Le pari légèreté de Jean Le Cam

VM Materiaux 2008 Le cam
DR

Partir sur un bateau que l’on connaît sur le bout des écoutes est loin d’être un désavantage dans une course où il faudra parfaitement connaître les limites de sa monture. Depuis son premier périple autour du monde, Jean Le Cam n’a qu’une obsession : démontrer que son pari tenté en 2004, celui de la légèreté, est fondé. Et plutôt que se lancer à corps perdu dans un nouveau projet, le skipper de Port la Forêt a préféré jouer la carte d’une optimisation de son premier monocoque. Une manière de mettre en pratique tous les enseignements accumulés lors de son tour du monde de 2004-2005. Aux risques et incertitudes du lancement d’une nouvelle machine, il a préféré faire évoluer une plate-forme qui lui convenait parfaitement.
De prime abord, VM Matériaux serait-il un « vieux » bateau ? Oui, si l’on tient compte des dernières tendances qui veulent que pour gagner le Vendée Globe, il faut un bateau encore plus puissant. Mais non, si l’on constate que les plans Verdier – Van Peteghem de Marc Guillemot et Kito de Pavant ont totalement adhéré à la philosophie de Jean Le Cam. Non encore, lorsqu’on mesure qu’au record SNSM, VM Matériaux s’est classé deuxième derrière le Gitana de Loïck Peyron et qu’aux dires de l’ensemble des skippers présents, les différences de vitesse entre les sept bateaux présents (dont deux bateaux de 2004 optimisés) demeurent infimes.

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Une évolution, pas une révolution

On le sait, la voile est un sport à maturation lente. Et le Vendée Globe 2008-2009 se jouera peut-être sur des détails infimes. Puisqu’a priori les potentiels de vitesse des bateaux sont extrêmement proches les uns des autres, c’est bien la capacité des hommes qui devrait faire la différence. Or, depuis maintenant quatre ans, Jean Le Cam ne cesse de peaufiner son bateau, de gagner du poids quand il le faut, de travailler l’ergonomie. Petit à petit VM Matériaux est devenu un autre bateau, plus réactif, plus léger, plus rapide, plus fonctionnel. Si lors des premières éditions du Vendée Globe, on a vu des avancées significatives en matière de performances, on sait qu’aujourd’hui ce sera à la marge que pourront se gagner les quelques dixièmes de nœuds.

La puissance peut être un handicap

L’équipe technique a fait le choix de la légèreté plutôt que celui de la puissance pour plusieurs raisons. La première tient au fait que dans les grosses mers du Sud, la puissance devient plus souvent un handicap qu’un atout. Ce qu’il faut, c’est pouvoir maîtriser le potentiel de machines soumises à des vents forts, des mers abruptes. Un bateau puissant travaille plus qu’un bateau léger : les contraintes sont supérieures, mettant à mal la résistance du navigateur comme celle du matériel, l’homme et la machine étant tous deux soumis à rude épreuve. Et pour faire marcher au mieux un bateau puissant, il faut un « moteur » adapté. Donc un jeu de voiles plus conséquent, alors qu’un bateau léger conservera plus de souplesse dans ce domaine et aura besoin de moins de « toile » pour donner le meilleur de lui-même. En conséquence, il sera un peu moins exigeant pour son pilote.

Chasse au poids

Par rapport au bateau qui prenait le départ du Vendée Globe en 2004, VM Matériaux a économisé près d’une demi-tonne. Et ce, sans sacrifier une seule seconde aux impératifs de sécurité : meilleure ergonomie du cockpit, refonte du tableau arrière, nouveau mât, tels sont quelques-uns des chantiers majeurs auxquels a répondu l’équipe technique.
Les aménagements intérieurs ont, eux aussi, été entièrement refondus. Avec deux obsessions majeures : chasser les poids inutiles et gagner en ergonomie et confort de vie. Deux objectifs qui peuvent paraître contradictoires, mais qui permettent de faire les justes choix. L’expérience de Jean sur le Vendée 2004-2005 s’est avérée déterminante dans ce domaine : chaque jour, le navigateur notait les améliorations qu’il pourrait apporter à son bateau. La cellule de vie est donc passée au crible des observations du navigateur. Espace simplifié, centrage des poids de l’espace cuisine, plus grandes ouvertures pour déplacer les voiles, sans pour autant sacrifier aux éléments de confort de base, comme le fait de disposer de couchettes confortables ou disposer d’une hauteur sous barrots décente. « Un Vendée dure trois mois. Et on passe plus de temps à l’intérieur du bateau que sur le pont… Il faut aussi se sentir bien à l’intérieur. » Comme le dit souvent Jean, choisir c’est aussi savoir renoncer. L’intelligence des choix se mesure à cette capacité à tout mettre en balance. Sur ce point aussi, VM Matériaux sera un bateau totalement abouti.