immédiat, de peur d’être disqualifié. Devrions-nous laisser nos bateaux aller au carton ?“
Mike Golding s’interroge aussi sur la décision du Jury. “Je pense avoir compris le processus derrière la décision. Les règles sont les règles, etc… Mais quand vous connaissez l’histoire de Bernard, et la situation dans laquelle il est, avec une grande partie du Pacifique Sud à parcourir, puis le Cap Horn et la menace des icebergs, ça parait très injuste. Cà semble ne pas être une bonne décision. Mais comme je l’ai dit, les règles sont claires et malheureusement avec les informations que j’ai, il semble que ces règles aient été violées par inadvertance, et c’est je pense un point considérable, par inadvertance. Je suis vraiment réservé sur cette décision, elle ne me semble pas correcte et je suis vraiment vraiment très triste pour Bernard, j’espère qu’il pourra faire appel et rester en course.”
Pour Jean-Pierre Dick, le jugement est scandaleux. “Cette décision du jury me parait totalement démesurée. Bernard Stamm a commis une infraction aux règlements. Je peux comprendre qu’il soit pénalisé pour cela, mais pas à cette échelle. La disqualification est vraiment forte. C’est hallucinant ! Il s’agit d’un cas de force majeure, Bernard a agi en bon marin pour sauver son bateau. Nos projets nécessitent une implication importante, un travail acharné du marin, des équipes et des sponsors. Bernard se bat chaque jour contre les éléments, les casses matériel. Il me parait plus juste qu’il reste en course avec une pénalité. Je souhaite que le jury révise sa décision.”
Quant au skipper majorquin, Javier Sanso il explique qu’il aurait faire la même chose que Bernard pour sauver son bateau. « Je ne suis pas d’accord avec le Comité, car dans des situations extrêmes il faut que l’assistance soit permise. Bernard, tu a sfait le bon choix à Auckland Island. »




















