« Je n’avais pas remis les pieds à Saint Malo depuis 1964 » avoue Roger Nilson, navigateur co-détenteur du Trophée Jules Verne sur le maxi-catamaran Orange II et routeur de Stève Ravussin. L’impact médiatique et populaire de cette Route du Rhum le laisserait presque sans voix si l’homme passionné de météorologie n’avait tant à dire sur les exceptionnelles conditions climatiques qui sévissent sur la première partie du parcours de la Route du Rhum. Arrivé voici deux jours en Bretagne, le grand Roger n’a guère quitté sa chambre d’hôtel, accaparé par l’analyse des multiples sources d’information qu’il glane aux quatre coins de la planète ; « Nous rencontrons cet automne une situation tout à fait singulière » explique-t-il. « Il semblerait que la météo soit devenue folle et fonctionne à l’envers, avec ces hautes pressions centrées l’une sur la Bretagne, l’autre sur l’Irlande, et les dépressions en errance du côté de Madère. C’est le monde à l’envers… »
Dérèglement climatique ou simple épisode dans la grande respiration de la planète, ce scénario, s’il a le don de calmer le plus stressé des coureurs, ne fait pas forcément le bonheur des skippers de voiliers puissants qui, à l’image du trimaran Orange, font leur miel de vents soutenus et de mers ravageuses. Stève s’apprête donc à prendre un départ tout en douceur. Ce n’est qu’avec son entrée en Manche qu’il finalisera téléphoniquement avec Nilson ses options définitives. « Il va d’abord falloir s’extraire de l’embouchure de la Rance et gagner la haute mer» poursuit Roger le taciturne. « Nous suivons d’heure en heure l’évolution du système de haute pression situé au large de la Bretagne. Aucun fichier ne semble s’accorder sur sa trajectoire. C’est pourtant d’elle que découlera notre stratégie de route pour les premières 24, voire 48 heures. » Roger Nilson rejoindra lundi son Stockholm natal. Durant tout son voyage, Stève Ravussin pourra compter sur le flair et l’écoute d’un autre spécialiste depuis toujours associé à Orange, le Chilien Eduardo Valderas qui officie depuis l‘Amérique du Sud pour annoncer au team Orange les naissances et les mouvements des grands masses d’air tropicales. En course, un dialogue à trois voix pourra ainsi s’établir entre la Suéde, le Chili et le trimaran Orange de notre ami Suisse.