Echappée par le Sud

Seb joss/bt- the artemis transat
DR

Du petit temps, une mer encore agitée par des houles croisées, un ciel plutôt plombé, une lune encore timide, une atmosphère saturée d’humidité, un fond de l’air qui se rafraîchit : l’ambiance au milieu de l’Atlantique la nuit dernière n’était pas à la fête… Des empannages, des réglages, des heures de barre, n’auront pas suffi à traverser cette zone de faibles pressions très rapidement, à l’exception de Sébastien Josse (BT), qui par sa position plus Sud, a réussi à trouver un trou de souris pour prendre la poudre d’escampette ! Car Vincent Riou (PRB) qui n’était qu’à trois milles dans son sillage mercredi soir, n’a pas touché le même vent puisqu’il est relégué à près de quarante milles ce jeudi matin ! Un différentiel de plus de trois nœuds pendant toute la nuit…

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Et de fait, il n’y a que le jeune skipper français qui tire son épingle du jeu car pour ses cinq compagnons de route qui le talonnent ce matin, les écarts n’ont pas sensiblement évolué entre eux. Mais cette échappée fait très mal au moral surtout que sa position de leader lui permet de bénéficier plus tôt d’un renforcement passager de la brise de Sud-Est qui devrait s’établir à une quinzaine de nœuds ce jeudi. Reste que l’effet s’annonce de courte durée puisqu’il n’y aura de nouveau pas trop de vent la nuit prochaine !

De calme en calme
Une nouvelle zone de calmes se pointe à l’horizon mais au lieu d’être due à une dorsale anticyclonique, elle est liée à un minimum dépressionnaire… Cela ne change pas grand-chose puisqu’il n’y aura pas plus de vent pour ça ! Bref, Sébastien Josse a pris l’ascendant et avec son « coussin » d’avance, il peut regarder dans son rétroviseur pour adapter sa route aux réactions de ses concurrents. Réactions limitées par le fait que le vent est désormais établi pour tous ceux qui ont franchi la dorsale, c’est-à-dire Loïck Peyron (Gitana Eighty), Vincent Riou, Michel Desjoyeaux (Foncia), Yann Eliès (Generali) car Armel Le Cléac’h (Brit Air) était encore englué ce jeudi matin…
Qu’en est-il des poursuivants ? Toujours sous spinnaker, les vitesses sont stables mais modestes et le gain est faible pour Samantha Davies (Roxy) ou Marc Guillemot (Safran) : le ralentissement provisoire des leaders n’a pas été suffisant pour refaire une partie de leur retard et il est même probable que leur passage de dorsale ce jeudi avec 130 milles de décalage, n’inverse la tendance… Quant au Nordiste Steve White (Spirit of Weymouth), sa route extrême pourrait lui coûter très cher car il n’arrive pas à se sortir du piège sans vent dans lequel il s’est plongé…

Ils ont dit :
Sébastien Josse (BT) :
"J’ai pu récupérer un peu cette nuit car j’étais crevé après m’être tiré la bourre tout l’après midi avec PRB dans des vents faibles. Il a fallu barrer tout le temps pour pouvoir passer la transition. Finalement je sors devant avec quelques milles d’avance. Maintenant le vent est à peu près établi, même s’il oscille en direction. Sous pilote le bateau va quand même plus droit. C’est la première nuit où j’ai vraiment froid et où j’ai bu du thé et des soupes. J’ai sorti mon bonnet et bientôt je vais devoir mettre la 2ème couche de polaire. J’ai eu PRB à vue avant le coucher de soleil. Pour l’instant je survis sur ma nourriture fraîche du départ : des crêpes et des fruits et j’ai mangé seulement 2 lyophal."

Yann Elies (Generali) :
"Je n’ai pas eu beaucoup de vent cette nuit, donc peu de sommeil car il fallait essayer de faire avancer le bourrier le mieux possible. J’attends le pointage de 6h avec impatience pour comparer les milles entre les petits copains et moi. Je suis comme depuis hier sous grand voile haute et grand spi. J’ai toujours eu du vent portant, faible, mais toujours bien présent. En fait le vent a commencé à prendre un peu de droite donc j’ai empanné et je fais maintenant route au sud ouest. Je n’ai pas gardé contact avec Mich Desj, je n’étais pas en visu avec lui et j’ai fait au « feeling » en essayant de faire un bord qui me fait quitter cette zone sans vent. Comme on tire des bords carrés, ce n’est pas évident de trouver le bon bord. Parfois on a des doutes, donc ce n’est pas facile de faire les bons choix. Je suis content de ma route, mais ce serait bien que le vent rentre un peu pour me recaler sur mes copains du sud. C’est la première nuit sans humidité. Je n’ai pas mis le ciré, ce qui est fort étonnant et fort agréable. C’est assez étrange à cet endroit, mais je m’attends à ce que la température baisse un peu dans les heures à venir. Je vais aller faire la sieste maintenant car le vent est rentré !"

Loick Peyron (Gitana Eighty) :
"Ca va pas mal, comme toutes les nuits, un peu fatigué. Il y a peu de vent et c’est un peu tempête de blanc sur le plan d’eau. Ce ne sont pas des bonnes conditions pour se reposer, et il faut faire attention de ne pas trop s’endormir car le vent est trop variable et trop faible. Cela demande de régler les voiles en permanence. J’ai tout sorti : le gennaker et la grand voile. J’espère pouvoir me reposer dans la journée car le vent devrait revenir, ça me permettra d’anticiper un peu la journée à venir. Je ne me force pas à rester sur la route orthodromique, je joue plutôt avec le vent. Je n’ai pas arrêté toute la nuit de faire des empannages car le vent tournait de 60° en quelques secondes. Pour l’instant il ne fait pas froid c’est étonnant d’ailleurs même si inversement on n’est pas très nord. Tout à l’heure je me demandais si j’allais sortir la petite laine mais en fait il n’y a pas besoin. Je me gave de petits gâteaux et de petites barres de céréales. Je mange du fromage et je me suis fait un demi cassoulet hier et je n’ai pas encore commencé le lyophilisé".