Gilles Chiorri, le directeur de course estime aujourd’hui « que l’on peut donc considérer que les garçons sont dans le sprint final… debout sur les pédales ». 700 milles. A peine trois jours de course. En clair : une grosse étape de la Solitaire du Figaro. Evidemment, lorsque l’on a déjà 18 jours de mer dans les pattes, 18 jours durant lesquels les hommes et les machines ont tout traversé au presque, le capital forme est déjà bien entamé. « Ca va se jouer sur la fraîcheur des uns et des autres» a commenté Yoann Richomme (DLBC – Module Création).
Ces dernières heures, nombreux sont ceux qui ont souhaité profiter de la bonne marche du pilote automatique pour tenter de recharger un peu les batteries. « J’étais complètement cramé hier. Du coup, j’ai dormi 6 ou 7 heures d’affilée. Ca m’a fait énormément de bien, j’en avais vraiment besoin » déclarait Simon Troël, ce matin, pas trop déçu, en conséquence, d’avoir laissé Corentin Horeau (Bretagne – Crédit Mutuel Espoir) lui grappiller quelques milles dans l’intervalle. Même calcul, mais dans une moindre mesure, pour Fabien Delahaye (Skipper Macif 2012) qui avouait pour sa part s’être reposé une bonne partie de la nuit. Idem pour Gildas Morvan. Ereinté hier, le skipper de Cercle Vert s’est montré satisfait d’avoir bien récupéré. « J’étais naze, je n’en pouvais plus. Avec la fatigue, on peut faire des bêtises, déchirer un spi. Pour éviter ça, c’est important de trouver un peu de sommeil » a souligné le géant de Landéda, requinqué et prêt à attaquer.
D’autres, à l’inverse, ont plutôt misé sur l’adage : « tout ce qui est pris ne sera plus à prendre ». C’est le cas d’Erwan Tabarly. Toujours aux commandes de la flotte avec 50 milles d’avance, il cravache autant qu’il peut. Pas question pour lui de voir se répéter le scénario de 2009 où, rappelons-le, la victoire lui avait échappée pour quatre minuscules minutes seulement. Le skipper d’Armor Lux – Comptoir de la Mer, parfaitement affûté physiquement, ne lésine pas. Il joue toutes les petites bascules du vent et multiplie les empannages. Une trentaine au total.
Rien à voir avec ses camarades plus au nord, à l’image de Yoann Richomme qui déclare n’avoir changé d’amure que deux fois depuis hier. « Sans doute que plus au nord, on est un peu plus chanceux car on fait face à des grains plus isolés » suppose le Lorientais. Cependant, qui dit plus au nord ne signifie pas forcément moins d’efforts. Pour en être sûr, il suffit d’observer la façon dont bataille depuis plusieurs jours Anthony Marchand (Bretagne – Crédit Mutuel Performance). « J’ai passé un temps monstre à la barre parce que j’avais des soucis de pilote automatique. Finalement, c’est un mal pour un bien parce je suis allé vite » a commenté le navigateur, soulagé par ailleurs d’avoir enfin pu solutionner en partie son problème. « J’ai changé le vérin, puisque j’en avais un en « spare ». Ca remarche mais seulement en mode compas » a précisé Anthony, bien décidé à ne surtout pas ménager ses efforts jusqu’à l’arrivée. « Il reste 72 heures de course. Si j’arrive à Fort-de-France en étant capable de courir un marathon, c’est que je n’aurais pas assez donné » a-t-il ajouté. Pour l’heure, son abnégation paie puisqu’après avoir été le premier à empanner pour se retrouver en bâbord amure à la mi-journée – les autres devraient l’imiter progressivement -, il a croisé, devant Adrien Hardy et pointe désormais à la 4e place du classement. Néanmoins, le skipper d’Agir Recouvrement, victime de la perte de son safran tribord hier après-midi, est bien décidé à ne pas lâcher le morceau. La preuve, il parvient à maintenir une vitesse supérieure à 9 nœuds avec une lame.
Ils ont dit
Anthony Marchand (Bretagne – Crédit Mutuel Performance) : « Nous avons pris un peu de grains, je suis resté à la barre. J’ai fait un gros vrac. Mon problème de pilote, c’est peut-être un mal pour un bien car du coup je reste à la barre. Je suis un peu déçu pour Adrien, c’est dommage. Ca montre bien qu’il ne faut rien lâcher et que jusqu’au bout il peut y avoir des changements. Les routages font faire un seul grand empannage pour rejoindre la Martinique. Un grand empannage c’est risqué, il vaut peut-être mieux en faire plusieurs petits. Tant que tu n’as pas empanné et que tu n’as pas validé ta place, tu ne sais pas ce que tu as gagné ».
Yoann Richomme (DLBC – Module Création) : « J’ai eu une nuit tranquille avec un ciel étoilé mais là je viens de me faire deux empannages dans 25-30 nœuds de vent. J’ai mes deux gaillards (Adrien et Anthony) devant alors je ne lâche rien. Avant, je n’arrivais pas à trouver mon rythme. Là, je vais être à fond les trois derniers jours. S’il y a des grains, ça se jouera sûrement vers la fin. Dans 24 heures on envoie le jeu pour faire du bâbord vers la Martinique. Je me demande si au sud ils ne flippent pas un peu. »
Simon Troël (Les Recycleurs Bretons) : « Ca va vachement mieux qu’hier matin ! J’étais sous petit spi toute la nuit, j’ai perdu un peu mais au moins je me suis reposé. Je vais pouvoir attaquer. J’ai vraiment beaucoup dormi et je me suis dis que de toute façon, vu l’état dans lequel j’étais, il le fallait. J’étais vraiment dans le rouge. Je n’arrivais pas à faire quoi que ce soit et puis il va y avoir le dernier empannage. Ca fait deux heures que je suis sur les fichiers météo. Je ne suis pas très joueur mais je vais aller chercher l’intérieur, me mettre entre Damien et l’arrivée et après on n’en parle plus ! »
Damien Guillou (La Solidarité Mutualiste) : « Ca ne va pas très bien ce matin et je ne sais pas si ca pourrait être pire. Ca a commencé hier soir, quand ça a molli. J’ai voulu aller dormir sous pilote. Pendant ce moment mon tangon s’est décroché du spi tout seul. Ce dernier est parti en coquetier géant dans l’étai. J’ai pu le défaire juste avant le début de la nuit mais j’ai perdu mon spi. J’ai envoyé mon troisième spi et je ne sais pas pourquoi il a pété en deux au bout de trois minutes. Donc plus de spi ! Je suis en train de réparer le grand spi qui est le moins abîmé. Je suis en train de refaire les galons et je ne me rends pas compte de la longueur totale de réparation que j’ai à faire. Trois spis en deux jours, c’est dingue ! »
Classement de 16 heures
1 ARMOR LUX – COMPTOIR DE LA MER Erwan Tabarly à 613,89 milles
2 CERCLE VERT Gildas Morvan à 49,49 milles
3 SKIPPER MACIF 2012 Fabien Delahaye à 62,88 milles
4 BRETAGNE – CREDIT MUTUEL PERFORMANCE Anthony Marchand à 92,06 milles
5 AGIR RECOUVREMENT Adrien Hardy à 104,28 milles
6 DLBC – MODULE CREATION Yoann Richomme à 120,32 milles
7 LES RECYCLEURS BRETONS Simon Troel à 214,81 milles
8 LA SOLIDARITE MUTUALISTE Damien Guillou à 251,95 milles
9 BRETAGNE – CREDIT MUTUEL ESPOIR Corentin Horeau à 259,63 milles
10 REGATES SENONAISES Arnaud Godart Philippe à 402,52 milles
11 TEKTON / AGM – REGION MARTINIQUE Eric Baray à 2063,17 milles
ABD SPONSOR ME Kristin Songe Moller
ABD GROUPE QUEGUINER – LEUCEMIE ESPOIR Yann Elies
ABD GEDIMAT Thierry Chabagny
ABD SEPALUMIC Frédéric Duthil