De fort bonne humeur, Lemonchois qui, comme ses plus proches poursuivants au classement établi à 4h, Banque Populaire à 26,4 milles, Géant à 32 milles, Brossard à 52,5 milles et Groupama 2, plus au nord, à 78,4 milles, a encore accéléré l’allure.
Il naviguait en fin de nuit « entre 25 et 30 nœuds, sur une mer plutôt clémente ». Une allure confortable pour l’homme et le bateau. Cependant, le Normand, après avoir expliqué que son multicoque progressait « sur un foil », est revenu sur un incident qui l’a amené, bien malgré lui, à jouer les funambules mardi en pleine nuit : « j’ai failli me mettre sur le toit dans la bascule de noroît il y a 24 heures, beaucoup plus de ma faute que celle du bateau qui s’est mis sur la tranche. J’ai tout choqué en grand. J’ai attendu quelques secondes pour voir si le bateau redescendrait. C’est la première fois que ça m’arrive sur ce bateau. Mais je n’ai pas eu le temps d’avoir peur. Ca ne m’a pas calmé du tout ». Interrogé sur l’heure de son passage aux Açores, il s’exprima ainsi lors d’une liaison radio à 5h ce matin : « J’allume ma télé. Elle me parle de moins de 12 heures pour être aux Açores ».
Roland Jourdain (Sill et Veolia) ne dissimulait pas davantage son plaisir d’occuper la tête de la flotte des monocoques IMOCA : « Je ne suis pas loin du pilote pour régler dans un vent instable. On a bien bossé depuis le départ. La glisse au portant, c’est physique ». Jourdain a pu dormir d’abord 1h30, puis deux fois 20 minutes depuis le départ dimanche à Saint-Malo. Il vit donc dans « une ambiance régate pique-nique » et n’a pas encore eu le loisir de prendre un repas chaud. Il demeure sous la menace de Virbac–Paprec, qu’il a délogé de la première place et qui demeure cependant en embuscade à 7,8 milles.
Franck-Yves Escoffier (Crêpes Whaou !) ne s’attarde pas davantage en route. Il a déjà creusé un écart de plus de 100 milles sur Trilogic. S’il a réduit la toile pour se reposer quelques temps, il s’apprêtait à repartir voile haute avec son grand gennaker au lever du jour.
Yvan Bourgnon (Brossard) évoquait enfin un « bonheur à l’état pur. De la glisse et encore de la glisse, c’est de la folie, des conditions de rêve. » Mais, revers de la médaille, la vigilance requise dans ces conditions qu’il qualifiait de « haute voltige » ne lui permettaient guère de s’assoupir. De plus, comme le soulignait Alain Gautier (Foncia), le vent instable associé à la houle perturbait les réglages.
Autant dire que la fatigue gagnait tous les skippers, à l’exception de Lemonchois, qui se décrivait en grande forme. Info ou intox ?
Jamais, par le passé, la Route du Rhum n’avait offert de telles conditions météo pour partir à la chasse aux records que la grande majorité des marins imaginent d’ores et déjà en très grand danger.