Armel, depuis l’arrivée du dernier Vendée Globe tu navigues en maxi trimaran et ça se passe plutôt bien avec déjà trois records à la clé !
Armel Le Cléac’h : Oui, l’après Vendée Globe est très positif pour moi. Tout est allé vite depuis mon arrivée aux Sables, il y a un peu plus d’un an. Nous avons rapidement vendu le monocoque du Vendée (devenu le Maître Coq de Jérémie Beyou) et acquis le maxi trimaran Banque Populaire VII (ex Groupama 3). J’ai commencé par des navigations en équipage pour prendre en main le bateau, puis j’ai poursuivi en solo. J’ai battu le record de la Méditerranée l’été dernier puis, plus récemment, celui de la Route de la Découverte avec en prime la meilleure distance parcourue en 24 heures en solitaire (682 milles). Je vise désormais le record de l’Atlantique nord et je serai en stand-by à New York début juin. Mais mon plus grand objectif pour cette année 2014 reste de remporter la Route du Rhum dans la catégorie des Ultimes.
Dans ce programme chargé, tu as le temps de suivre ce qu’il se passe côté IMOCA ?
ALC : Bien sûr ! Car après le Rhum, je repars pour une campagne en IMOCA avec le Vendée Globe 2016 en ligne de mire. Mon attention pour ce circuit est donc permanente. D’autant que nous avons récemment lancé la construction d’un nouveau monocoque. Le dossier a bien avancé ces derniers mois puisque nous avons choisi le chantier, CDK Technologies, et les architectes, VPLP/Verdier. La construction de l’outillage des moules a déjà commencé. Celle de la coque débutera cet été. Et nous prévoyons une mise à l’eau dans environ un an, au printemps 2015.
Pour faire des économies, Banque Populaire et Safran ont choisi de s’associer pour construire un même moule de coque. Cela te laisse tout de même une marge de liberté pour concevoir un bateau à ta main ?
ALC : Oui. Ce n’est pas parce que les deux bateaux auront la même carène qu’ils seront identiques, loin de là ! Nous pouvons nous différentier sur une multitude de détails qui, mis bout à bout, auront beaucoup d’importance : plan de pont, choix des fournisseurs, poids du bulbe de quille, type de gréement (la jauge laisse le choix entre mât aile et mât classique à barres de flèche), électronique, agencement du cockpit… Je ferai mes choix et Morgan Lagravière fera les siens. En 2016 aux Sables-d’Olonne, Safran et Banque Populaire auront peut-être des apparences très semblables. Mais en réalité, ils se distingueront en bien des points. Je vais me baser sur l’expérience de mes deux précédents Vendée Globe pour disposer d’un bateau adapté à ma manière de naviguer. Mon objectif étant que ce nouveau monocoque soit le plus abouti possible à sa mise à l’eau, pour ne pas avoir à effectuer de grosses modifications dans la phase de préparation. Nous sommes donc très pointilleux dans nos choix actuels.
Ta parenthèse en multicoque ne sera-t-elle pas handicapante au moment d’attaquer la préparation du Vendée en monocoque de 60 pieds ?
ALC : Je vais certainement perdre quelques acquis. Mais j’apprends des choses nouvelles avec le maxi trimaran, c’est une belle expérience qui me fait progresser. Je suis convaincu qu’il est bénéfique de diversifier les supports. J’ai de toute façon une bonne expérience en IMOCA, je ne vais pas tout perdre d’un coup (rires) ! Les automatismes vont vite revenir, je ne suis pas inquiet. J’aurai de toute façon du temps entre la mise à l’eau du nouveau bateau et le départ du Vendée Globe. En 2012, François Gabart n’avait pas non plus navigué pendant quatre ans avant le Vendée. Et il a pourtant gagné…
Tu as terminé deux fois deuxième du Vendée Globe. Tu voudras nécessairement faire mieux en 2016…
ALC : Il est évident que si je pars une troisième fois, c’est pour gagner ! La question ne se pose même plus. Nouveau bateau, équipe performante, longue préparation : je mets toutes les chances de mon côté pour atteindre cet objectif.
Source : Vendée Globe