274 milles en 24 heures (soit presque 1/10ème du parcours), près de onze nœuds et demi de moyenne depuis le départ de Plymouth malgré le petit temps des côtes anglaises, quatorze nœuds lors des derniers pointages : le rythme de The Artemis Transat prend des tours ! Car le vent modéré de secteur Nord pour sortir de la Manche et traverser la mer d’Irlande a laissé place à une brise plus soutenue de Nord-Est d’une quinzaine de nœuds lundi matin, puis à un zéphyr qui se muscle depuis le début de l’après-midi, en tournant à l’Est d’une vingtaine de nœuds. Et si la première nuit a été l’occasion de manœuvrer et surtout de veiller car le trafic des cargos et des bateaux de pêche est toujours intense à la sortie de la Manche, la première journée a commencé par de longues glissades sur une mer plate qui se gondole au fil des heures !
Et sous spinnaker au-delà de dix-huit nœuds de vent réel, mieux vaut rester vigilant, soit à la barre, soit avec la commande de pilote, pour réagir immédiatement à un renforcement du vent ou à une petite rotation de la brise. Au risque de partir « au tas », « en vrac », « au lof », « au tapis », bref en quenouille avec 600 m² de voilure à gérer ! La deuxième nuit de mer s’annonce donc aussi peu réparatrice pour les corps et l’objectif des solitaires sera avant tout de garder les yeux ouverts et les bras réactifs. Il faudra d’abord gérer l’empannage qui devrait être imminent en ce lundi soir et faire passer la quille et le matériel à l’intérieur, déplacer les voiles en stock, puis changer la bôme de côté ainsi que le spinnaker avec ses dizaines de mètres d’écoute à reprendre : une check-list de près de vingt actions successives et différentes. pour ne pas se retrouver « sur la tranche » en sortie de manœuvre.
La voile, mode d’emploi
Et si dans cette première partie de course, les écarts restent encore peu marqués, il n’en est pas de même en terme de latitude : plus de trente milles de décalage entre les partisans du Nord (Peyron, Le Cléac’h) et les « Sudistes » (Josse, Desjoyeaux), sans même parler du poursuivant britannique Steve White qui est monté jusqu’à 50°N, soit avec plus de 60 milles de différentiel Nord-Sud ! Et c’est au « rez-de-chaussée » que la route semble la plus rapide désormais avec un peu plus de pression de vent et une brise un peu plus Nord-Est qu’Est par rapport aux solitaires qui sont quelques « marches » plus haut (Riou, Guillemot), et encore plus vis-à-vis de ceux qui grimpent « à l’étage » (Peyron, Le Cléac’h). Et lorsqu’il va falloir changer de cap pour aller raser le centre d’une dépression qui se présente devant les étraves, les plus « bas » devraient avoir fait un peu moins de chemin. Pour l’instant, toute la flotte progresse légèrement en dessous de l’orthodromie (route directe) et la trajectoire devrait être assez rectiligne, ces prochaines 36 heures après l’empannage. Ce qui signifie que ceux qui sont sous le vent de leurs concurrents (BT, Foncia), se retrouveront au vent de leurs concurrents (Gitana Eighty, Brit Air, PRB, Generali), après cette manœuvre. A noter que Marc Guillemot (Safran) s’est fait dérocher légèrement la nuit dernière, probablement en raison de problème technique car il était au contact de Michel Desjoyeaux à la tombée du jour : il concède vingt milles mais progresse à la même vitesse que les leaders.
Il faut donc s’attendre à ce que les écarts minimes de cette première journée de course soient un peu plus marqués demain mardi mais à l’observation des potentiels des bateaux, il est bien difficile de noter un différentiel de vitesse sensible entre les sept bateaux de tête, comme par hasard les nouveaux prototypes de l’année ! A contrario les poursuivants, déjà retardés par les petits airs des côtes anglaises qui ont avantagé les leaders, laissent inexorablement partir les « sept samouraïs » qui profitent d’une puissance supérieure à cette allure portante. Ils n’ont pourtant pas à craindre trop de décalage car l’avenir devrait plutôt ralentir en premier les leaders au passage de fronts et de zones de molles que toute la flotte aura du mal à éviter. Le vent va donc jouer au « yo-yo » ces prochains jours et les retournements de situation vont relancer sans cesse la course. La priorité des solitaires devra donc être d’éviter la fatigue pour ne pas casser du matériel et se retrouver handicapé, même si ce n’est que pour quelques heures. « Tenir le cap et ne rien lâcher » : cela ressemble à s’y méprendre à une Solitaire du Figaro, mais la différence majeure, c’est qu’un départ en vrac coûte beaucoup plus cher sur un monocoque de 60 pieds !
Classement du lundi 12 mai à 18h00 (heure française)
1- Sébastien Josse (BT) à 2 669,7 milles de l’arrivée
2- Michel Desjoyeaux (Foncia) à 3,7 milles du premier
3- Vincent Riou (PRB) à 7,2 milles
4- Yann Eliès (Generali) à 9,9 milles
5- Armel Le Cléac’h (Brit Air) à 14,2 milles
6- Loïck Peyron (Gitana Eighty) à 14,7 milles
7- Marc Guillemot (Safran) à 22,1 milles
8- Samantha Davies (Roxy) à 43 milles
9- Arnaud Boissières (Akena Vérandas) à 46,4 milles
10- Yannick Bestaven (Cervin EnR) à 55,6 milles
11- Dee Caffari (Aviva) à 57,1 milles
12- Unai Basurko (Pakea Biskaia 2009) à 66 milles
13-Steve White (Spirit of Weymouth) à 108 milles