Au lendemain de la tempête

Sebastien Josse - BT
DR

C’est une loi récurrente : c’est toujours à la fin du coup de vent que la mer se montre le plus chienne. Même quand Eole perd de sa vigueur, les vagues continuent leur travail de sape et c’est bien souvent à cet instant qu’elles expriment toute leur puissance. Jean-François Cuzon, joint à la vacation de ce matin, évoquait alors des vents soutenus de plus de 50 nœuds et ne faisait pas mystère d’une certaine appréhension. Avec raison, puisque quelques heures plus tard, une déferlante s’abattait sur le bateau et arrachait le roof de BT. Au plus vite, les deux navigateurs informaient le PC Course et déclenchaient leur balise de détresse. Immédiatement, contact était pris avec le MRCC portugais basé aux Açores de manière à organiser le sauvetage des deux navigateurs. Dans le même temps, Jean Maurel directeur de course, mettait en alerte Safran (Marc Guillemot – Charles Caudrelier) et Veolia Environnement de manière à envisager, si besoin, de dérouter un des deux bateaux sur zone.

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Contact visuel
En fin d’après-midi, l’Ocean Explorer, un bateau océanographique est entré en contact visuel et VHF avec l’équipage de BT. L’équipage du navire et les deux navigateurs vont pouvoir envisager les moyens de sauvetage les plus adaptés….

Déraillements successifs
Comparées à la situation de l’équipage de BT, les avaries qui affectent Veolia Environnement comme Artemis peuvent sembler dérisoires. Elles témoignent néanmoins de la violence des conditions rencontrées par la flotte. Rail de grand-voile arraché lors d’une prise de ris, Roland Jourdain et Jean-Luc Nélias ont d’ores et déjà prévu de s’arrêter à Horta, sur l’île de Faial, pour réparer. C’est déjà le troisième bateau affecté par ce type d’incident depuis le départ après Brit Air et Prince de Bretagne.

Sam Davies et Sydney Gavignet envisagent eux aussi une escale technique pour réparer leur grand-voile endommagée ainsi que leur Iridium défaillant. Madère, Les Açores ou pas d’escale du tout, le duo franco-britannique n’a pas encore annoncé officiellement sa décision à la direction de course. D’autres concurrents ont choisi de réparer en mer, tel Brian Thompson, qui s’est offert une visite en tête de mât d’Aviva pour installer une nouvelle girouette, la précédente ayant été arrachée dans le mauvais temps. Un bel exploit pour Brian et Dee Caffari quand on imagine l’état de la mer sur zone.

Grand écart
Sur le plan sportif, cette Transat Jacques Vabre reste plus ouverte que jamais avec un écart latéral de plus de 750 milles entre les deux bateaux les plus extrêmes de la flotte Hugo Boss (Alex Thomson – Ross Daniel) au nord et Foncia (Michel Desjoyeaux – Jérémie Beyou). Joint à la vacation de ce midi, le double vainqueur du Vendée Globe semblait serein et surtout content de n’avoir subi « que » des vents de 40 nœuds. Position favorable stratégiquement au nord, équipage reposé et bateau en bon état au sud, le jeu est peut-être plus ouvert qu’on ne pouvait encore le supposer hier au soir.

Chaude alerte pour Crêpes Whaou !
Franck-Yves Escoffier alerté par un bruit suspect constatait que le bloc moteur était en train de se désolidariser de son support. Le navigateur malouin, se voyait confier un nouveau travail gratifiant consistant à fixer le bloc avec des éléments de la chaine du trimaran, le tout, bien évidemment alors que le bateau s’obstine dans une partie de saute-moutons sans fin. Avant les glissades paradisiaques à destination des Antilles, le purgatoire risque d’être encore long.

Ils ont dit :
Franck-Yves Escoffier, Crêpes Whaou ! : « Ça bouge énormément. Hier je disais que ce n’était pas l’enfer, mais aujourd’hui ce n’est pas loin de l’être ! On est parti dans le sud parce qu’on est sur un bateau neuf et en plus c’est un trimaran. On a toujours une mer hyper croisée donc on ne peut pas aller vite. En plus j’ai un problème avec mon moteur et ça sur un voilier c’est vraiment agaçant! Je suis donc entrain d’essayer de réparer pour qu’il ne se fasse pas la valise et à l’heure où je vous parle j’ai les mains en sang… C’est un peu la folie ici.»

Roland Jourdain – Veolia Environnement : « On a arraché le chariot de têtière du rail de grand voile dans une prise de ris. Le vent est entré à 40/45 nœuds, on a pris un premier ris, puis un 2ème et ça s’est décapsulé. On s’en est rendu compte une fois le ris pris, du coup on a tout de suite affalé la grand voile. On ne peut pas naviguer avec plus de 2 ris dans ces conditions donc pour le moment ce n’est pas un problème, mais si on veut s’amuser jusqu’au bout il faut réparer maintenant. Du coup on va faire un arrêt aux Açores. Si tout va bien ça devrait aller assez vite. »

Kito De Pavant – Groupe Bel : « On s’est fait une frayeur parce qu’un tuyau s’est décroché au niveau des ballasts, le bateau s’est rempli d’eau. On a du pomper. On navigue à 90 degrés du vent, donc c’est difficile de ne pas aller vite… mais comme ne nous sommes pas très toilés on marche entre 12 et 16 nœuds. C’est pas génial, génial, mais on a passé le plus dur ce matin. On n’a pas beaucoup mangé et dormi depuis le départ. C’est incroyable parce qu’hier c’était le grand beau temps, on avait 10 nœuds de vent et en moins d’un quart d’heure c’est passé à 40 nœuds. Ça a été une bonne galère pour virer de bord. Mais bon… demain ça devrait aller mieux.»


Classement de 17h
Monocoques
1 SAFRAN Marc Guillemot – Charles Caudrelier Benac à 3430,8 milles de l’arrivée
2 MIKE GOLDING YACHT RACING Mike Golding – Javier Sanso à 33,9 miles
3 GROUPE BEL Kito De Pavant – François Gabart à 42 milles

Multicoques
1 REGION AQUITAINE-PORT MEDOC Lalou Roucayrol – Amaiur Alfaro à 4146,8 milles de l’arrivée
2 GUYADER POUR URGENCE CLIMATIQUE Victorien Erussard – Loic Fecquet à 103,2 milles
3 PRINCE DE BRETAGNE Hervé Cleris – Christophe Dietsch à 404,2 milles
Non-localisé CRÊPES WHAOU ! Franck Yves Escoffier – Erwan Leroux