Trois Class40 « scows » ( nez-ronds) se retrouvent quasiment sur la même ligne à 24 heures de l’arrivée en baie de Saint Paul et après 8000 milles parcourus. Le duel homérique entre CREDIT MUTUEL – Ian Lipinski et Amélie Grassi – et BELGIUM OCEAN RACING / CURIUM – Benoit Hantzperg et Renaud Dehareng se poursuit après un 26e changement de leader intervenu avant – hier au profit du Class40 français. Mais le plus incroyable ces derniers jours reste la spectaculaire remontée de l’équipe allemande NEXT GENERATION BOATING AROUND THE WORLD – Lennart Burke et Melvin Fink – respectivement agés de 23 et 26 ans. 
Après avoir accusé un retard de 600 milles il y a dix jours, nous les retrouvons ce jour, au classement de 05h00 UTC (09h00 à La Réunion), à seulement dix petits milles du concurrent belge. Comment s’est réalisée cette incroyable performance ?
La remontée a commencé après le passage de l’île de Gough, en Atlantique Sud, à environ 1 300 milles de l’Afrique du Sud. Alors que les deux premiers leaders devaient tirer des bords au portant le long de la limite sud du parcours, vers 42°S, les jeunes Allemands ont pu bénéficier de conditions favorables leur permettant de suivre une route plus directe.
Au cap de Bonne-Espérance, le 22 octobre, le retard n’était déjà plus que de 328 milles. En entrant dans l’océan Indien, le scénario heureux s’est poursuivi, avec à chaque fois une situation où, comme on dit dans le jargon des régatiers, « ça revient par l’arrière ». Les premiers, confrontés à une zone complexe de calmes et de courants, ont vu revenir sur eux nos talentueux navigateurs germaniques, toujours poussés par les bons vents.
Certes, sans des conditions météorologiques exceptionnellement favorables, une telle remontée n’aurait pas été possible, mais il faut saluer la détermination de cet équipage, qui n’a jamais baissé les bras. Et les deux duellistes de tête, toujours absorbés par leur bataille d’anthologie, n’avaient peut-être pas toujours le regard dans le rétroviseur…
Environ 350 milles séparent désormais le trio de tête de l’arrivée de cette deuxième étape de la GLOBE40, qui restera sans aucun doute comme un moment d’anthologie dans l’histoire de l’événement, de la Class40 et de la course au large en général. Les observateurs ont depuis longtemps cessé de faire des pronostics quant au grand vainqueur, attendu demain en fin de journée à La Réunion.
Mais le dévent traditionnel de l’île, qui s’étend jusqu’à une vingtaine de milles au large, risque bien de rappeler au trio que les cartes peuvent encore être rebattues, et ce, dans tous les sens. Et si c’était finalement l’équipage de Hambourg qui remportait cette étape à coefficient 3 ? Quel retournement de situation ce serait !
Cette bataille aux avant-postes des Class40 dernière génération ne doit pas faire oublier la performance remarquable et la compétition parmi les Class40 “classiques”, dits « pointus », qui ont dû affronter des conditions très difficiles lors du contournement de la pointe sud de l’Afrique. L’écart avec le premier “pointu”, BARCO BRASIL, n’est que de 800 milles, soit 3 à 4 jours de mer : tous sont dans la même course, même si les classements distincts compensent les différences de génération et valorisent chacun.
La performance humaine est immense pour ces équipages, souvent amateurs, qui, comme les professionnels, affrontent la fatigue, le froid, et parfois même la peur, face à la puissance illimitée de la nature dans ces fameux Quarantièmes Rugissants.
FREE DOM, proche de l’Afrique du Sud, affronte actuellement des conditions très dures, avec des vents à 40 nœuds et plus. WILSON et FREE DOM ne sont séparés que de 20 milles au classement, tandis que JANGADA RACING suit à 100 milles. Il reste encore près de 1 900 milles aux skippeuses Mélodie Schaffer et Julia Virat, sur WHISKEY JACK, avant de retrouver la terre ferme.
Pour tous, quel que soit le classement, l’émotion sera immense après cette odyssée vécue depuis le départ, le 2 octobre dernier, des îles du Cap-Vert.
 
             
		