Hydraplaneur versus Hydroptère ?

L´Hydroptère - Alain Thébault
DR

« On va d’abord tenter le record en équipage dans la catégorie 60 pieds puis ensuite le record en solitaire sur 24 heures (*). Si tout se passe bien, on tentera aussi le record sur 24 heures toutes catégories », explique Yves Parlier. L’Hydraplaneur est conçu pour « aller plus vite sur l’eau que les trimarans actuels, en s’affranchissant de la poussée d’Archimède. Le principe de la coque à redans a été inventé pour permettre aux hydravions de décoller et d’amerrir à grande vitesse. Ils permettent d’obtenir un appui dynamique sur l’eau et de faciliter le déjaugeage des coques à partir d’une certaine vitesse. Enfin quand l’avion atteint au planning une vitesse bien supérieure, il décolle sans effet de « ventouse » des coques. Ils évitent également les coups de frein lors des phases de décollage et d’amerrissage. La vitesse de ces coques n’est pas limitée. Des hydravions décollent à plus de 250 km/h et des catamarans à moteur, utilisant des coques à redans, atteignent, en pointe, les 260 km/h.
Tous les multicoques d’aujourd’hui fonctionnent grâce au principe d’Archimède quelle que soit leur vitesse. La résistance à l’avancement des coques archimédiennes croît avec le carré de la vitesse, bloquant l’accès à des vitesses moyennes de 40 à 50 nœuds. Grâce aux coques à redan ou coques d’hydravion, le centre de poussée dynamique est en avant du centre de poussée hydrostatique, ce qui permet de s’opposer au couple piqueur de la force aérodynamique…
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Pour L’Hydroptère imaginé par Alain Thébault, il faut aussi « s’affranchir du principe d’Archimède : il s’agit de déjauger les coques du bateau grâce à une poussée verticale développée par les foils, sorte d’ailes marine. Ne plus flotter sur l’eau mais voler, le rêve est ancien. "Tout corps plongé dans un fluide reçoit une force opposée à son poids et de valeur égale au poids du fluide déplacé". Cette force est appelée la poussée d’Archimède. Sa direction est verticale, son sens est toujours dirigé vers le haut (puisqu’elle est opposée au poids), son intensité est égale au poids de l’air ambiant déplacé par l’objet… Dès le 3 décembre 1869, un inventeur parisien appelé Emmanuel Denis Farcot déposait un brevet. Il se proposait de réaliser, pour les bateaux à grande vitesse, des effets de soulèvement de la coque parallèlement à elle-même afin de réduire la traînée. Les frères Wright, précurseurs de l’aviation américaine, ont élaboré les premiers aéroplanes. En 1907, ils ont aussi réussi l’exploit de faire décoller un catamaran doté de plans porteurs. D’autres tentatives vont se succéder. Italiens, anglais, Américains… se lancent dans cette course au voilier volant. En 1918-1919, Alexander Graham Bell, l’inventeur américain du téléphone, et son collaborateur F. W. Baldwin réalisaient des travaux inédits sur les hydrofoils à moteur. D’abord testé au Canada, le prototype HD4 réalisé était beaucoup trop lourd : près de 50 tonnes et ne possédait pas de bons moteurs légers. Les résultats étaient néanmoins acceptables pour que les recherches et conceptions se poursuivent Outre-Atlantique. Les études menées en Grande Bretagne depuis 1960 aboutiront à un Hydroptère de 200 tonnes, 46,5 m de long et 20 m d’envergure d’ailes. Ce Bras d’Or était de loin le plus avancé de son époque mais le projet fut suspendu : les coûts dépassaient énormément les prévisions… »

Mais au vu des performances de L’Hydraplaneur, mis à l’eau en 2004, on peut toutefois s’interroger sur ce concept de voilier né à l’origine pour participer au circuit Orma et qui n’a jamais réussi à convaincre sur un parcours de régate : Yves Parlier met 13j 07h 11’ 35’’ lors de The Transat 2004 tandis que Mike Golding sur son monocoque traverse en 12 j 15 h 18’ 08’’… Une sorte d’inversion de la première Route du Rhum 1978 où le petit trimaran jaune de Mike Birch coiffait le grand monocoque noir de Michel Malinovski ! Lors de Québec-Saint Malo 2004, L’Hydraplaneur annonçait 535,1 milles en 24 heures mais mettait 9 jours 6 heures et 19 minutes pour traverser, soit un jour et neuf heures de plus que le trimaran Orma Sergio Tacchini ! Et du côté de L’Hydroptère, vingt ans après sa conception et dix ans après ses premiers « vols », le score est plutôt maigre : il bat le temps de Louis Blériot en 1909 sur la traversée de la Manche de trois minutes entre Douvres et Calais et améliore ce temps de référence (non homologué par le WSSRC) sur les 19 milles du parcours avec une moyenne de 33,3 nœuds… Une très belle performance qui n’a malheureusement jamais pu être confirmée sur un parcours historique plus long. Car à côté de ces tentatives pour valider des concepts probablement déjà dépassés par l’évolution technologique, Gitana 11 atteignait les 32,6 nœuds de moyenne sur cinq milles lors du Défi Petit Navire à Douarnenez.

En fait, les conditions optimales de ces trois types de voiliers sont assez similaires pour claquer des temps canon : le vent de travers avec 25 nœuds. Il ne reste plus qu’à les rassembler sur un même parcours pour valider définitivement la voie de progression la plus probante, mais les skippers auront-ils le courage de mettre en cause leur discours en confrontant sur le terrain leurs machines ? On peut en douter…

(*) Le record absolu sur 24 heures est détenu par Orange-2 avec 706,2 milles parcourus. En solitaire sur 24 heures, il est la propriété de Francis Joyon sur IDEC avec 542,7 milles. En 60 pieds, seul le record en solitaire est officiellement reconnu par le Word Sailing Speed Record Council (WSSRC) mais aucunement en équipage à l’heure actuelle. Pourquoi ? La question a été posée au WSSRC et nous vous informerons de sa réponse.

Plus d’infos sur :
L’Hydroptère : http://www.hydroptere.com/
L’Hydraplaneur : http://www.parlier.org/hydraplaneur/
WSSRC : http://www.sailspeedrecords.com

DBo.