Figaro.Jeanne Grégoire : « Le Pôle est au rendez-vous de la mixité »

Photo Alexis Courcoux

La Transat Paprec qui s’élance dimanche de Concarneau est la première transatlantique en double mixte. Une femme et un homme sur un même bateau, l’idée portée par la Fédération Française de Voile, a longtemps été à l’ordre du jour des Jeux Olympiques. Elle n’a pas été retenue pour les prochains Jeux mais elle permis de fait grandir le concept d’une compétition mixte, en phase avec l’évolution de la société.

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Le Pôle France s’est emparé de ce sujet dès 2019 avec la création du challenge Océane – sélection exclusivement féminine – mis en place avec le soutien de la Région Bretagne et du Crédit Mutuel de Bretagne. « Le Pôle est au rendez-vous depuis quatre ans, en phase avec les politiques publiques » résume Jeanne Grégoire, directrice du Pôle Finistère Course au Large. Au sein de la structure, les nouvelles arrivées ont trouvé des sources d’inspiration à l’image de Samantha Davies qui a participé à trois Vendée Globe. La jeune génération est donc prête à prendre la relève. Elodie Bonafous, détectée et formée par le Pôle France, est la première femme à réaliser un podium d’étape sur la Solitaire du Figaro et démontre l’efficacité du dispositif. D’une manière plus générale, plus de la moitié de la flotte de cette Transat Paprec a été entraînée par le Pôle France. Jeanne Grégoire, qui a signé trois podiums sur cette course explique l’impact de ce format inédit. Erwan Tabarly, entraîneur au Pôle dresse un tour d’horizon des équipages qu’il a coaché.

A cinq jours du départ de la Transat Paprec, quel est le niveau de la flotte ?

On considère que tous les équipages sont des bizuths. Ils n’ont pas tous le même niveau d’expérience et ils ont assez peu de préparation, même si aucun ne part « à l’arrache ». Elodie Bonafous et Martin Le Pape étaient les seuls à avoir tous les deux l’expérience de cette course mais ils ne peuvent pas prendre le départ. Je les aurais mis en favoris mais, sans eux, c’est beaucoup plus ouvert. Je suis incapable de donner un podium.

Quel est l’impact d’une Transat Paprec sur les nouvelles générations ?

Il y a déjà des vocations fortes chez les filles. On le voit avec la Plastimo Lorient 6,50 qui a vu la participation de 80 équipages mixtes. C’est énorme. Cette Transat Paprec permet de faire monter le niveau des filles qui vont toutes gagner en expérience. Elles auront navigué à haut niveau pendant plusieurs semaines, à travers l’Atlantique, et ça, c’est inestimable.

C’est différent de coacher une flotte en double mixte ?

Il n’y a pas de grosses différences. On cherche avant tout à renforcer les fondamentaux. Sur les éditions précédentes, il y avait déjà une histoire commune entre les skippers alors que cette année, dans la majorité des cas, nous sommes sur une collaboration à construire, cela implique de rechercher l’efficacité. Sur le plan du coaching, on s’adapte facilement mais il y a tout de même une différence notable en ce qui concerne les infrastructures. Elles doivent être adaptées à un public mixte pour que chacun soit à l’aise, je pense notamment aux vestiaires ! C’est un détail mais qui a son importance.

Qu’est-ce qu’une transat en double a de particulier ?

On croit souvent que c’est la somme des individualités qui fait la performance mais c’est faux. Une transat, ça n’est pas 1+1. Pour réaliser une performance, il faut être capable de mettre l’autre dans une configuration où il va être bon. Certains ont besoin d’être sous pression, d’autres ont besoin d’être rassurés, chacun à son tempérament. Il faut savoir prendre soin de l’autre, de le laisser se reposer, lui préparer un petit plat quand il a un coup de mou et, d’une manière générale de lui faire confiance. Sur une course comme la Transat Paprec où les choix d’équipages ont été limités, c’est encore plus important.

Après une carrière de skipper professionnel, Erwan Tabarly a rejoint le Pôle Finistère Course au Large en tant qu’entraîneur depuis deux ans. Il a suivi la préparation des équipages de la transat et dresse une revue des effectifs à quelques jours du départ.
-Corentin Horeau et Pauline Courtois (Mutuelle Bleue) :
Corentin possède déjà une grosse expérience du large. Il a une belle maîtrise technique et un tempérament facilitateur vis à vis de Pauline. Il a une capacité à partager sa connaissance et à embarquer sa co-skipper pour qu’elle donne le meilleur d’elle-même. C’est une grande force.
-Basile Bourgnon et Violette Dorange (Edenred) :
Ils ont tous les deux l’expérience des transat et l’expérience du double. Ils n’ont rien à prouver et prennent beaucoup de plaisir à naviguer. Ils sont jeunes et fougueux avec une vraie culture du large. Ils ont du fun, ils s’amusent sur l’eau. Ce sont des qualités mais il y a également les défauts de leurs qualités.
-Loïs Berrehar et Charlotte Yven (Skipper Macif) :
A la différence des autres équipages, Charlotte et Loïs ne se sont pas vraiment choisis puisqu’ils font partie de la même écurie mais cela fonctionne très bien. Loïs a déjà l’expérience de la Transat et ils maîtrisent tous les deux parfaitement le Figaro.
-Guillaume Pirouelle et Sophie Faguet (Région Normandie) :
On connaît toutes les qualités de Guillaume qui a déjà réalisé de très belles performances. Ils ont décidé tard de partir ensemble mais s’entraînent beaucoup. Ils ne laissent rien au hasard. Pour Sophie, c’est un rêve qui se réalise car elle part aux côtés d’un des meilleurs figaristes et elle porte les couleurs de sa région, la Normandie. L’histoire est belle.
-Gaston Morvan et Anne-Claire Le Berre (Région Bretagne – CMB Performance) :
Ils relient toutes les compétences et leurs expériences individuelles devraient leur permettre une grande complémentarité. Gaston est dans le top 5 des figaristes, il sait faire de stratégie car il a été routeur lors de la dernière Route du Rhum. Anne-Claire a fait des Préparations Olympiques, du Mini, de l’IMOCA, elle connaît toutes les facettes de la course. Le challenge est que cela fonctionne ensemble. Cela demande de la générosité de l’un envers l’autre.
-Chloé Le Bars et Hugo Dhalenne (Région Bretagne – CMB Océane) :
Ils s’entendent hyper bien. L’équipage s’est composé sans se poser de questions. Aucun des deux n’a l’expérience d’une transat en Figaro mais s’ils se font confiance, cela peut bien se passer. Chloé vient de gagner la première manche d’une course en Mini, cela va la mettre en confiance et valide les progrès qu’elle a pu faire depuis qu’elle navigue en Figaro.