A la fortune du Pot

qualif mini transat-M Girolet
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Attention, un nuage peut en cacher un autre… C’est bien ce à quoi sont confrontés les marins en tête de cette Transat 6,50 Charente-Maritime/Bahia. Le ciel s’est voilé de passages nuageux et des masses plus ou moins noires viennent ou non à la rencontre des marins au hasard de leur positionnement sur l’eau. Point de rencontre entre les alizés de l’hémisphère Nord et ceux de l’hémisphère Sud, la ZCIT comme l’appellent les météorologues s’étend, se détend et se retend et barre plus ou moins l’océan Atlantique en fonction des saisons. Calée en amont de l’équateur, cette zone de navigation est pénible et très variable avec des grains pouvant être d’une violence extrême. En un rien de temps et un souffle d’air, le vent passe de 5 à 40 nœuds et des hectolitres d’eau vous tombent dessus. Et si le moment peut être propice pour rincer les voiles, le pont voir sortir le gel douche pour LE shampoing de l’étape, le moment est également très approprié pour casser du matériel. Le but du jeu est certes de profiter du moindre souffle d’air pour gagner dans le 200° mais surtout de ne pas se faire surprendre. Il n’est pas rare d’ailleurs que plusieurs minis restent en portée VHF pour se prévenir d’un sale coup à venir, genre nuage noir pointant à l’horizon. Car il n’y a rien de plus terrible que de s’endormir et de faire réveiller voiles et quille pendulaire à contre, bateau couché dans l’eau avec état comateux et rangement de l’intérieur assuré en prime… Car, si un nuage peut mettre à mal un bateau, à 50 milles de là vous êtes à deux doigts de vous mettre à l’eau et de battre des pieds pour le faire avancer. C’est clairement une zone où il n’y a pas grand-chose à comprendre et où l’observation, l’anticipation et la réactivité font la différence.
Le Pot au Noir est donc bien cette fichue zone qui peut redistribuer les cartes et où les options extrêmes restent assez rares, les marins ne s’aventurant que rarement à l’Est du 25° Ouest. En effet, en forme d’entonnoir, c’est à proximité des côtes africaines, qu’il est le plus étendu et donc le plus hasardeux à franchir. Pas étonnant qu’Yves Le Blévec (Actual) bien ancré en tête du classement glisse à la hauteur du 27/28° de longitude, cap au 222°. Yves glisse à petite vitesse (4,8 nœuds de vitesse instantanée) mais ne s’arrête pas, calé sur la route orthodromique. Quitte à perdre du temps, autant éviter de perdre des milles. Une Lapalissade bien utile en ce moment ! Derrière, soit à 70 milles de là, la chasse s’organise et tous se tiennent et se suivent à quelques milles. Adrien Hardy (Brossard) est fidèle deuxième, mais il a six minis à moins de 30 milles dans le rétroviseur. Autant dire rien quand il reste plus de 1400 milles au compteur à parcourir. Les vitesses sont toutes quasi-identiques et frôlent les 4/5 nœuds de moyenne. Et, comme c’est bizarre, tous ces minis ne s’éparpillent guère et tous sont calés sur le même degré de longitude…

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Un avantage certain…

Assez ou pas assez les 70 milles d’avance d’Yves Le Blévec ? Il est clair que le matelas de milles constitué par Yves risque de se révéler déterminant dans les heures qui viennent. Tout simplement, parce qu’Yves sera le premier à toucher les bons effets du vent d’Est, synonyme de mise en place des alizés de Sud-Est, caractéristiques de l’hémisphère Sud. Et une fois au contact de ce zéphyr, nul doute que la puissante carène du plan Lombard alignera les milles. Et les quelques heures gagnées dans ce régime de vent seront primordiales pour le reste de la course. Il lui faudra alors maîtriser la puissance de son bateau en portant une scrupuleuse attention au matériel. Car, les quelques 1 000 milles restants vont se faire sur un même bord et l’usure sera à son comble. Usure des voiles, des écoutes, des haubans, du système de quille, des safrans sans oublier de l’humain. Le bateau va reprendre son air penché et ce, pour de nombreux jours. La carène va taper dans la mer et il faudra redoubler de vigilance à l’approche des côtes brésiliennes où la fatigue se fera sentir. Une fin de parcours qu’Yves connaît à mi-mât, puisqu’il avait terminé la Transat 6,50 2005 sous gréement de fortune…

1 mille…C’est juste la distance qui sépare Stéphane Le Diraison (Cultisol-Institut Curie) d’Hervé Piveteau (Jules – Imprimerie Cartoffset). Ils naviguent toujours bord à bord et ont installé un petit matelas de 50 milles d’avance sur les suivants que sont Francisco Lobato (BPI), Vincent Barnaud (Stgs.fr) et Gérard Marin Julia (L’Escala – C.N. Llanca). A surveiller tout de même le décalage dans l’ouest de Gérard qui pourrait être moins ralenti dans le Pot au Noir que ses camarades de jeu. Reste qu’ensuite, il aurait un angle moins ouvert que les autres une fois dans les alizés de Sud-Est.

Nouvelles du large :

– Grégory Magne (Upian.com) est arrivé à Mindelo au Cap-vert et il répare ses pilotes automatiques. – Aloys Claquin (Vecteur Plus) est arrivé également à Mindelo pour tenter de résoudre ses problèmes de safrans qui se délaminent. « Il y a deux scénarios possibles, explique Jean-Philippe Flohic, le préparateur d’Aloys, soit il a heurté un OFNI et dans ce cas-là, la cause du problème sera vite identifiée, il pourra donc réparer au plus vite, soit c’est un problème propre aux safrans et dans ce cas-là il va falloir tout checker, tout démonter, poncer, sécher et résiner… Cela va prendre beaucoup plus de temps ! Si c’est effectivement la peau en carbone qui se décolle et ce sur les deux pâles, c’est tout de même surprenant ».

– Bertrand de Pontual (Colibri) est également à Mindelo. Il a cassé dans un vrac aux Canaries sa barre, son aérien (girouette électronique…) et déchiré son spi. Il répare et repart au plus vite.

– Thibaut Reinhart sur Les blouses roses – Colas est également en escale à Mindelo. Il répare ses safrans et reprend la mer au plus vite.

– Laurence Château sur Okofen est en panne de pile à combustible. Elle a heureusement des panneaux solaires de secours qui vont lui permettre de terminer la course en faisant attention à sa consommation d’énergie. Elle a cassé également son bout-dehors, mais a réparé en mer.

(source PG/GPO)