Vendée Globe. Benjamin Dutreux : “Arrivé dans le Top10, c’était un sacré défi !”

LES SABLES D'OLONNE, FRANCE - JANUARY 27, 2025 : GUYOT Environnement - Water Family skipper Benjamin Dutreux (FRA) arrival in La Rochelle is photographed after taking 10th place in the Vendee Globe, on January 27, 2025 - (Photo by Anne Beauge / Alea)

Benjamin Dutreux a une nouvelle fois prouvé qu’il était un marin de premier plan. Dimanche, le skipper de GUYOT environnement – Water Family a bouclé son deuxième tour du monde en solitaire en 10ᵉ position, au terme de 77 jours de course marqués par des choix stratégiques audacieux et une résilience exemplaire.

Fort d’un projet plus ambitieux avec un foiler de 2015, le Vendéen s’est lancé dans cette édition relevée avec une maturité renforcée. Dès les premières semaines, il s’est distingué par sa capacité à gérer les imprévus et à rester dans la course malgré des conditions difficiles. Après un début prudent, il a gagné du terrain grâce à des options tactiques payantes, notamment dans le Pacifique et la remontée de l’Atlantique, pour intégrer le Top 10 en fin de course – un Top 10 exclusivement trusté par des bateaux neufs ou plus récents. Cette performance remarquable a été rendue possible grâce aux modifications qu’il a apportées à sa propre machine, démontrant ainsi son ingéniosité et son expertise technique. Alliant humilité, détermination et gestion méticuleuse, il a confirmé qu’il était bien plus qu’un outsider. Porté par une petite équipe extraordinaire, il a surpassé ses propres limites tout au long de cette course exigeante, témoignant de son courage et de son engagement sans faille. Rappelons par ailleurs qu’en raison des conditions météo musclées, il a fait escale au port de La Rochelle avant de rallier Les Sables d’Olonne, où un bel accueil lui sera assurément réservé, dès que la situation se sera apaisée.

L’objectif de rentrer dans le Top 10 est atteint. C’était pourtant un sacré défi !
« Oui, c’était un sacré challenge, vu le plateau exceptionnel de cette 10e édition avec de nombreux bateaux neufs ou très récents. C’était un objectif qu’on s’était fixé parce qu’on nous l’avait demandé, mais ce n’est jamais évident de pronostiquer un résultat sur une telle course, où tout peut basculer à tout moment. Cela rend la performance encore plus belle, surtout avec la bagarre jusqu’au bout. Je disais justement à Clarisse (Crémer) qu’elle ne terminait, certes, pas dans le Top 10, mais on aurait pu appeler ça un « Top 11 », tellement on a partagé une course incroyable. Nous nous sommes battus jusqu’à la fin. Sportivement, je suis content de ne pas être si loin des grosses écuries, malgré notre petite structure. Ce que je retiens surtout, c’est toute l’énergie qu’on a mise pour que ce projet fonctionne et que toutes les galères des dernières années aient finalement payé. »

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Tu es parvenu à rivaliser avec des machines bien plus récentes. C’était une surprise ?
« Oui, totalement. Je ne pensais pas forcément pouvoir me battre avec certains de ces bateaux. J’ai essayé de ne pas trop y penser et de faire ma course sans me poser de questions. Parfois, ça a payé. Mais il est vrai que j’ai souvent dû dépenser plus d’énergie que les autres pour tenir le rythme. Ce qui compte, c’est d’être fier de tout ce que j’ai donné. Il y a tellement de moments où on doute, où on est dans le dur, mais il faut continuer, ne jamais lâcher. Sur un tour du monde, on se met forcément dans le rouge. »

Cette course a été particulièrement intense jusqu’à la fin, non ?
« Complètement. J’ai l’impression que ça a été crescendo. Au début, tout le monde se jaugeait un peu, puis la pression a augmenté progressivement. Petit à petit, j’ai repoussé mes limites, mais aussi celles de mon bateau. Je pense être arrivé à mes limites à la fin, mais c’est justement ce dépassement de soi qui rend cette aventure unique. Mentalement, j’ai rarement été aussi au fond du trou qu’à la fin. Mais ce sont finalement ces instants les plus durs qui restent gravés et dont on est le plus fier. »

Justement, comment as-tu vécu cette arrivée perturbée par la météo ?
« Les deux derniers jours, je ne me battais plus contre Clarisse, mais contre le timing d’arrivée. Sur le papier, les conditions semblaient faciles, mais en réalité, c’était tout autre chose : grains, toile à renvoyer puis à réduire constamment, départs au tas… Je voulais absolument arriver dans le chenal des Sables pour partager ce moment avec l’équipe et tout le monde. Mais quand mon frère m’a dit que ce n’était pas raisonnable d’entrer à Port Olona à cause des vagues, il a fallu encaisser. Malgré tout, j’ai savouré le moment. J’ai lancé un appel WhatsApp à mon équipe sans prévenir. Tout le monde a répondu, et j’ai fait le décompte de l’arrivée avec eux. C’était quand même complètement lunaire d’être seul en pleine mer, avec un pêcheur sablais comme seul témoin de mon arrivée ! (Rires) »

La nuit qui a suivi a été éprouvante, non ?
« Oui, les conditions étaient vraiment terribles. Mais, d’une certaine manière, je me sentais moins lâche vis-à-vis de Clarisse qui vivait la même chose. Je pense que j’étais au bout de ce que mon corps pouvait supporter. Cela faisait 30 heures que je n’avais pas dormi. Dans ces moments, on sait que si quelque chose se passe mal, tout peut se briser en mille morceaux. C’est une énorme pression, surtout pour une petite équipe comme la nôtre. Mais arriver à La Rochelle avec autant de monde venu m’accueillir, c’était incroyable ! Cela m’a permis de savourer pleinement ce moment. »

Quid de la remontée du chenal des Sables d’Olonne ?
« Nous souhaitons remonter vendredi prochain à partir de 17h00. Mais avant ça, je vais profiter de la maison et surtout du petit bout à venir, qui est encore bien au chaud dans le ventre de Mathilde ! »