Un revers ça va, trois, bonjour les dégâts. Il faut être fait d’un drôle de bois pour garder le moral quand le sort s’acharne sur vous. Pour Roland Jourdain, le facteur malchance a déjà sonné trois fois : la première en Atlantique sud quand, alors qu’il était à la lutte avec son pote Desjoyeaux, il a croisé la trajectoire d’un cétacé. La deuxième, lors d’un passage d’un pot-au-noir facétieux qui a cru bon de l’accompagner dans sa remontée pendant plusieurs jours et la dernière, quand il s’est trouvé contraint de traverser une dorsale au large de l’archipel des Açores. Englué dans des vents faibles, le skipper de Veolia Environnement, qui espérait en avoir terminé avec cette poisse qui lui colle au tableau arrière depuis le large du Brésil, arrivait encore à faire bonne figure. Dans l’hémisphère sud, Arnaud Boissières est logé sensiblement à la même enseigne : contraint de naviguer à proximité des côtes du Brésil, il continue de se débattre dans des vents faibles pendant que ses deux compagnons de route des mers du sud, Dee Caffari et Brian Thompson (Bahrain Team Pindar) s’échappent inexorablement. Pendant ce temps, l’Arcachonnais doit se coltiner une foule de petits pépins techniques qui viennent lui rendre la vie plus difficile : fuite de ballasts, speedomètre en carafe, petits soucis de pilote, réserve de gazole un peu juste… La course au large s’apparenterait-elle parfois à l’école du stoïcisme ?
A la fortune du pot
Pour d’autres, la roue de la chance semble tourner à nouveau dans le bon sens. Marc Guillemot (Safran) comme Sam Davies (Roxy) abordent les frontières de la Zone de Convergence Intertropicale. La traversée du pot-au-noir est toujours délicate, même s’il ne s’agit plus, comme au temps des navires négriers, de jeter par dessus bord les esclaves malades, d’où le nom sinistre de cette zone de calmes, véritable frontière météorologique entre latitudes sud et nord. Mais les deux navigateurs ne devraient pas en subir trop longtemps les influences. Brian Thompson a retrouvé, quant à lui, des conditions qui lui permettent d’exploiter la puissance de son voilier. De même, Armel Le Cléac’h (Brit Air), après un passage express d’un hémisphère à l’autre, pourrait bénéficier de vents plus réguliers pour négocier l’anticyclone des Açores. Ce qui pourrait lui permettre de reprendre encore quelques milles à Roland Jourdain qui, de toutes les façons, n’en peut mais. Steve White, quant à lui, reste bien loin de toutes ces considérations : bien calé en neuvième position, il savoure chaque jour son bonheur de réussir un pari que beaucoup jugeaient insensé. Parti sans véritable préparation, faute de financement suffisant, le navigateur britannique s’embarquait dans une drôle d’aventure. A force de persévérance et de joie de vivre, le voilà en passe de boucler son tour du monde d’ici quelques semaines. Il en est quelques uns qui parfois savent comment trouver leur bonne étoile. Tout dépend de ce que l’on cherche…
Classement :
1- Michel Desjoyeaux (Foncia) à 1280 milles de l’arrivée
2- Roland Jourdain (Veolia Environnement) à 756,9 milles du premier
3- Armel Le Cléac’h (Brit Air) à 1069,8 milles du premier
4- Sam Davies (Roxy) à 2107,2 milles du premier
5- Marc Guillemot (Safran) à 2142,5 milles du premier
6- Brian Thompson (Bahrain Team Pindar) à 2399,2 milles du premier
7- Dee Caffari (Aviva) à 2593,2 milles du premier
8- Arnaud Boissières (Akena Vérandas) à 3189 milles du premier
9- Steve White (Toe in the water) à 4037,1 milles du premier
10- Rich Wilson (Great American III) à 5328,2 milles du premier
11-Norbert Sedlacek (Nauticsport-Kapsch) à 6977,4 milles du premier
12- Raphaël Dinelli (Fondation Océan Vital) à 7045,3 milles du premier
3- Vincent Riou (PRB) – réparation accordée