Dans moins de 48h00 COMMEUNSEULHOMME quittera le ponton pour remonter le chenal des Sables, précédé par Spirit of Hungary et suivi par Spirit of Yukoh. C’est le moment tant attendu de ce Vendée Globe, celui de larguer les amarres, mais ces quelques heures avant de prendre le large sont loin d’être anodines. « Le départ m’inquiète plus que les mers du sud » souligne Éric. Il faut dire que c’est la première fois qu’il s’élance sur une course en solitaire. La prudence et la concentration sont donc à l’ordre du jour et c’est aussi pour trouver ses marques que l’équipe est sortie en mer mercredi dernier. « L’objectif est de faire baisser le stress » expliquait le skipper même si pour l’heure, le stress semble lui glisser dessus sans trouver prise. « Ça reste du bateau à voile » relativise t’il. Interview.
Où en es-tu de ta préparation ?
Depuis qu’on est arrivé, le bateau est en chantier. Il y avait plein de choses à traiter mais ça s’affine. On est maintenant sur de petites choses. Il y a à bord mes lunettes, mes casquettes, ça va être ma maison pendant trois mois. Alizée a déposé toutes les petites affaires qui vont faire ma vie de tous les jours et les gars sont dans le détail. Je ne suis pas tellement à bord mais l’équipe est là pour ça. Elle termine son marathon alors que moi, je commence à me reposer. Ce moment de village comble mes attentes. Ça fait rêver les gens, je m’imagine tellement à leur place.
Comment se déroulent tes journées ?
Je fais la météo, je réponds aux médias et je me prépare. Je regarde les premières heures de course et le dégolfage (la sortie du Golfe de Gascogne, ndr). Ça influence beaucoup mon état d’esprit. On va avoir du vent fort mais, à bord de nos bateaux, ce sont des conditions maniables. On va partir tout schuss vers le sud et on sera vite sous la latitude de Lisbonne. C’est à partir de ce moment que ça devient plus sécurisant.
Quelle est l’ambiance avec les autres marins ?
Il y a une ambiance sympa avec certains skippers. J’ai diné avec Rich Wilson et Alan Roura, ce sont des gens dont je me sens proche. Je suis un peu nostalgique de l’époque Auguin et Autissier qui partaient sur une énorme aventure. Aujourd’hui, c’est une compétition et on n’est moins invités sur les bateaux les uns des autres. Je voudrais tous les voir, ils sont tellement différents.
Tu as eu Isabelle Autissier au téléphone ?
Isabelle Autissier m’a dit que j’allais faire un premier mille, puis un deuxième et un jour, je me réveillerais et j’en aurais fait 23 000. Elle m’a dit qu’il ne fallait pas que je m’en fasse une montagne. Ça reste du bateau à voile et je ne veux pas trop le prendre au sérieux. Je ne ferais sans doute pas d’autre Vendée Gobe donc je dois prendre du plaisir. Je veux tout savourer en me disant que c’est la dernière fois. Si je dois m’arrêter et demander de l’assistance, je veux tout de même aller au bout, même hors course.
Isa me dit de raconter l’histoire, ce que je ressens, y compris mes faiblesses. Mener ce bateau, c’est un truc de fou. Tout est une question de rythme, je veux y aller à ma façon. Je veux me libérer de ce que pensent les autres. C’est facile de vouloir impressionner les gens du milieu. Avec la fatigue, ce sont les coups de folie que je peux avoir. Je sais faire avancer le bateau vite mais pas forcément longtemps. Je ne veux pas naviguer en étant angoissé.
Qu’est-ce qui compte le plus à tes yeux, la compétition ou l’aventure ?
J’ai tout fait dans le respect de la compétition. Je me suis fait entourer par Mer Agitée, on a tout fait pour la compétition. Je veux vivre le truc à fond mais la première raison de mon départ n’est pas la compétition. Je veux tirer le maximum du bateau. Le bateau est fort mais c’est moi le maillon faible. C’est moi le handicap !