Chacun s’est donc appliqué à trouver ses marques et son rythme. Les stratégies des uns et des autres prenaient une teneur plus conservatrice, la sagesse dictant d’affaler spis, petits ou mediums, de prendre deux, voire trois ris dans la grand-voile, et de faire le dos rond dans le coup de vent de Nord-Est forcissant à l’approche du cap Finisterre. La flotte n’a ainsi déploré "que" trois retours au port, tous momentanés et déjà relégués au rang des péripéties. Deux arrêts à Gijon et la Corogne sont en cours et aucun abandon n’a encore été à déplorer.
Impressionnant Lobato
La course n’en demeure pas moins passionnante. Le mano a mano entre le leader catégorie Série, Francisco Lobato (ROFF TMN) et l’homme de tête des Protos HP Schipman (Maison de l’avenir Urbatys),
est stupéfiant et tout à la gloire du jeune portugais, déjà coutumier du fait avec sa victoire au scratch dans Les Sables Les Açores- Les Sables en 2008. Tous les favoris de la course s’accrochent et vont rentrer d’un même mouvement dans le plus fort du coup de vent qui va les propulser sur des bases record le long des côtes de la péninsule ibérique vers Funchal. Un premier écart est pourtant venu récompenser les leaders et il n’y a plus guère que Schipman et Thomas Ruyant (Faber France), à tenir le rythme soutenu du Portugais impérial en ses eaux. La tête de la course croise en effet au large de Vigo et c’est bien les
rivages Portugais qui s’annoncent par le travers du voilier immatriculé à Lisbonne.
Histoires de trajectoires
Une quinzaine de milles séparent ces trois protagonistes d’une autre sensation de ce début de course, l’inattendu Xavier Macaire et son voilier de Série "Masoco Bay". A la forte houle (près de trois mètres)
et au vent fort, près de trente noeuds fichiers, s’ajoutent à présent pour la majeur partie de la flotte en passe de "dégolfer", une dimension tactique : rester au plus fort du vent le long des côtes, ou s’écarter déjà vers l’ouest vers des flux plus modérés de plus en plus orientés dans l’axe du bateau? Privés d’aide extérieure à la navigation, les solitaires s’en remettent entièrement à leur sens marin et à leurs expériences individuelles pour gérer leurs trajectoires dans l’ignorance de la position de leurs adversaires. C’est là un des caractères de la magie de cette course. Stéphane le Diraison (Cultisol-Marins sans frontière), sait-il ainsi qu’il évolue déjà loin dans l’ouest de ses petits camarades? Un décalage d’une trentaine de milles en latitude existe déjà qui peut, à terme, favoriser son retour sur la tête de la flotte. Rien n’est bien entendu joué et pour tous les favoris, Fabien Després, Rémi Aubrun, Bertand Delesne, Andrea Caracci venu flirter avec les cailloux espagnols, ou le Sud-africain Matt Trautman invité surprise du Top Ten, ce sont 36 longues heures de brise qui s’annoncent. De la brise avec pour nécessité absolue la préservation du bateau, dans une configuration de vent arrière qui impose le délicat exercice des empannages à répétition avec leur lot de vracs, chalutages et grands effrois quand l’avant du bateau vient
plonger sous la vague… Un frisson qu’il tarde à Davy Beaudart, en escale technique à Gijon, et Franck Colin arrêter à La Corogne, de retrouver au plus vite. Au coeur du Golfe de Gascogne, Olivier Avram
sollicite fort son "Cap Monde 2" au bout-dehors réparé. Le danger pour lui est, bien entendu, de voir le coup de vent emporter la flotte sans lui. Il aimerait à l’évidence réintégrer au plus vite le peloton, comme
l’a fait la nuit précédente un autre malchanceux du début de course, le jeune Sébastien Rogues qui a ramené tambour battant son Série
"Generation Eole GDF SUEZ" au coeur de la flotte.